Société
Le développement personnel passe par le cheval

Valoriser ses talents, apprendre à se connaître et améliorer son quotidien sont des thématiques à la mode. Désormais, le cheval accompagne également l’être humain sur le chemin de l’épanouissement personnel.

Le développement personnel passe par le cheval

Dans un enclos de la ferme de Maison Rouge, à Vaux-sur-Morges (VD), une femme se tient debout à côté d’un cheval. Celui-ci s’intéresse à elle, tendant son encolure dans sa direction, puis se détourne pour brouter un brin d’herbe. La scène paraît des plus banales. Pourtant, Eowyn, un irish cob âgé de 3 ans, est utilisé ici dans le cadre d’une séance de développement personnel. Guidée par la praticienne Jacqueline Lux Gerber, d’Equiter, qui la questionne sur ses ressentis, Susie décode les émotions qu’éveille l’animal au plus profond d’elle-même. «Je suis venue chercher des outils afin d’apprendre à lâcher prise sur une situation douloureuse. En observant comment Eowyn peut se détacher du troupeau et le réintégrer sans problème, j’intègre le fait que je puisse avoir une fonction sans devoir la garder en permanence.» Loin d’être cantonné au simple rôle de monture, le cheval devient désormais un accompagnateur de l’épanouissement psychologique et spirituel de personnes de tous âges. Les séances se déroulant à pied, il n’est pas nécessaire d’être cavalier pour avoir recours à cette technique. Le praticien adapte le choix de l’animal et des exercices en fonction de l’expérience de chacun.

Explorer ses émotions
Contrairement à d’autres thérapies où l’animal est utilisé pour traiter des pathologies, le développement personnel guidé par le cheval vise à aborder des questionnements intimes. «Je suis de nombreuses personnes qui ont vécu un burn-out, explique Nicole Flückiger, de Chevalparcoeur, à Cerniat (FR) et La Châtagne (NE). Épuisées par un quotidien où elles foncent en permanence, elles accordent souvent trop d’importance au mental au détriment de leur corps. Le cheval leur permet de s’enraciner dans le présent.» Mère de famille ayant des problèmes d’autorité avec ses enfants, jeune femme ne se sentant pas digne d’être aimée, quinquagénaire souhaitant améliorer sa confiance en soi: les problématiques abordées peuvent être très diverses. «J’ai tendance à me disperser, papillonnant d’une activité à l’autre, témoigne Laurence Theulaz, de La Tour-de-Peilz (VD). Grâce au cheval, j’apprends peu à peu à centrer mon attention sur une pensée ou une action à la fois. En effet, si je ne suis pas présente et laisse mon esprit divaguer, le cheval va directement me sanctionner en cessant de suivre mes indications.»

Pas de tricherie possible
Plus que tout autre animal, le cheval se prête particulièrement bien à explorer ses émotions par un travail d’introspection. «En tant que proie, cet animal a développé une extrême sensibilité, qui lui est nécessaire pour échapper au danger, explique Stéphanie Durif, d’Equiter. Celle-ci lui permet de lire le langage corporel et les émotions.» Le cheval agit alors comme un miroir, en reflétant l’état émotionnel de la personne en face de lui et ses possibles incohérences. «On ne peut pas tricher face à cet animal, souligne la praticienne. Il permet de visualiser la problématique de manière très concrète. Une mère de famille qui avait des difficultés à se faire respecter de ses enfants s’est ainsi fait bousculer par le cheval. En prenant conscience qu’elle ne s’imposait pas, elle a pu enclencher un processus de transformation intérieure.»

Texte(s): Véronique Curchod
Photo(s): Véronique Curchod

Questions à... Séverine Perrenoud Kakulya

Séverine Perrenoud Kakulya est psychologue, thérapeute avec le cheval et zoothérapeute à Meyrin (GE)

Au vu des nombreux praticiens qui utilisent le cheval, quels conseils donneriez-vous à une personne qui souhaite tester cette approche?
Comme dans tout travail de développement personnel, ressentir une certaine affinité avec le thérapeute me paraît essentiel pour arriver à un résultat. Il ne faut pas oublier qu’on va devoir se mettre à nu et réveiller des émotions très intimes. En outre, il est indispensable que le thérapeute ait suivi une formation sérieuse, afin d’accompagner correctement la personne. Au contact de l’animal, celle-ci va souvent être profondément remuée: il faut qu’elle soit guidée pour transcrire ses ressentis en des outils utiles au quotidien. Et n’oubliez pas que l’utilisation du cheval reste une pratique potentiellement dangereuse, à cause notamment des risques de coups de pied. L’improvisation n’a pas sa place dans ce cadre-là.

