Valoriser les bienfaits du travail à la ferme grâce à l'agriculture sociale

Cette approche désigne l'ensemble des prestations sociales, éducatives ou thérapeutiques fournies dans le cadre d'une exploitation agricole, en s'appuyant sur les ressources du domaine et de la nature pour accompagner des personnes vulnérables ou en difficulté. BioVaud s'est engagé à soutenir cette activité qui concilie respect de l'environnement, soins et valorisation du rôle social de la branche.
1 juillet 2025 Publireportage
© Sigfredo Haro
© Sigfredo Haro

Pour comprendre le potentiel du carefarming, une visite de la ferme du Martalet, située à Démoret non loin d’Yverdon-les-Bains (VD), s’avère une étape incontournable. L’exploitation est devenue au fil du temps un lieu d’expérimentation unique en Suisse romande sous l’impulsion du maître des lieux, Jean-Marc Bovay, agriculteur de formation, à la fibre sociale très prononcée.

En tant que structure d’accueil, elle a compté, à son apogée, jusqu’à sept éducateurs et accueilli des dizaines de jeunes en difficulté. En parallèle, Jean-Marc Bovay a toujours exploité le domaine familial qui compte 26 hectares de cultures bios et un élevage de chevaux pour les compétitions de saut.

Créer un terreau fertile

«Sur le plan pédagogique, on peut dire que cette exploitation a été pionnière, car c’est une des premières fermes pédagogiques qui est en même temps une ferme de production, explique Cyril Maillefer, directeur de la coopérative L’autre temps, qui a développé un programme d’insertion autour des arbres fruitiers, en collaboration avec Jean-Marc Bovay. Le fait que l’accueil se fasse dans une entreprise, et non en institution, lui donne une valeur supplémentaire.»

«La ferme est un outil extraordinaire, car on y pratique toutes sortes de métiers. On touche à tout et les jeunes peuvent expérimenter diverses activités, allant de l’horticulture au bâtiment en passant par la mécanique, l’élevage ou encore la vente directe. On peut même apprendre à compter en distribuant les graines aux poules», image Jean-Marc Bovay.

Comparaisons avec le monde végétal

Pour décrire l’agriculture sociale, le Vaudois a volontiers recours à une analogie avec le monde végétal: «On prend soin des gens comme on prend soin des plantes. En fait, on n’a pas la prétention de faire grand-chose. On crée un terreau fertile en donnant aux personnes un endroit où s’implanter. On veille à ce que tout se passe bien autour d’elles, mais ce sont elles qui doivent prendre racine et grandir.»

L’agriculteur, qui a fait une formation d’éducateur social, l’a constaté sur les dizaines d’enfants en rupture qu’il a accueillis chez lui: la clé réside bien souvent dans la construction du sentiment de responsabilité. «Si on donne une responsabilité à un enfant, par exemple nourrir un animal, on le sensibilise à la problématique du bien-être animal. Et se sentir responsable, c’est le meilleur moyen de reconstruire l’estime de soi.»

Professionnaliser le secteur

La jeune association Agriculture sociale romande a rapidement rejoint Carefarming Suisse, une organisation qui vise à mettre les acteurs de l’agriculture sociale en réseau. Elle en est devenue la section romande et participe à la création de Green care, une association faîtière qui vise à développer le secteur en le professionnalisant et en lui donnant une meilleure reconnaissance. Dans ce cadre, elle collabore aussi à la mise en place d’une certification et d’un système de formation adapté aux agriculteurs. Une autre question est à l’ordre du jour: constatant que la plupart des personnes faisant de l’accueil à la ferme sont mal rétribuées par rapport aux coûts qu’elles doivent assumer, il est urgent pour Jean-Marc Bovay «d’imposer des standards dans ce domaine».

Mieux préparer les agriculteurs

Le carefarming est très développé en Norvège, aux Pays-Bas, en Belgique notamment. En Suisse, on constate aussi un essor de cette pratique. Selon un recensement de l’Office fédéral de la statistique, il y a dans notre pays 1100 fermes qui fournissent des prestations sociales rémunérées. Mais ces initiatives restent isolées et non coordonnées.

C’est ce qui a poussé Jean-Marc Bovay à créer en 2021, avec le soutien de BioVaud, l’association Agriculture sociale romande. «Je me suis rendu compte qu’il fallait qu’on structure le secteur et qu’on prépare mieux les agriculteurs. Je me suis naturellement tourné vers BioVaud, car j’ai toujours su qu’ils avaient la sensibilité pour ce genre de projet social.»

Un projet de société

Derrière l’engagement de BioVaud, rendu possible par le soutien du Canton de Vaud, il y a une sensibilité sociale, mais aussi l’idée d’en faire un projet de société puisque le carefarming permet de valoriser l’agriculture en montrant qu’une ferme peut avoir beaucoup plus d’implication dans la vie de la société que de nourrir la population.

Le carefarming permet par exemple de tisser des ponts entre la société et le monde rural, puisque les gens qui rencontrent des difficultés se trouvent souvent dans les villes. Il permet de redynamiser un village en créant des postes de travail, ce qui attire des gens à la campagne et réduit d’autant la pression sur les flux de trafic.

Se sentir responsable, c’est le meilleur moyen de reconstruire l’estime de soi.

L’accueil à la ferme rapporte également des revenus financiers dans les familles, une aubaine pour elles, car la vente de la production agricole ne suffit souvent pas à générer un revenu suffisant. «Et ces revenus sont valorisants pour le secteur, car ils ne viennent pas des paiements directs mais de prestations sociales ou de santé. Cela signifie qu’on peut sortir de cette logique des paiements directs dont on dépend et se faire rétribuer par le social et la santé pour des prestations sociales», se réjouit Jean-Marc Bovay.

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