C’est un rectangle, format boîte à chaussures ou brique de jeu de construction, qui semble avoir été posé sur ce coin de prairie arborisée sur les hauteurs de Bussigny (VD). Comme un éloge de la simplicité, la maison déploie sur deux étages et en deux nuances de noir ses façades percées d’immenses fenêtres carrées. La forme de la villa a été dictée par deux contraintes principales: il y a la législation communale sur les zones à bâtir, ainsi que la présence de deux grands arbres, classés, sur la parcelle. «Ce sont eux qui donnent sa valeur à ce terrain, remarque Didier Jordan, architecte et associé d’Atelier Nova, qui a suivi toute la conception de l’habitation. Il y a un immense tilleul derrière et un hêtre devant. Ils nous ont servi de base pour déterminer l’implantation du bâtiment, puisque nous avons voulu protéger leurs racines, tandis que certaines des fenêtres s’ouvrent tout droit vers leur ramure. C’est aussi pour les mettre en valeur que nous avons misé sur une neutralité esthétique et des volumes simples, passant par exemple par une suppression des avant-toits.»

Bois brûlé à la japonaise
Ce qui frappe le plus, vu de l’extérieur, c’est le bardage uniformément noir qui enrobe le niveau supérieur de la maison. Au Japon, d’où est originaire cette technique, on l’appelle shou sugi ban: «Elle consiste à brûler les lames de bois en surface, explique Didier Jordan. Cela les durcit, favorisant la résistance aux intempéries, tandis que la couche de carbone joue un double rôle de fongicide et de répulsif pour les insectes qui pourraient vouloir s’y installer.»

Non content de protéger la façade pour des décennies, le bardage de mélèze de l’étage cache également les caissons de store et les descentes d’eau de pluie, accentuant la sobriété visuelle de l’ensemble. Au rez, le choix s’est porté sur des plaques d’Eternit brossé, percé de grandes baies vitrées.

Deux étages, deux ambiances
En poussant la porte de ce monolithe, on est presque surpris de se retrouver dans un espace coloré et chaleureux, largement boisé et baigné de lumière naturelle. Au sol, le radier apparent, vitrifié, court d’un espace à l’autre et cache le système de chauffage au sol. La grande cuisine ouverte joue le rôle de trait d’union entre le séjour et la salle à manger, tandis que l’étage est dévolu aux chambres. «Le plan est pensé pour permettre à la maison d’évoluer avec le temps, note l’architecte. On peut facilement la séparer en deux et ainsi créer un studio indépendant.»

L’une des extrémités du rectangle se prolonge par un petit bloc qui sert à la fois de garage et de local technique, accueillant pompe à chaleur, boiler et système de ventilation. Côté eau, l’habitation fonctionne quasi exclusivement avec l’eau de pluie captée sur le toit, qui accueille également des panneaux photovoltaïques. En résulte une bâtisse à la conception à la fois simple et à la pointe de l’architecture durable, grâce à des propriétaires très au fait des enjeux actuels de construction.

«Ce que j’apprécie particulièrement dans des projets jusqu’au-boutistes comme celui-ci, c’est qu’ils montrent qu’une maison écologique peut être au cœur d’une vraie démarche esthétique, confie encore Didier Jordan. Une ossature bois ne rime pas forcément avec un bâtiment de type chalet ou avec un aspect ennuyeux.» L’allure spartiate de la villa de Bussigny séduit aussi bien les connaisseurs que les profanes: nombreux sont les habitants du quartier à s’arrêter pour l’admirer ou complimenter ses propriétaires. Rendre l’écologique esthétique, ou comment joindre l’utile à l’agréable.

+ d’infos La maison pourra être visitée lors des Journées SIA, du 2 au 4 juin prochains.

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