Pourquoi le cheval se prête-t-il si bien au développement personnel?
Cet animal a notamment la faculté de nous faire prendre conscience du langage corporel non verbal que nous dégageons et qui influence grandement la relation entre les êtres humains. Comment être vrai face à notre entourage, si on affiche un sourire artificiel, alors que notre corps dégage de la colère? En outre, le fait que le troupeau ait une structure hiérarchique déterminée peut être utilisé en team building. On peut en effet expérimenter face au cheval si on est un leader convaincant ou non.

Un outil thérapeutique tant sur le plan physique que mental

Team building
Des séminaires destinés aux entreprises proposent d’améliorer les performances des employés en ayant recours au cheval. Leader­ship, cohésion d’équipe, communication, gestion du stress sont les thématiques les plus couramment abordées. Plusieurs employés doivent par exemple réaliser un projet commun, en guidant ensemble un cheval en liberté du point A au point B. Chacun peut mettre en place sa stratégie et en mesurer les effets immédiatement. L’analyse de la manière dont l’équipe a géré la situation permet d’acquérir des outils utiles dans la vie professionnelle. Ces séances se déroulent à pied.

Thérapie avec le cheval
Cette thérapie est exercée par des personnes diplômées de l’Association suisse de thérapie avec le cheval (Astac). Elles ont toutes au préalable suivi une formation dans les domaines de la santé, du travail social ou de la psychologie. Le thérapeute travaille avec des personnes souffrant de déficiences diverses, qu’elles soient physiques, psychologiques, mentales, sensorielles ou sociales. Le patient travaille soit à pied, soit à cheval, selon le but thérapeutique recherché. Le cheval est utilisé comme un outil de communication entre le patient et le thérapeute.
www.therapiecheval.ch

Hippothérapie-K
L’hippothérapie-K consiste à pratiquer de la physiothérapie avec l’aide d’un cheval. L’objectif est d’agir sur le physique de patients souffrant de dysfonctionnements moteurs en utilisant le mouvement tridimensionnel du cheval. Sclérose en plaques, paraplégie et accident vasculaire cérébral font partie des indications les plus courantes. L’animal est guidé par une tierce personne, pendant que le thérapeute, qui a une formation en physiothérapie, accompagne son patient, en rectifiant
par exemple sa position.
www.hippotherapie-k.org

Zoothérapie
La zoothérapie est un terme générique qui fait référence à toutes sortes d’interventions assistées par l’animal. Elle peut être proposée par des professionnels issus de domaines différents – psychothérapie, physiothérapie, ergothérapie – qui utilisent l’animal en complément d’interventions conventionnelles. L’objectif est, suivant les cas, d’améliorer la santé mentale ou physique d’une personne, ou sa qualité de vie. Le zoothérapeute a recours à de nombreuses espèces animales différentes. Si le chien est couramment utilisé, le lapin ou le cheval peuvent également intervenir.
www.zootherapiesuisse.ch

Quelques adresses en Suisse romande

Développement personnel guidé, assisté ou facilité par le cheval, equicoaching, horse coaching: les termes varient suivant les praticiens. Plusieurs Romands se sont formés dans la région parisienne à Visionpure, selon une méthode développée par l’Américaine Linda Kohanov, pionnière en la matière. Comptez entre 100 et 150 francs en moyenne pour une séance de 90 minutes.

  • Equiter, Jacqueline Lux Gerber, Stéphanie Durif et Katalin Magnenat, Vaux-sur-Morges (VD), tél. 078 672 73 66, www.equiter.ch
  • Chevalparcoeur, Nicole Flückiger, Cerniat (FR), La Châtagne (NE) dès le 1er juillet, tél. 078 794 05 80, www.chevalparcoeur.ch