En situation critique, Tox Info lutte pour sa survie et appelle à l'aide

Le centre antipoison, que l'on peut joindre au numéro 145, est en difficulté financière. Une pétition circule, demandant à la Confédération de prendre ses responsabilités. Médecins et contrôleurs de cueillette de champignons s'inquiètent.
10 août 2025 Milena Michoud
Si les champignons ne représentent qu'une petite part de l'expertise de Tox Info, les contrôleurs de cueillette voient d'un mauvais œil la possible clôture de la ligne 145.
© Adobe Stock
Si les champignons ne représentent qu'une petite part de l'expertise de Tox Info, les contrôleurs de cueillette voient d'un mauvais œil la possible clôture de la ligne 145.
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Cet automne, à l’heure de récolter les champignons, il sera toujours possible d’appeler le 145. Les cas d’intoxication seront gérés comme d’habitude.

L’an prochain, en revanche, le fonctionnement usuel n’est pas garanti. La cause? Le centre antipoison Tox Info a annoncé qu’il risquait de fermer ses portes à la fin de l’année.

43000 appels par an

Avec une moyenne de 600 à 800 cas par année répartis sur deux mois de cueillette, les champignons ne représentent qu’une part limitée de l’expertise de Tox Info. Le numéro d’urgence toxicologique reçoit en effet 43 000 appels par an. De l’avis de Damaris Ammann, sa directrice, la ligne sera coupée sans financement supplémentaire: «Je peux payer les salaires jusqu’à la fin de l’année, mais si aucune solution n’est trouvée d’ici là, nous devrons nous arrêter.»

En cause, un déficit qui se creuse depuis 2020. En février dernier, Tox Info avait d’ailleurs interpellé la ministre de la santé Élisabeth Baume-Schneider. Sa demande: la garantie d’un plan de financement durable et à long terme pour finir 2025. Depuis, une pétition lancée en juillet demande aussi une aide d’urgence de 1,1 million de francs – soit le montant du déficit – d’ici fin août.

Des difficultés connues

«Ce délai peut paraître court, mais nos difficultés sont connues des services de santé fédéraux depuis plusieurs années déjà», clarifie la directrice. Avant de contextualiser: «À la création du centre dans les années 1960, nous étions financés par PharmaSuisse et Scienceindustries. Peu après, ce plan s’est transformé en un partenariat entre organismes privés, cantons et Confédération. Mais depuis une dizaine d’années, les privés ne veulent plus investir dans un service d’utilité publique.»

D’autant que le mandat de Tox Info est inscrit dans la loi fédérale sur les produits chimiques: «À l’article 30, il est indiqué que le Conseil fédéral désigne un centre d’information toxicologique et pourvoit à l’indemnisation des tâches qui lui sont confiées. Selon nous, c’est donc de la responsabilité de la Confédération de trouver une solution.»

Pas de soutien supplémentaire en vue

Pour l’OFSP, la situation financière, tendue tant pour la Confédération que pour les cantons, écarte toute possibilité de soutien additionnel à court terme. Arguant qu’en 2024, les contributions de ces pouvoirs publics représentaient 65% des recettes de Tox Info, l’OFSP annonce aussi avoir augmenté sa participation ces dernières années, passant de 540 000 francs à 670 000 francs entre 2022 et 2025.

Tous s’accordent néanmoins sur un point: le service d’information sur les intoxications reste primordial. Car si 70% des appels proviennent de citoyens, notamment pour des enfants ayant ingurgité des médicaments ou des produits ménagers, un quart d’entre eux sont passés par des professionnels de la santé. «Face à un patient intoxiqué, les médecins ont besoin de réponses rapides, qu’en tant que centre de compétences en toxicologie aiguë nous sommes seuls à pouvoir apporter», dit Damaris Ammann.

Collaborations menacées

La collaboration entre experts est aussi menacée. «Pour les contrôleurs de champignons, la perte du centre serait un réel problème, indique Patrik Wuillemin, secrétaire de la Vapko, l’association suisse regroupant les organes officiels de contrôle. En cas d’intoxication, nous triangulons avec les médecins et Tox Info, chacun dans sa spécialité: les hôpitaux relaient les symptômes des patients aux contrôleurs, qui peuvent identifier le champignon en cause. Tox Info détermine ensuite le traitement à administrer.» Au sein de l’association, la pétition a été signée et relayée allègrement.

Fin août, une réunion est prévue entre le conseil de fondation de Tox Info et l’OFSP. Ce dernier se dit «convaincu de pouvoir présenter une proposition concrète et constructive dans les prochains mois». De son côté, la directrice craint que l’aide n’arrive trop tard: «Nous employons des médecins spécialisés, parlant quatre langues, se formant en cinq ans et payés comme des médecins assistants depuis des années. Ceux qui restent sont loyaux, car ils aiment ce qu’ils font, mais ils arrivent à la retraite et les prochains n’accepteront pas ces conditions. Je les comprends.»

+ D’infos toxinfo.ch

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