Oliverons associés: dans notre pays, la culture d'olives sera collective
Agriculteurs, viticulteurs, pépiniéristes… et même un sommelier en huile d’olive. Ils étaient près d’une trentaine, réunis jeudi à Luins (VD), dans un caveau aménagé en salle de réception chez le vigneron Fabien Sordet. La raison? Tous participaient à mettre sur pied la première faîtière suisse de producteurs d’olives.
«En Suisse romande, on recense déjà 32 domaines qui ont planté ou vont planter des oliviers d’ici à cet hiver, entame Frank Siffert en guise d’introduction à cette assemblée constitutive. Cela pèsera son poids dans nos échanges avec les cantons et la Confédération.» À l’origine de plusieurs associations truffières depuis quinze ans, l’homme aux multiples casquettes fait désormais profiter les oliviers de ses connaissances. Jeudi, il est officiellement devenu le président de cette nouvelle venue du monde associatif.
Outil de diversification
«Pour l’instant, nous l’avons nommée ASPO, pour Association suisse des producteurs d’olives, mais nous pourrons en discuter aujourd’hui», enchaîne-t-il d’ailleurs. Un bref tour de table plus tard, le nom est accepté. L’assemblée du jour est aussi l’occasion de rappeler les statuts – «ils sont vastes, l’association a pour but d’être liée à tout ce qui touche à l’olive en Suisse» –, d’élire un comité, et de mettre sur pied une commission technique. Celle-ci sera chargée de développer des formations et d’établir des fiches techniques concernant la plantation, la taille ou les inscriptions des arbres sur les fiches d’exploitation pour les professionnels.
«Ça me fait tout drôle: nous avons commencé ce printemps avec trois ou quatre producteurs dans le Chablais, et nous sommes aujourd’hui une cinquantaine», relève Urbain Girod, désormais vice-président de l’ASPO. Pépiniériste à Yvorne, il regrettait que chacun tâtonne dans son coin et a fait appel à Frank Siffert pour réunir les divers acteurs du milieu. «Je rêve de ça depuis vingt ans», confie celui qui plante, multiplie et s’apprête à vendre 13 000 arbres cet automne face à une demande grandissante.
Tests de variétés
C’est aux Pépinières Girod qu’ont fait appel trois producteurs de Roche (VD) pour se procurer 4000 oliviers, qu’ils planteront l’an prochain. «Dans le vignoble, certains parlent d’arracher des vignes pour y placer d’autres arbres», note l’un d’eux, le viticulteur Adrien Gosteli. Frank Siffert en est convaincu, la culture de l’olivier se profile comme une forme de diversification face aux difficultés actuelles de la vigne.
Et la polyvalence ne s’arrête pas là. «Ces arbres donnent des produits de bouche, qui peuvent aussi être transformés. On pense d’abord à l’huile, mais les façons de valoriser l’olive sont nombreuses: on peut faire du whisky avec ses tourteaux, des cosmétiques et savons en deuxième ou troisième pressée, énumère le président. Et celui qui en a marre au bout de quinze ans peut transplanter son olivier et le vendre en pot pour un prix plus élevé!»
En quête de soutiens
Habitante de Bex (VD), Anne Bielman n’est pas agricultrice, mais détient un terrain d’une centaine d’oliviers. À cet égard, elle est aussi la bienvenue en tant que membre. Prochainement, Frank Siffert s’appuiera d’ailleurs sur les privés comme elle pour un projet d’envergure, coordonné par le FiBL. «Nous nous adresserons à tous les détenteurs d’oliviers en pleine terre, non emballés en hiver et plantés avant 2012, précise le président. L’hiver de cette année-là ayant été froid, les essences qui y ont survécu sont particulièrement costaudes.»
Envoyés pour analyse à l’institut national de la recherche agronomique (INRAE) en France, des échantillons de ces arbres permettront de «créer une cartographie et d’éventuellement les bouturer pour démarrer avec des oliviers bien robustes». Pour le comité, la prochaine étape relèvera de la recherche de soutiens financiers. Deux rendez-vous sont aussi pris: une visite au Tessin – canton qui compte quelques moulins à olives et plusieurs associations – en novembre et la prochaine assemblée en février. Pour l’heure, lorsqu’on quitte Luins, c’est à une dégustation d’huiles d’olive que sont occupés les nouveaux oliverons.
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