Architecture
Un hôtel en bottes de paille conciliant confort et écologie

Une fois par mois, nous vous emmenons à la découverte de bâtiments exemplaires sur le plan énergétique. Cette semaine, cap sur Nax (VS), où les hôtes dorment dans un établissement en paille et en bois.

Un hôtel en bottes de paille conciliant confort et écologie

Érigé à deux pas de raccards centenaires, le Maya Boutique Hôtel & Spa intrigue, même s’il s’intègre parfaitement dans ce paysage spectaculaire de Nax (VS). Surplombant la vallée du Rhône, le premier hôtel en bottes de paille de Suisse séduit ses hôtes depuis 2012. «Je ne voulais pas une architecture fofolle, mais créer un hôtel novateur, écologique et à l’impact environnemental minimum», explique son propriétaire, Louis Papadopoulos.

L’idée d’utiliser de la paille pour bâtir son établissement, saugrenue au début des années 2010, lui est venue par hasard en regardant un reportage à la télévision. Il a alors découvert ce matériau au pouvoir isolant impressionnant, bon marché et très répandu. «Au Nebraska (USA), il y a de telles maisons depuis 1870. Chez nous, ce savoir-faire avait peu à peu été oublié.»

Isolé du monde extérieur
Pour donner vie à son projet, Louis Papadopoulos a pu compter sur un architecte à la pointe dans ce domaine, le Grison Werner Schmidt. Le défi était de taille: «Nous voulions montrer que construire de manière écologique ne signifie pas sacrifier le confort des hôtes. Bien au contraire!»

L’établissement repose sur le principe du double portage, c’est-à-dire que son toit s’appuie à la fois sur des bottes de paille – qui se sont tassées en trois mois – et sur une structure en bois. Les murs, larges de 80 centimètres, offrent une isolation optimale, même en plein hiver et à 1300 mètres d’altitude. À l’intérieur, le calme est impressionnant, on se sent comme dans un cocon. Même le tintement des sonnettes des vaches paissant à côté de l’hôtel ne franchit pas l’épaisse couche de paille. Tout a été pensé dans les moindres détails: de la chaux et de l’argile colorée remplacent la peinture sur les murs et les meubles ont été créés avec d’anciens tonneaux de vin. «On a limité à 90% l’usage de produits chimiques», note le propriétaire des lieux.

Un chantier unique
Si le pétrole n’a pas sa place ici, les essences de bois sont en revanche omniprésentes. Elles donnent du caractère aux chambres lambrissées de mélèze, d’arolle, de chêne, de poirier ou encore de noyer. Leur teinte naturelle dissimule avec charme la paille. «Elle est recouverte en façades extérieures par des planches d’épicéa, poursuit Louis Papadopoulos. Les escaliers ont été conçus en chêne, un bois qui ne prend pas facilement feu et permet une évacuation en cas d’incendie. La paille est d’ailleurs tellement compacte qu’elle brûle mal.» L’acheminement de l’électricité par le sol et la répartition de l’eau dans les chambres ont été en revanche un casse-tête. Louis Papadopoulos et son épouse ont suivi le chantier de près, afin de pouvoir intervenir sur le bâtiment au besoin. «À l’époque, il y avait peu de professionnels spécialisés dans l’utilisation de ce matériau. Ce sont des constructions assez archaïques sur la forme, mais qui bénéficient des dernières technologies en matière d’aménagement.»

Cela s’applique aussi au chauffage de l’hôtel, qui fonctionne grâce à des tubes solaires, accrochés en façade, et à la chaleur du four à pizza. «On a disposé 50 mètres de tube en cuivre autour du dôme en pierre. On me disait que c’était impossible et, au final, ce four nous chauffe tout l’hiver.» Les ampoules led sont partout. Malgré le fait que l’établissement, contrairement à de l’habitat privé, dispose d’une cuisine et d’une buanderie professionnelles gourmandes en énergie, la facture d’électricité de l’hôtel se limite à 6000 francs par an. Sur ce point, le couple Papadopoulos a de plus pu profiter de la situation géographie de Nax. «Dans le val d’Hérens, on a la chance de pouvoir bénéficier d’un courant vert, les villages étant alimentés par l’électricité du barrage de la Grande-Dixence», relève l’hôtelier.

Un pas pour la mobilité verte
Le confort des lieux est visiblement propice à la réflexion et à l’innovation. L’hôtel, désormais spécialisé dans les séjours de jeûne, offre depuis peu à ses hôtes la possibilité de circuler dans l’ensemble du val d’Hérens grâce au réseau de voitures électriques en libre-service Green Mobility. Le couple a mis sur pied ce système pour permettre à ses clients de délaisser leur voiture, afin de se déplacer en transports publics, dans le respect de l’environnement. Dix établissements, dont l’Office du tourisme local, ont rejoint la démarche, inédite au niveau mondial.

+ D’infos www.maya-boutique-hotel.ch

Texte(s): Céline Duruz
Photo(s): Maya Boutique Hôtel

L’architecte

En 2001, Werner Schmidt réalise sa première maison en paille à Disentis (GR). L’architecte de 67 ans en a érigé une trentaine depuis en Suisse (dont une à Lausanne en 2012) et en Europe. À ses yeux, la paille est un matériau de construction à nul autre pareil: isolante (du point de vue thermique et phonique), elle est disponible en quantité et affiche un bilan énergétique neutre.

+ D’infos www.atelierschmidt.ch

L’hôtel en bref

  • 10 chambres de 21 m2.
  • 80 cm L’épaisseur des murs en paille.
  • 250 tonnes de CO2 ont pu être économisées en utilisant la paille et le bois à la place du béton et du métal.
  • Le four à bois a produit 43824 KW en sept ans, les tubes solaires 49000 KW.
  • 2015 L’établissement est sacré meilleur hôtel du monde grâce à son concept écologique.