Animaux
Une ambulance pour le bétail sillonne la Suisse romande

Si plusieurs transporteurs d’animaux sont actifs en Romandie, un jeune Vaudois se démarque par une offre unique: il véhicule en urgence des équidés ou des bovins blessés ou malades.

Une ambulance pour le bétail sillonne la Suisse romande

Un cheval en colique, un veau qui s’est fracturé une patte ou un poney qui souffre d’une diarrhée aigüe nécessitant une hospitalisation: tout propriétaire ou éleveur peut être confronté à une situation d’urgence qui exige une réaction rapide. Et un déplacement dans une clinique vétérinaire. Cependant, tous ne sont pas forcément équipés d’un véhicule et d’une remorque adaptés pour effectuer un tel convoi. C’est la mésaventure qui a touché une jument de loisir appartenant à Nicole Pousaz. En hypothermie, l’équidé devait être emmené dans les meilleurs délais au Tierspital de Berne. «Il n’est pas évident de demander à des collègues d’écurie qui disposent d’un van de tout lâcher pour s’occuper de son cheval, note la Vaudoise. Et avoir affaire à un service professionnel est rassurant en de telles circonstances.»

Sur les conseils de sa vétérinaire, elle a donc pris contact avec Sébastien Delay. Cet employé agricole à Baulmes (VD) a créé l’année passée la société Transeb, qui se charge de véhiculer les animaux 24 h sur 24 et 7 jours sur 7. «Quand l’abattoir communal a fermé, de nombreux collègues ont été ennuyés, raconte-t-il. Je leur ai alors proposé d’amener leur bétail de boucherie jusqu’à Orbe. Mais rapidement, on a également fait appel à moi pour déplacer des bêtes malades ou blessées. Je suis surpris, je ne pensais pas que la demande serait si élevée.» Désormais, la majorité de ses trajets a pour destination le Tierspital, à Berne, ou la clinique Areda, à Bex (VD), spécialisée dans les équidés.

 

Une aide précieuse

Bovins, moutons, lamas, cochons ou même chiens de grande taille: Sébastien Delay est amené à conduire un grand nombre d’espèces différentes. Si certains propriétaires de chevaux ne disposent pas toujours de véhicules adéquats, la problématique est tout autre chez les paysans, souvent équipés. «Par manque de main-d’œuvre, ils n’ont généralement pas suffisamment de disponibilité pour effectuer eux-mêmes le déplacement», note l’agriculteur de 27 ans.

Charrier une bête qui atteint parfois une tonne et qui peut avoir des réactions imprévues en raison de sa pathologie requiert une certaine expérience, afin d’éviter des blessures supplémentaires. «Il n’est pas toujours facile de savoir si l’animal souffre, car souvent, il ne manifeste pas de signes de douleur, souligne Sébastien Delay. En cas de doute, je fais appel au vétérinaire pour m’assurer qu’il est apte au transport.» Le Vaudois est prêt à intervenir en tout temps: «Cette réactivité est un plus. Je me suis dernièrement occupé d’un cheval en colique; s’il avait dû attendre une heure supplémentaire, il serait probablement décédé.»

 

Du matériel spécifique

La bétaillère de Transeb a été aménagée en pensant au bien-être animal, avec notamment une rampe d’accès basse qui facilite l’embarquement du bétail. Une caméra permet également de vérifier que le pensionnaire reste calme pendant le déplacement. «Cet équipement offre une sécurité appréciable, se réjouit la vétérinaire Chloé Monthoux. Sébastien Delay a notamment transporté un veau qui était sous attelle en raison d’une fracture et nécessitait une surveillance particulière durant le trajet.»

En Suisse romande, un seul autre organisme propose un service d’urgence similaire. Mis en veilleuse durant une période pour cause de réorganisation interne, le SACAR – Secours animalier Romandie est en effet de nouveau actif. Plutôt spécialisée dans les équidés, l’association basée à La Côte dispose d’une véritable remorque-ambulance bien agencée, ainsi que d’une grue et des filets de soutien pour intervenir dans des situations particulièrement délicates. «Nous pouvons en outre médicaliser le cheval pendant le voyage, en le mettant sous perfusion et oxygène au besoin, explique Stéphane Jean-Mairet, président du comité du SACAR. Notre van est spécifiquement homologué afin que deux personnes puissent accompagner la bête dans le véhicule tout au long du trajet, une exception qui offre une sécurité supplémentaire lors de certaines affections.»

De grands événements, comme le Concours hippique international de Genève, font appel à cette ambulance pour équidés qui est alors parquée sur place tout au long de la manifestation, afin d’offrir une sécurité additionnelle aux participants. «Pour l’heure, nous effectuons un à deux transports par mois qui concernent majoritairement des cas graves.»

Texte(s): Véronique Curchod
Photo(s): Thierry Porchet

Coût défini selon l’urgence et le trajet

Avoir recours à un service professionnel requiert un certain budget. Le prix dépend du degré d’urgence – le tarif diffère si un transport peut être planifié ou doit être effectué immédiatement –, des kilomètres parcourus et du nombre de professionnels engagés, ainsi que du matériel éventuellement utilisé. Transeb opte pour un forfait, sujet à variation en fonction de la distance. Le principe est similaire du côté du SACAR, dont les interventions coûtent plus cher en raison de l’équipement de type ambulancier. Il faut ainsi compter 800 à 1000 francs en moyenne pour un transport d’urgence effectué par cette association de La Côte jusqu’à Berne. Du côté alémanique, le Grosstierrettungsdienst, pendant du SACAR, fonctionne selon le principe de la REGA. Une cotisation annuelle de 60 francs donne droit à un rabais de 5000 francs par dommage. Il n’intervient en général pas en Romandie, pour des questions d’efficacité par rapport à la longueur du trajet.

Transports sous conditions

Il n’existe pas de cursus spécifique d’ambulancier pour animaux. Ces types de convois effectués à titre professionnel nécessitent néanmoins de respecter certaines règles. Une formation dispensée par l’Association suisse des transports routiers, qui donne droit à un permis de circulation professionnel, est obligatoire. Des cours supplémentaires ciblés, qui comprennent entre autres la législation, les principales épizooties, ainsi que la bonne manipulation des bêtes au chargement, sont exigés, tout comme une assurance adéquate.