Des pics en toc: la montagne côté fac-similé
On voit bien qu’elles sont artificielles, et pourtant on veut y croire: du rocher moulé dans le ciment qui trône au centre d’un enclos de zoo au jouet en plastique de notre enfance en passant par un bunker alpin camouflé dans la rocaille, les montagnes factices sont partout.
Et c’est encore plus vrai dans le travail de la photographe lausannoise Delphine Burtin, qui a consacré un projet à ces représentations de l’emblème helvétique qu’est le sommet alpin.
Une valeur symbolique
«Nous autres Suisses avons un rapport identitaire fort à la montagne, note celle dont le travail, entrepris dans le cadre du festival neuchâtelois Alt+1000, a été exposé jusqu’à Tokyo. J’ai voulu créer un dialogue entre l’original, soit les vrais sommets qui nous entourent, et la manière dont on les reproduit.» Une approche logique pour une artiste qui aime brouiller les pistes entre réalité et illusion.
Au-delà de la dimension ludique de cet étonnant catalogue de sommets en toc, la Vaudoise pose des questions plus profondes sur ce qui rend ces reliefs si chers à notre cœur. «Si la montagne a une telle valeur symbolique, c’est qu’on la pense immuable. Or, est-ce vraiment le cas? Derrière cette apparente solidité, elle aussi est altérée par l’activité humaine.» Qu’elle soit de roche ou de plâtre, au fond, la montagne existe d’abord dans les yeux de celui qui la regarde.
+ d’infos Exposition visible jusqu’au 8 juin, Espace Graffenried, Aigle, espacegraffenried.ch
S’il y a bien un incontournable du paysage alpin helvétique, c’est l’abri militaire camouflé derrière de faux rochers.
Faire le tour d’une montagne en quelques minutes, c’est possible… en tout cas à Swissminiatur, ce parc ouvert en 1959 à Melide (TI).
La photographe place côte à côte des images réalisées en extérieur et des clichés de studio d’objets qui déclinent l’archétype de la montagne en format réduit.
La porte presque cachée d’un fort de la Seconde Guerre mondiale.
Chaque tentative d’imiter la montagne est limitée par des contraintes matérielles et techniques. Comme lorsqu’il s’agit d’un jouet pour enfant.
Pour donner naissance à cette série, Delphine Burtin a sillonné les zoos, dont les décors reposent largement sur l’imitation de la nature.
Adepte de la technique de la rephotographie, la Lausannoise imprime souvent ses clichés avant de les découper, de les plier puis de les photographier à nouveau.
La géométrie s'invite aussi bien dans les formes naturelles de la roche que dans celles, plus régulières, des interventions humaines.
La plus célèbre des montagnes suisses se décline à toutes les sauces, et jusqu'au sapin de Noël.
Un rocher artificiel trônant au cœur d'un giratoire.
Parfois, on ne voit pas la montagne mais on la reconnaît quand même.
Le travail photographique de Delphine Burtin confine parfois à l'abstraction. Pourtant, notre regard veut encore distinguer une chaîne de montagnes.
Le Grand Rocher du zoo de Vincennes (F), construit en 1934, mesure 5 mètres de haut. Doté d'un ascenseur interne, il a longtemps été la principale attraction du parc.
