JARDIN
Les jardins de la demeure vaudoise s’épanouissent au fil de l’histoire

La Romandie abrite des maisons de maître dotées d’espaces verts somptueux, souvent inaccessibles au public. Nous leur consacrons une série estivale. Cette semaine, balade bucolique au château de Mathod (VD).

Les jardins de la demeure vaudoise s’épanouissent au fil de l’histoire

Au temps de l’occupation bernoise, la demeure était aux mains de hauts fonctionnaires. À cette époque, elle était austère et ses terres étendues avaient pour seule fonction de nourrir l’aristocratie. Près de quatre cents ans plus tard, le château de Mathod (VD) a bien changé, mais son histoire est toujours vivante dans l’esprit de Sophie Hernan, l’actuelle propriétaire. Descendante d’un négociant originaire de La Chaux-de-Fonds (NE) et petite-fille du peintre biennois Louis Rivier, cette juriste de formation s’applique depuis des années à enjoliver et moderniser les deux hectares et sept jardins de la propriété, avec poésie et passion. Elle nous accueille pour une promenade matinale.

Domaine 100% naturel

Devant l’élégante façade jaune de la bâtisse, mariant le baroque hollandais au style palladien, une allée de majestueux tilleuls plantée en 1772 attire l’attention. «On la doit à l’un des anciens propriétaires, Gaspard Burman. C’était un écuyer de Louis XV, grandement inspiré par les jardins de Versailles. Il a même construit une serre pour y faire pousser des ananas!» raconte cette férue d’histoire, qui a conservé tous les actes de propriété dans sa bibliothèque.

Plus loin, une roseraie colorée offre un refuge idéal aux libellules et papillons. Pour la magnifier, des carrés de buis ont été soigneusement taillés. «Toutefois, cette plante est régulièrement attaquée par la pyrale, un papillon parasite venu d’Asie. Pour contrer ce fléau, nous n’utilisons que des produits naturels. C’est important pour moi», assure celle qui travaille au jardin deux heures par jour, veillant à laisser des coins en friche pour accueillir les hérissons. En face, un potager garni de tomates, salades et courgettes agrémente les repas des habitants du château. «Mais nous ne pouvons pas tout faire pousser, car le sol est calcaire et la terre assez pauvre», relève cette mère de trois enfants.

Pour ravir ses trois petits-enfants, Sophie Hernan a aussi installé un poulailler, où ses locataires baptisées de noms royaux tels que Frédégonde et Guenièvre caquettent paisiblement. Derrière le muret, des centaines d’abeilles travaillent au rucher. «La miellée de la semaine passée était excellente! Nous en avons récolté près de vingt kilos», se réjouit la sexagénaire.

Honneur aux ancêtres

Si, jusqu’à présent, les arbres apportaient un fraîcheur bienvenue, l’arrière de la bâtisse bénéficie d’un tout autre microclimat. Direction le sud, avec un patio andalou qui rappelle les origines espagnoles du mari de Sophie Hernan. Des citrons et orangers y poussent en pot, profitant d’une température de cinq degrés plus élevée que dans le reste de la propriété. De part et d’autre de la piscine, des jardins méditerranéen et japonais enchantent les hôtes de passage. «Ici, on se sent comme en vacances», sourit-elle.

Si un tel domaine nécessite beaucoup d’entretien et un grand sens des responsabilités, la châtelaine n’abandonnerait pour rien au monde la maison de ses ancêtres, dont les pierres tombales placées sous certains arbres lui confèrent une aura particulière. En leur honneur, elle plante chaque année des fleurs, dont des agapanthes, les préférées de sa grand-mère. Et s’applique à faire vivre le patrimoine de sa famille et transmettre l’amour du jardin aux futures générations.

 

La truffière

Près de 250 chênes, noisetiers et ormes ont été plantés en automne 2017 devant la bâtisse. Dans deux ans, les premières truffes de Bourgogne pourront être récoltés, puis celles du Périgord, à l’aide d’un chien truffier.

 

 

 

Le jardin japonais

Les nénuphars ont éclos depuis peu sur l’étang entouré de galets. Sur l’un d’eux, une grenouille profite du beau temps. Autour, un érable du Japon et un noisetier tortueux ont été plantés, en l’honneur du Pays du Soleil levant.

 

 

 

 

La roseraie

Il a fallu près de dix ans à Sophie Hernan pour réaliser une roseraie de près de 80 espèces anciennes parfumées, variant du rouge carmin au rose clair. Des carrés de buis soigneusement taillés invitent à la promenade.

 

 

 

Le jardin méditerranéen

Dans cet espace favorablement exposé au soleil, un figuier, un olivier et des palmiers plantés près de la piscine fleurent bon l’été. Contre le mur de la chapelle, protégé du vent, une allée de lauriers s’épanouit en pleine terre.

 

 

 

 

Texte(s): Lila Erard
Photo(s): Thierry Porchet