Reportage
Allier simplicité et écologie dans une villa, c’est possible

Une fois par mois, nous vous emmenons à la découverte de bâtiments exemplaires sur le plan énergétique. À Delémont, un couple a construit une habitation autonome en énergie avec des murs en chanvre.

Allier simplicité et écologie dans une villa, c’est possible

C’est une maison comme un enfant pourrait la dessiner, avec un toit à deux pans asymétriques. La simplicité des traits, voulue, est trompeuse. À Delémont, l’architecte Julie Hennemann a réalisé les croquis d’une villa intelligente, car autonome sur le plan énergétique. Avec son conjoint Adrien Theurillat, ingénieur en énergie, ils l’ont construite en grande partie eux-mêmes en 2021, à leur retour sur la terre ferme après un long périple en voilier. À l’intérieur, un filet tiré au-dessus du salon leur rappelle la nostalgie du tangage. En plus d’être une attraction prisée par leurs filles, il permet à la lumière diffusée par la façade de six mètres de haut, en triple vitrage, d’illuminer le séjour, la cuisine en enfilade et la salle à manger, à l’arrière de la bâtisse.

Des murs en chanvre
À l’étage, la mezzanine distribue trois chambres ainsi qu’une salle de bains. La maison, évolutive, s’adapte au nombre de ses habitants. Ils l’ont pensée de telle sorte qu’elle puisse se diviser en deux appartements. «Construire une villa individuelle n’est pas idéal du point de vue de l’environnement, reconnaît Adrien Theurillat. Nous avions l’occasion de bâtir un prototype applicable par la suite à plus grande échelle et avons fait en sorte de la rendre aussi écoresponsable que possible.»

Érigée sur une parcelle en pente de 576 mètres carrés, cette habitation de 120 mètres carrés est isolée en béton de chanvre – un matériau perspirant (soit perméable à la vapeur d’eau) qu’il a fallu bancher manuellement – recouvrir d’enduits intérieurs chaux-sable. Si la maçonnerie, la charpente et l’installation des fenêtres ont été confiées à des artisans locaux, le couple a tenu à réaliser l’isolation, le bardage, les sols et de nombreux travaux techniques et de second œuvre. «Le chanvre est un excellent isolant. Il offre surtout un confort hygrométrique et acoustique très pertinent, détaille Julie Hennemann. Le plus compliqué a été de trouver des artisans, comme Pascal Favre, afin de nous expliquer comment procéder.» Une fois le radier coulé, il leur a fallu huit mois pour terminer le chantier.

Eau de pluie recyclée
Des panneaux thermiques et photovoltaïques fournissent la totalité de l’énergie nécessaire au chauffage et au fonctionnement de l’électroménager. L’eau de pluie est stockée puis filtrée. Pour les chasses des WC, l’or bleu est doublement récupéré après être passé dans une première boucle par les lavabos et les douches. Le seul point d’eau potable provenant du réseau communal se trouve à la cuisine. «Nous avons installé une citerne de dix mètres cubes pour capter la pluie ruisselant sur le toit. Cela doit nous permettre de répondre à nos besoins pendant plus de trois mois sans précipitations. Un étang naturel créé devant la maison servira de réserve supplémentaire, note Adrien Theurillat. À terme, nous pourrions facilement installer un osmoseur sous l’évier de la cuisine afin de traiter l’eau de pluie pour la rendre potable et ainsi nous déconnecter du réseau communal.» Rationaliser et apprécier cette ressource est une évidence pour le couple, qui s’est réellement rendu compte de son importance lorsqu’il voyageait sur son voilier, l’utilisant alors au compte-gouttes.

Ne cherchez pas de domotique, il n’y en a pas. Seuls deux systèmes automatisés gèrent les stores du salon et l’ouverture d’une fenêtre de toit, si la saturation en CO2 ou la température sont trop élevées. «Nous avons bâti une maison comme on aurait pu la faire il y a plus de trente ans, selon nos goûts actuels», résume le jeune couple, dont la villa prouve que low-tech ne rime pas avec inconfort.

Texte(s): Céline Duruz
Photo(s): Matthieu Spohn

Les concepteurs

Architecte EPF, Julie Hennemann a bâti avec Adrien Theurillat leur maison familiale, en créant parallèlement une épicerie en vrac à Delémont. Ingénieur en énergie, son conjoint travaille au Centre jurassien d’enseignement et de formation. Tous deux ont choisi de construire avec des matériaux naturels et efficients. Ils ont sciemment utilisé des technologies à l’efficacité prouvée, comme un système solaire thermique.

En chiffres

Leur maison, c’est…

36 cm d’isolation (30 cm de chanvre et 6 cm de fibre de bois).

Moins de 2000 kWh de consommation électrique par an, quatre fois moins que la moyenne suisse.

120 francs par an de frais de chauffage, soit 1,5 stère cet hiver dans le poêle hydraulique.

12 m2 d’installation solaire thermique (autoconstruction avec l’association Sebasol) et 40 m2 de panneaux photovoltaïques.