Coup de pouce
La Pinède, un domaine d’exception au cœur du bois de Finges

Toutes les trois semaines, nous partons à la découverte d’une exploitation agricole de Suisse romande proposant ses produits en vente directe, et présente sur notre plateforme de bonnes adresses.

La Pinède, un domaine d’exception au cœur du bois de Finges

Famille influente de Loèche (VS), les Zen Ruffinen ont fourni plusieurs générations de politiciens, médecins et notaires. Mais leur ancrage agricole a toujours été présent: le domaine de dix hectares niché au milieu de la forêt de Finges, la plus grande pinède de Suisse, appartient ainsi à la lignée depuis trois siècles. Et pour Yves, aujourd’hui la soixantaine à peine entamée, les étés au milieu des cultures, des chevaux et des vignes de Turrilji – le nom cadastral de la propriété, provenant d’une petite tour d’habitation construite ici en 1550 – étaient les meilleures vacances dont un gamin de la région puisse rêver.

Celui qui exploite de nos jours cet héritage familial est toutefois le premier Zen Ruffinen à s’être consacré pleinement à la terre. «Mon père avait mis des vaches allaitantes sur le domaine, et agrandi et réhabilité la vigne dont il vendait le raisin, précise-t-il. Après ma maturité, j’ai poursuivi avec un diplôme d’ingénieur-œnologue, transformé l’étable en cave et commencé l’exploitation en 1988 comme vigneron-encaveur.»

 

Un terroir à pinots

Aujourd’hui, le Domaine de la Pinède (le nom s’est imposé comme une évidence) compte deux hectares de vigne adossés à l’une des collines issues du glissement de terrain postglaciaire de Varone, ainsi qu’un hectare réparti en deux parcelles à Uvrier et à Loèche. L’essentiel de la production provient donc de ce terrain très calcaire et peu profond, idéal pour les pinots noirs, soit la moitié de l’encépagement. «Le reste, c’est un peu de chasselas et de gamaret, et surtout des spécialités rouges et blanches: muscat, johannisberg, arvine, syrah, cornalin et humagne, détaille Yves Zen Ruffinen. Je suis en production intégrée depuis le départ et ai arrêté les intrants de synthèse il y a six ans, y compris les herbicides pour mes rangs, enherbés jusque sous les ceps.»

Le climat, ici, est son allié: «On a la chance d’avoir un ensoleillement exceptionnel en été. La contrepartie, ce sont quatre semaines à l’ombre entre décembre et janvier!» Dans les cuves inox de sa cave bien équipée, le Valaisan embouteille 20000 flacons par an – sauf en 2021, où le mildiou a ici comme ailleurs prélevé sa dîme. Il avoue avoir toujours privilégié l’expression de la typicité des cépages et de la minéralité du terroir et n’élève que deux vins en barrique.

Jusqu’en 2020, Yves Zen Ruffinen gérait le domaine avec Véronique. Au décès de son épouse, la charge du foyer lui est revenue, en plus d’un boulot «à 120%», comme il le souligne. La table d’hôtes renommée du couple en a évidemment fait les frais. Pudique, il ne s’étend pas sur le sujet, notant néanmoins avoir un peu «levé le pied», aidé à la vigne par son employé et par la femme de celui-ci. Chaque été, il n’en déploie pas moins de grandes tables sous le noyer, se rendant disponible pour les visiteurs qui s’annoncent. «Ma clientèle est surtout privée, avec quelques restaurateurs que je livre directement.»  Créé par un patricien plus tenté par le tablier de vigneron que par la robe de magistrat, le Domaine de la Pinède s’est ainsi forgé une belle réputation en près de quatre décennies. Et contribue à la valorisation d’un coin de nature unique.

Retrouvez les producteurs de votre région sur notre plateforme des bonnes adresses.

Texte(s): Blaise Guignard
Photo(s): Sedrik Nemeth

Nectar issu d’une vigne âgée de 230 ans

En marge des 17 vins de son propre domaine, Yves Zen Ruffinen participe depuis 2004 à l’aventure «Vitis antiqua», lancée par les encaveurs de la commune de Loèche. «Au milieu du village, à côté d’une maison abritant aujourd’hui une galerie d’art, on a découvert une treille que l’on a pu identifier comme du cornalin planté en 1798, raconte-t-il. Nous en avons prélevé des bois que nous avons reproduits et avons planté ainsi au total 8000 m2 de vigne répartis chez cinq vignerons. On la travaille séparément, mais on la vendange ensemble. Le rendement est très modeste, de quelque 300 grammes par mètre carré! L’étiquette varie à chaque millésime et reprend une partie d’une œuvre exposée cette année-là à la galerie. Nous organiserons peut-être un événement sur tout ça en 2024.»