Architecture verte
Bienvenue dans un havre de paix fait de paille et de terre jurassiennes

Une fois par mois, nous vous emmenons à la découverte de bâtiments exemplaires sur le plan énergétique. Cette semaine, on découvre la première maison de paille de Suisse romande à Essertfallon (JU).

Bienvenue dans un havre de paix fait de paille et de terre jurassiennes

Elle fait face aux Franches-Montagnes, que l’on admire depuis la terrasse ou confortablement installé dans le bain nordique placé à l’angle du bâtiment. Depuis près de vingt ans, la Maison de paille d’Essertfallon, cernée par un verger d’une quarantaine d’arbres fruitiers à hautes tiges, est la preuve concrète que les matériaux naturels sont aussi fiables que le béton et le métal. Ici, le bois, qui forme la charpente et tempère les espaces de vie, provient des forêts de la Fondation des fermes communautaires libres du Clos du Doubs, propriétaire des lieux.

Les murs et le sol sont recouverts avec de le terre récupérée lors de sa construction, mêlée à 30% d’argile et de pigments naturels de différentes teintes, utilisés pour réaliser des dessins sur les parois. «Dans la douche, on a utilisé du tadelakt, un enduit décoratif traditionnel marocain imperméable composé de chaux, détaille Jacques Froidevaux, créateur et gardien de la bâtisse. Au-dessus de l’évier, nous avons ajouté de l’huile de lin au crépi naturel pour qu’il résiste à l’eau.»

La pièce de vie est baignée de lumière. La baie en triple vitrage, occupant l’entier de la façade, réchauffe la demeure en douceur. Personne n’y habite cependant à l’année, mais la Maison de paille est rarement vide. Élément central de la vie du hameau, elle est un havre où l’individualisme laisse sa place au collectif, que ce soit pour le travail des 20 hectares de champs environnants ou lors de séminaires. On peut y dormir, dans des chambres d’hôte sur des lits en carton recyclé ou, à l’étage, dans un dortoir. Les panneaux photovoltaïques installés sur le toit servent à l’alimenter en électricité, 90 m², thermiques cette fois, seront ajoutés prochainement autour de la terrasse. Des toilettes sèches et conventionnelles complètent le tout.

Un exemple de transition

Agriculteur, Jacques Froidevaux y reçoit depuis plus de quinze ans des visiteurs venus se sensibiliser aux médecines naturelles ou au chamanisme ainsi que se reconnecter avec l’environnement. «Cette maison est un exemple fonctionnel d’une autre manière d’envisager à la fois notre habitat et notre rapport avec la nature. On veut montrer que la transition écologique est possible de la façon la plus didactique possible. Je suis convaincu que l’on ne va pas s’en sortir grâce aux nouvelles technologies, mais aussi en s’inspirant de la spiritualité et du savoir des peuples anciens», plaide le futur retraité. Une cuisine solaire et une autre au feu de bois sont en cours de construction à l’arrière du bâtiment.

Logements coopératifs prévus

À terme, des ateliers destinés aux personnes envisageant de construire leur maison préfabriquée en paille seront programmés. Sur une parcelle située un peu plus haut dans le hameau, une coopérative de logements liée à une microferme, dont les dix parcelles seront gérées en permaculture par les futurs habitants, verra aussi le jour ces prochains mois. «La Maison en paille est le centre de notre vision. Nous voulons créer ici un ensemble cohérent en favorisant l’écologie de vie et l’économie circulaire, affirme Jacques Froidevaux. Beaucoup de gens viennent ici pour trouver un sens à leur vie; cette demeure leur sert de tremplin.»

Texte(s): Céline Duruz
Photo(s): Nicolas de Nève

En chiffres

  • 660 m2 de plancher sur trois niveaux et une terrasse plein sud de 100 m2.
  • 5 chambres d’hôte, un dortoir de 18 places.
  • La vingtaine d’hectares de forêt appartenant à la fondation fournit le bois de chauffage.
  • 80 m2 de panneaux photovoltaïques auxquels s’ajouteront 90 m2 de cellules thermiques.

Le concepteur

L’agriculteur Jacques Froidevaux est un autodidacte qui a appris à construire des charpentes. Il a érigé avec des amis la première maison de paille romande au début des années 2000, en s’inspirant de ce qui se faisait alors en Allemagne. La fondation dont il est membre a patienté cinq ans avant de recevoir le permis de construire pour cette bâtisse unique en son genre, le canton du Jura craignant qu’elle ne résiste pas au feu.

+ d’infos lamaisondepaille.ch