Reportage
Kakis, kiwis et bien des fruits prospèrent à Romont

Depuis vingt ans, Nicolas Maternini cultive des espèces méditerranéennes et exotiques à Romont (FR). Ses variétés rustiques résistent, quelle que soit la saison, et cette année, les récoltes sont abondantes.

Kakis, kiwis et bien des fruits prospèrent à Romont

En cet automne ensoleillé, la rangée de cyprès devant la façade des Maternini donne à la rue un air de Toscane.
À côté, les branches d’un majestueux plaqueminier croulent sous le poids de dizaines de kakis de la variété juteuse tipo,
la plus répandue en Italie. «Avec cette chaleur, ils sont en avance. Je vais les cueillir prochainement puis les stocker à la cave avec des pommes, pour qu’ils continuent à mûrir tranquillement», raconte l’heureux propriétaire des lieux, tout en nous tendant un raisin de la vigne qui orne le porche. «Goûtez aussi l’une des dernières figues de la saison. On a eu deux récoltes particulièrement abondantes cette année, avec des centaines de fruits. C’était incroyable! Quant aux kiwis que vous voyez là, nous pourrons bientôt les déguster», glisse en souriant Nicolas Maternini, qui a fait du domaine familial de Romont (FR) un paradis d’espèces méditerranéennes et tropicales.

Un air de vacances
Sur la colline de la cité fribourgeoise, perchée à plus de 700 mètres d’altitude, la parcelle composée de trois terrasses en pente bénéficie d’un microclimat. «Déjà à l’époque de mes arrière-grands-parents tessinois, il y avait des abricotiers et des pêchers, ainsi qu’un potager. Cela m’a marqué.» À 12 ans, le jeune garçon à la main verte décide de reprendre le flambeau et de tester ses premières plantations en pot. «Je consultais de vieux guides de jardinage qui traînaient chez moi, mais les ratés étaient fréquents», rigole-t-il. L’arrivée d’internet facilite les choses et l’adolescent se passionne pour les plantes exotiques en écumant les sites anglophones. Ses végétaux préférés étaient les palmiers et les bananiers. «Pour moi, cela représentait le Sud, les grandes vacances, le ciel bleu et le chant des hirondelles. C’est toujours le cas aujourd’hui», confie-t-il. Vingt ans plus tard, le jardin avec vue sur le Moléson est à l’image de son propriétaire: joyeux, épanoui et soigné.

Fougères, bananiers et lauriers
Tout au fond de la première terrasse, à côté de l’ancien abri pour les poules et les cochons, une zone tropicale et humide a été créée. «C’est l’endroit parfait, car il est ombragé et protégé de la bise», dit Nicolas Maternini. Trois fougères arborescentes d’Australie, ou Dicksonia antarctica, s’y épanouissent, croissant d’un centimètre par année et pouvant résister à des températures allant jusqu’à -10°C. «Je choisis principalement des variétés exotiques rustiques qui n’ont pas ou peu besoin d’être protégées durant l’hiver», explique le spécialiste. Celles-ci sont tout de même arrosées à l’aide d’un petit tuyau automatique qui fonctionne de nuit, afin d’éviter l’évaporation durant la journée. Au sol, une mousse molletonnée rappelle les sous-bois. Il s’agit de Sagina subulata, une vivace tapissante très agréable au toucher. Plus haut, un immense bananier poussant de quatre à cinq mètres par an sera prochainement taillé. «Durant la saison froide, le jardin est un peu moins joli, mais il y a quand même plein de choses à voir!» lance le Fribourgeois en continuant la visite.

 

Proches de la maison, un yucca rostrata au tronc épais, un magnolia à grandes fleurs, un olivier et une passiflore aux fruits orange trônent fièrement. Plus bas, on trouve un lilas des Indes, un gingembre ornemental «pour le côté luxuriant», des hortensias bleus et un imposant arbre de Judée «rappelant les collines fleuries de Rome à la belle saison». Sans compter trois lauriers en pleine terre, dont la variété rose, Atlas, est particulièrement robuste. Quant aux herbes aromatiques provençales, elles sont nombreuses puisque plusieurs types de lavandes et de thyms poussent contre les murets de la parcelle. Au sol, des ardoises noires ont été déposées pour capter la chaleur. «Cet été, il a fait près de 45°C ici», informe le quadragénaire en consultant le thermomètre accroché à la pierre.

Tester des agrumes rares
Il fait encore plus chaud à l’extrémité de la deuxième terrasse. «Nous sommes dans la zone la plus exposée. C’est d’ailleurs ici que la neige fond en premier au sortir de l’hiver», souligne Nicolas Maternini. Notre hôte a choisi d’y mettre les spécimens méditerranéens les plus fragiles. Parmi ceux-ci, des agrumes comme le yuzu, le citrus ichangensis, la mandarine changsha et le citrangequat thomasville, achetés dans des pépinières spécialisées, notamment au Tessin, et joliment étiquetés. «Je suis toujours en phase de test, glisse-t-il prudemment. Je devrais en bâcher certains.» On y admire aussi un asiminier trilobé planté depuis plus de quinze ans, qui donne des fruits nommés pawpaw au goût
banane-mangue. «J’ai pu en récolter au moins 150 ces derniers mois, c’était fou!»

Si les périodes de gel intense pourraient être fatales pour ses petites protégées, le réchauffement climatique est, actuellement, un allié. «Cet été, la plupart de mes plantes se sont bien portées sans arrosage malgré la sécheresse record. De tout temps, nos ancêtres ont acclimaté de nouvelles espèces venues d’ailleurs. C’est mon tour aujourd’hui», déclare-t-il fièrement. Ces prochaines semaines, l’heure sera au ramassage des feuilles, en attendant le retour des beaux jours, des fleurs multicolores et des fruits juteux.

Texte(s): Lila Erard
Photo(s): Mathieu Rod

Le jardinier

Nicolas Maternini est avocat dans les domaines de l’aménagement du territoire et du droit immobilier, au sein d’une étude installée à Lausanne et à Fribourg. Le week-end, le quadragénaire prend soin de son jardin à Romont (FR), où sa famille d’origine tessinoise est établie depuis cinq générations. «Ici, je me ressource. Cette activité m’apaise et me permet de m’évader», raconte le Fribourgeois. Tout comme son deuxième hobby: la généalogie et la recherche de l’histoire de ses ancêtres.

En chiffres

  • 1 terrain en pente avec 3 terrasses.
  • 730 mètres, l’altitude de sa parcelle.
  • 30 espèces de plantes exotiques.
  • 5 espèces d’agrumes.
  • 5 fruitiers méditerranéens.
  • 1 potager dans son jardin.
  • 20 ans de travail.