Reportage
Ils ont bâti une maison sur pilotis autour d’un cèdre centenaire

Chaque mois, nous vous présentons des bâtiments exemplaires sur le plan énergétique. Cette semaine, visite d’une villa vaudoise qui allie respect du sol et reconnexion au vivant, sans excavation ni béton.

Ils ont bâti une maison sur pilotis autour d’un cèdre centenaire

Dans le milieu de la construction, rares sont les propriétaires qui reçoivent des messages de remerciement de la part de leurs voisins à la fin d’un chantier. C’est pourtant ce qui est arrivé à Danièle et Georges Jungo il y a quelques mois, lorsqu’ils ont fait bâtir une remarquable villa à côté de la leur, sur un terrain de 3000 mètres carrés à Jouxtens-Mézery (VD). La raison? Le couple a tenu à conserver le majestueux cèdre centenaire qui trônait sur la parcelle, en l’intégrant dans la conception de leur projet. «Cet arbre est un témoin de l’histoire paysagère locale. Il était impensable de le couper, racontent ces amoureux de nature. Nous n’avions pas réalisé que les voisins y étaient aussi très attachés. Nous sommes ravis du résultat!» Pour ce faire, les Vaudois ont mandaté l’Atelier Nou, bureau d’architecture spécialisé dans une approche douce du territoire.

Peu d’impact sur le terrain
Érigée sur pilotis, la maison épouse la pente du terrain, ce qui n’a nécessité aucune excavation ni aucun coulage de dallage. «Généralement, il y a au moins un mètre de béton sous les villas, ce qui abîme le sol et impacte durablement le

L’habitation est principalement composée d’épicéa, de mélèze et de sapin de Douglas. «Même pour les fondations, le béton n’était pas une option, car le lait de ciment est toxique pour les arbres et la sève du cèdre attaque ce matériau», résume le spécialiste, qui a tenu à diriger un «chantier doux et le plus naturel possible». À titre d’exemple, la charpente a été montée à la main, sans aucune grue. Des parois translucides en polycarbonate ont également été posées, afin de recréer une intimité en zone d’habitation dense, tout en laissant passer la lumière et les couleurs du lieu.

Ambiance incomparable
Une large terrasse donne sur le jardin. Quant à l’intérieur, il se compose d’un grand séjour relié aux deux chambres et salles de bains via des rampes légèrement inclinées. L’ensemble de la maison est articulé autour du fameux cèdre, accessible depuis toutes les pièces grâce à des portes vitrées. «C’est une qualité de vie exceptionnelle, apprécient les deux propriétaires. Il fait frais, on sent l’odeur de la forêt, le bruit de la pluie est amplifié. Parfois, on voit des écureuils le long du tronc. C’est magique!» L’architecte, lui, parle d’une construction «axée sur le corps et les sens»: «Au lieu de s’extraire de l’extérieur lorsque l’on rentre chez soi, on accroît les qualités du dehors pour mieux en profiter dedans. Il y a un effet apaisant et une reconnexion au vivant.»

En plus de panneaux solaires à l’extrémité de la toiture, une pompe à chaleur air/eau a été installée pour produire de l’énergie thermique sans excaver. Seules des conduites pour l’évacuation des eaux usées et l’alimentation ont été enterrées. Pour la récupération des eaux claires, l’architecte a misé sur un système simple. «La pluie ruisselle directement du toit au sol, où des poutres en chêne inclinées vers l’arbre ont été placées, ce qui permet d’arroser les racines. Des copeaux de bois ont aussi été épandus. Cette matière organique agit comme un compost, qui nourrit la terre, tout en rafraîchissant la maison, décrit-il. C’est un beau cercle vertueux!»

Texte(s): Lila Erard
Photo(s): Raphaël Dupertuis

En chiffres

  • 109 m2 habitables.
  • 1 cèdre de 35 mètres de haut au centre de la maison.
  • 1 patio de 26 m2 pour accueillir l’arbre.
  • 1 an de construction.
  • 0 m2 de terre excavée et 0 m3 de béton utilisé.
  • 60 vis métalliques dans le sol pour soutenir la structure.
  • 2 rampes pour accéder aux 2 chambres.
  • 7 panneaux solaires.

Les concepteurs

Thierry Baechtold (à g.) et Claudia Liebermann ont fondé l’Atelier Nou en 1989, à Pully (VD). Leur credo: le fonctionnalisme écologique, théorisé par l’architecte australien Glenn Murcutt. Les propriétaires Danièle et Georges Jungo, enseignante et ingénieur, ont fait appel à eux pour imaginer une habitation respectueuse de la nature sur leur terrain. Ils vont louer la villa dès cet été et ont prévu d’y passer leurs vieux jours.