Décryptage
Le virus fait tousser les propriétaires de chiens et de chats

Hospitalisés ou en isolement, certains maîtres ne peuvent plus s’occuper de leur compagnon à quatre pattes. Si beaucoup bénéficient du soutien de proches, d’autres restent sans solution. Pourtant, des aides existent.

Le virus fait tousser les propriétaires de chiens et de chats

«Mon mari a été hospitalisé fin octobre à cause du coronavirus et j’ai aussitôt dû me mettre en quarantaine. Nous nous sommes retrouvés du jour au lendemain dans l’incapacité de nous occuper de nos deux chiens», raconte Liliane Lenoir. Sans aide de son entourage, cette septuagénaire genevoise s’est tournée vers la Fondation ASA (Aide Senior Animaux) pour tenter de trouver une solution. La structure, qui soutient sur Vaud et Genève les personnes âgées dans la gestion de leurs animaux de compagnie, a ainsi permis à Liliane Lenoir de bénéficier pendant dix jours des services d’un bénévole pour promener ses deux compagnons.

Aide limitée dans le temps
Comme elle, certaines personnes touchées par la Covid-19 peuvent soudainement se retrouver dans l’impossibilité de prendre soin de leur chien, chat ou lapin. À l’instar de la fondation ASA – qui s’adresse pour sa part exclusivement aux seniors –, des solutions existent toutefois pour leur venir en aide. La Société vaudoise de protection des animaux (SVPA) propose ainsi de prendre en charge provisoirement dans son refuge lausannois les animaux dont les maîtres n’ont trouvé aucune solution. «Ce soutien existe en réalité depuis de nombreuses années, mais nous l’avons relancé ce printemps avec l’arrivée de la pandémie et avons déjà reçu quelques demandes», explique Stéphane Crausaz, de la communication de la SVPA. Si la structure lausannoise n’offre pas de pension à proprement parler, elle dispose de quelques places pour accueillir des animaux en situation d’urgence. «Il s’agit d’une aide limitée dans le temps, généralement de six semaines au maximum», rappelle Stéphane Crausaz. Lorsque le propriétaire ne peut pas amener lui-même l’animal, l’équipe du refuge s’arrange avec la famille, le concierge de l’immeuble, voire la police. La SVPA demande une participation pour l’entretien de l’animal, soit 20 francs par jour pour un chien et 10 francs pour un chat, mais précise toutefois être ouverte à la discussion et évaluer les situations au cas par cas. «L’aspect financier ne doit dissuader personne de demander de l’aide. Notre priorité demeure la prise en charge de l’animal», insiste Stéphane Crausaz.

Soutien étatique
En Suisse romande, cette solution est proposée par plusieurs sociétés de protection des animaux. C’est le cas notamment dans le Jura bernois, à Neuchâtel et en Valais. «Nos revenus cette année ont fortement baissé, du fait que les adoptions sont rares et que notre pension de vacances est très peu sollicitée», explique de son côté Biliana Perruchoud, présidente de la SPA valaisanne. «Notre aide est donc a priori payante, mais nous sommes aussi prêts à faire un geste pour soulager les propriétaires en difficulté.» A Neuchâtel, le Service de la consommation et des affaires vétérinaires proposait ce printemps de prendre en charge les animaux des personnes malades pour les transporter dans une pension ou un refuge. Une mesure qui n’est toutefois plus en vigueur cet automne. «Aujourd’hui, les gestes barrière sont clairs et tout le monde porte un masque», explique Corinne Bourquin, vétérinaire cantonale adjointe. À Fribourg, le Service des affaires vétérinaires (SAV) n’a pas instauré de dispositif particulier, mais délivre des conseils et adresses en cas de besoin. «Nous recevons de nombreux appels et dirigeons les gens vers des associations de bénévoles ou, le cas échéant, auprès de la SPA. La hotline Covid du canton peut également renseigner les maîtres sur certaines questions liées à leur animal de compagnie», précise Gilles D’Andrès, chargé de communication au SAV.

Pet-sitters peu sollicités
Installée à Échandens (VD), la société Pattes de velours est spécialisée depuis seize ans dans la garde à domicile de chiens, chats, rongeurs, reptiles ou poissons. Si sa directrice, Nelly Lorenzo, dit avoir reçu quelques demandes depuis le début de la pandémie, la plupart des gens ont finalement renoncé à cette solution payante. «Les propriétaires sont prêts à débourser une certaine somme pour placer leur animal pendant leurs vacances, mais peu sont d’accord de le faire lors d’une hospitalisation», s’étonne-t-elle. À Lentigny, dans le canton de Fribourg, Annie Blatti Bersier, qui gère la pension pour chats La Gouttière, dit également n’avoir assuré aucune prise en charge liée à la situation sanitaire actuelle. Un constat partagé par de nombreux professionnels du secteur. Ceux-ci l’expliquent en partie par une plus grande disponibilité de l’entourage rendue possible par la généralisation du télétravail et par la diminution des voyages à l’étranger en cette année de pandémie. Famille, amis et voisins semblent donc être les premiers à venir en aide aux propriétaires en difficulté. La prise en charge d’un animal dont le maître est infecté par le virus pose toutefois la question du respect des mesures d’hygiène en vigueur. «Nous avons effectivement dû revoir notre organisation avec nos bénévoles», explique Gilles Altwegg, vétérinaire et président de la Fondation ASA. «Pour limiter au maximum les contacts, un chien n’est désormais attribué qu’à un seul promeneur, qui reste le même pendant toute la durée de l’intervention. La passation du chien lors des balades a lieu sur le pas de la porte, en respectant les mesures sanitaires, et les contacts physiques avec l’animal doivent être évités.» Une prise en charge réduite à l’essentiel, donc, mais qui ne dure généralement qu’un temps, jusqu’à ce que maître et chien puissent renouer avec leur quotidien.

Texte(s): Aurélie Jaquet
Photo(s): DR

Questions à...

Virginie Masserey, cheffe de la section contrôle de l’infection à l’Office fédéral de la santé publique (OFSP)

Les animaux de compagnie peuvent-ils être des vecteurs de transmission du virus?
Il n’existe pour l’heure aucune donnée probante qui permette de l’affirmer. Un animal peut être diagnostiqué positif à la Covid-19 lorsqu’il est au contact d’une personne infectée, mais rien ne prouve qu’il puisse transmettre le virus. Toutefois, les poils des chiens et des chats, de même que leur collier peuvent être contaminés par des postillons ou des gouttelettes respiratoires, au même titre que n’importe quelle autre surface.

Quelles sont les mesures à observer si l’on doit s’occuper de l’animal d’un malade?
S’il s’agit d’une promenade, la transmission du chien doit se faire sur le pas de la porte, en portant un masque et en gardant la distance réglementaire. Le promeneur utilisera de préférence sa propre laisse. Lorsqu’on nourrit un chat dont le maître est hospitalisé, on peut ouvrir les fenêtres pour aérer la pièce, bien que le virus ne survive pas longtemps dans un appartement en l’absence du malade. Il faut en revanche éviter de se laisser lécher et de caresser un animal qui a vécu avec une personne infectée. Et bien sûr se laver les mains sitôt après avoir quitté les lieux.