Installées sur un radeau connecté, les sternes crèvent l'écran

Tout au long de l'année, l'artiste genevois Pierre Baumgart nous invite à ouvrir l'œil sur la faune et la flore qui nous entourent, en partageant ses aventures naturalistes en Suisse romande.
13 juillet 2025 Pierre Baumgart
Du côté de Genève, on peut observer les sternes pierregarins depuis son bureau.
© Pierre Baumgart
Du côté de Genève, on peut observer les sternes pierregarins depuis son bureau.
© Pierre Baumgart

Après avoir passé l’hiver dans le golfe de Guinée, elles étaient de retour dès les premiers jours du mois d’avril, au bord du Léman, à Vésenaz (GE). Vagabondes durant quelques semaines, les sternes pierregarins ont investi une plateforme artificielle aménagée à leur intention, dans la réserve de la Pointe-à-la-Bise.

La régulation du niveau des eaux des lacs et les corrections de nos cours d’eau ont modifié profondément la dynamique naturelle des berges et des rives faisant disparaître les bancs de galets sur lesquels les sternes pierregarins avaient l’habitude de s’établir en petites colonies.

Plusieurs plateformes

Au début du XXe siècle, l’élégant laridé nichait encore sur une trentaine de sites naturels qui ont disparu les uns après les autres dans les années 1940. La pose de radeaux et la création de nouvelles îles de gravier dans différents points du pays ont permis de conserver l’espèce qui ne se reproduit plus que sur ces sites artificiels ou presque.

Trois radeaux tapissés de gravier ont été installés sur le lac de retenue du barrage de Verbois, à Genève, dès la fin des années 1970. Un autre radeau a vu le jour en 2009 dans la réserve Pro Natura de la Pointe-à-la-Bise qui a permis aux sternes de nicher jusqu’en 2012, avant qu’un couple de goélands leucophées ne s’y installe et empêche la colonisation du radeau par les sternes.

2024, annus horribilis

En 2024, à la suite d’un malheureux concours de circonstances, plusieurs sites de nidification autour du Léman ont subi les préjudices d’inondations et de prédations. Les sternes pierregarins désœuvrées ont repris alors possession du radeau de la réserve, attirant au passage un couple de mouettes rieuses qui s’est reproduit avec succès pour la première fois dans le canton!

Forte de cette réussite, l’association a pris la décision d’aménager au printemps 2025 une seconde plateforme pour renforcer cette dynamique. Une caméra reliée à un écran de contrôle a été installée sur le site afin d’observer minutieusement la nidification des sternes et permettre d’entreprendre une campagne de sensibilisation.

Virtuel, mais exceptionnel

J’ai pu entrer dans l’intimité de la petite colonie en l’observant sur l’écran d’un ordinateur connecté à la caméra. Une manière bien étrange et quelque peu virtuelle de contempler la nature, mais l’occasion unique de pouvoir assister à un spectacle si proche sans nullement déranger.

Parmi la quarantaine de couples présents sur le radeau, tous ne sont pas au même stade de leur nidification. Alors que des adultes paradent encore les ailes baissées, le cou tendu et la queue relevée en choisissant un canton pour s’installer, certaines femelles sont rivées sur leur ponte et d’autres ont déjà vu éclore des poussins.

Dans la dernière décade du mois de juillet les jeunes pourront voler et accompagneront les adultes à la pêche de petits poissons capturés à la surface de l’eau en plongeant. Ils suivront les parents qui s’éloigneront peu à peu du site de nidification et réclameront encore de la nourriture jusqu’au mois d’août, au moment où la migration débutera et où ils partiront rejoindre pour la première fois l’Afrique équatoriale.

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