Nourrissante, sucrée et facile à cultiver: la patate douce est là pour rester
En bordure de forêt, Hector Silva s’approche d’une parcelle recouverte d’un tapis de feuillage compact. Il se baisse, examine la culture, puis tire vers lui une longue tige herbacée aux nombreuses ramifications, jusqu’à dévoiler le sol nu à ses pieds. Il sait désormais où bêcher pour découvrir le trésor nourrissant et sucré enfoui sous sa terre.
Après quelques coups de fourche, il révèle un gigantesque tubercule: une patate douce de plus de 2 kg. À Denens (VD), le maraîcher en produit depuis une dizaine d’années, jusqu’à 3 tonnes par an si les conditions sont favorables.
Des besoins à respecter
Originaire d’Amérique du Sud, la patate douce était déjà cultivée il y a plus de 5000 ans et a été diffusée vers l’Asie et l’Europe à partir du XVIe siècle. Il en existe aujourd’hui des milliers de variétés, à chair orange, blanche, jaune ou violette. Riche en bêtacarotène, fibres, antioxydants et potassium, elle contribue à la santé oculaire, intestinale et métabolique.
La culture de la patate douce est aisée, à condition de bien préparer la terre, de respecter les besoins de la plante. «Ce n’est pas toujours évident. Elle peut se sentir à l’aise dans des climats extrêmes, comme en Amérique du Sud, où elle pousse à 3000 m d’altitude, mais ne pas être adaptée à nos régions. Il faut trouver la bonne variété», dit Hector Silva.
Bien préparer les plantations
L’agriculteur commence par préparer des plates-bandes une dizaine de jours avant les premières plantations. «En agriculture bio, c’est nécessaire. On cherche à avoir une première levée de mauvaises herbes, puis on prépare de nouveau la terre pour qu’elle soit bien légère et aérée, en ajoutant parfois de l’engrais», explique-t-il.
Il façonne ensuite des buttes de 30 à 40 cm de haut, sur lesquelles il tend un plastique biodégradable, afin d’éviter que les racines n’aillent trop en profondeur, de bloquer les adventices et de préserver l’humidité du sol. Le tubercule étant très gourmand en eau, l’irrigation des champs est une nécessité.
Le producteur
Péruvien d’origine, Hector Silva arrive en 1989 en Suisse à l’âge de 25 ans. Pionnier dans le bio, il cultive d’abord un petit jardin familial avant de développer des marchés à Morges et à Lausanne. «J’aime ma liberté et mon indépendance, travailler à l’extérieur et être connecté à la Pachamama (ndlr: la Terre Mère). Posséder des terres, c’est le plus beau cadeau qu’on puisse avoir: on nourrit la planète.»
Elle pousse à l’eau
Vers la mi-mai, Hector Silva plante des légumes germés tous les 50 cm à 1 m. Plus ils ont de l’espace, plus ils deviendront gros. Un sarclage et un désherbage plus tard, la plante commence à s’étaler. Ses tiges aux airs de liane ou de lierre, de plus de 2 m de longueur, forment une couverture dense sur le sol qui étouffe la mauvaise herbe.
Sous terre, la patate douce développe des racines en quatre ou cinq semaines. «On est complètement tributaires du temps. Elle pousse à l’eau. Si on attend un peu trop, on a des spécimens de 2 kg, et s’il y a de la sécheresse, comme l’année passée, elles seront minuscules», souligne l’agriculteur.
Récolte après 5 semaines
La récolte a lieu dès la cinquième semaine de pousse, à partir de mi-septembre, et se fait à la main, car la peau du légume est fine et délicate. Le producteur doit régulièrement surveiller la croissance et l’état général des tubercules, dont les souris et les taupes sont friandes. Stockés avec leur terre en chambre froide à 5°C, il leur faudra quelques semaines pour acquérir leur douceur caractéristique au palais. Ils pourront ensuite être vendus petit à petit, selon la demande, jusqu’en février ou mars.
Au Domaine de Fermens, à Denens, Hector Silva produit toute l’année près d’une septantaine de légumes rares et de variétés anciennes, tels que poivrons, aubergines, concombres, tomates, melons, pastèques, salades, légumes racines, pommes de terre, tous les choux (kale, chinois, frisé, de Bruxelles), petits pois, haricots, fèves, courges (plus de quatorze sortes), roquettes, cresson, cerfeuils et mesclun (toute l’année).
+ D’infos La production est disponible aux marchés de Lausanne (mercredi et samedi), de Morges (mercredi et samedi) et de la ferme (mardi, mercredi, vendredi et samedi), ou encore en ligne sur bio.fermens.ch

