Des collines de Chine aux reliefs suisses, la marche pour fil rouge
Lorsqu’on retrouve Xiaoxia Hao, elle se désole d’avoir oublié sa veste aux couleurs de Vaud Rando, celle qu’elle porte toujours lorsqu’elle guide des balades aux quatre coins du pays. Mais dès qu’elle se met à nous raconter son expérience au sein de l’association, on n’a aucune peine à l’imaginer sur les sentiers.
Avant d’arriver à Lausanne, Xiaoxia Hao a pris goût à la marche aux côtés d’un groupe d’étudiants de Hangzhou, dans le sud-est de la Chine, où elle a commencé ses études. Les reliefs y sont vallonnés et les chemins soigneusement entretenus par les cultivateurs de thé. En Suisse, la jeune femme voit dans cette activité le moyen rêvé de perfectionner son français, de se faire des amis et de découvrir le pays.
La plus jeune du groupe
En 2011, c’est en tant qu’étudiante que Xiaoxia Hao arrive sur les rives du Léman, à l’UNIL. Après un Master en philosophie française obtenu en Chine, elle souhaite en effet s’installer dans un pays francophone pour poursuivre son parcours académique. Pendant quelques années, elle perfectionne son français en vue d’obtenir un diplôme de Français Langue Étrangère. Puis elle entame un projet de thèse portant sur la réception en Chine du penseur d’origine lausannoise Benjamin Constant. En parallèle, son mari trouve lui aussi un poste de doctorant à l’Université de Genève.
Curieuse et sociable, l’étudiante commence en 2014 à participer aux randonnées organisées par Vaud Rando, la branche cantonale de l’association promouvant la randonnée pédestre à l’échelle suisse. Elle est généralement la plus jeune du groupe, mais se fait progressivement des amis. «L’ambiance est très agréable, raconte-t-elle. Les gens sont sympas et accueillants, beaucoup de personnes sont à la retraite et prennent le temps de discuter. Une dame m’a par exemple appris le nom d’une grande quantité de plantes sauvages en marchant, ainsi que bon nombre de chansons!»
Dans le grand bain
Peu à peu, la marcheuse prend ses marques au sein de Vaud Rando. Elle commence alors à prêter main-forte à Marius Wunderlin, décédé au mois de mai 2025, en tant que cheffe adjointe sur certaines courses. Sa première sortie dans ce cadre? «Le pont des Anabaptistes, dans le Parc naturel régional Chasseral», se souvient-elle. Après plusieurs autres sorties en binôme, son mentor encourage Xiaoxia Hao à se former: l’association cantonale a besoin de jeunes chefs et cheffes de courses afin de relayer les plus âgés.
En 2018, la marcheuse suit les deux modules de trois jours du cours de formation pour devenir monitrice ESA, programme de la Confédération en faveur du sport des adultes, en randonnée. Si elle dispose déjà d’une certaine expérience, elle acquiert dans ce contexte de nouvelles connaissances en lecture de cartes, en météorologie ou en technique de conduite de groupe. C’est au Belchenflue (BL) que la nouvelle cheffe de course guide seule un groupe pour la première fois. Xiaoxia Hao raconte, non sans une pointe de fierté: «Une marcheuse était étonnée qu’une étrangère se mette à guider des randonnées. Elle m’a dit qu’elle ne serait pas capable de faire cela en Chine… ni même en Suisse! Je crois qu’elle était un peu admirative.»
Son univers
Un plat
«La tarte à la rhubarbe. J’ai découvert la rhubarbe en Suisse, c’est délicieux!»
Une saison
«L’automne. Il ne fait pas trop chaud, pas trop froid… Sans hésiter, la meilleure saison pour la randonnée.»
Un lieu
«La forêt de Sauvabelin. J’y vais régulièrement pour courir le matin.»
Un livre
«Les Misérables», de Victor Hugo. Je l’ai lu en chinois quand j’étais plus jeune. Cette histoire m’a marquée.»
Découverte et partage
Depuis, Xiaoxia Hao a proposé plusieurs sorties à ses homologues cheffes et chefs de course, lors des séances de la commission qui élabore le programme de l’année. Généralement, elle choisit des itinéraires au fil de l’eau. «J’aime beaucoup les cascades, les lacs, les bisses ou les gorges. L’une des sorties que j’ai encadrées traversait celles de Taubenloch, près de Bienne. Le nom de cet endroit fait référence à une légende classique que l’on raconte aussi en Chine.»
C’est en discutant au gré des randonnées que j’ai appris à connaître les plantes locales… Et beaucoup de chansons!
Sur les chemins, Xiaoxia Hao découvre mille facettes de son pays d’adoption. Les excursions sont notamment une occasion de s’initier à la cueillette de plantes locales. «J’ai découvert l’ail des ours, qui ressemble beaucoup à l’une des variétés de ciboulette chinoise. J’en garnis les raviolis que mon mari et moi préparons à la maison. C’est génial d’adapter cette recette traditionnelle avec des ingrédients qui poussent ici.»
Toujours active
Lorsqu’elle est en ville, Xiaoxia Hao n’en demeure pas moins active: «Je vais me promener au bord du lac Léman ou à Sauvabelin. Je commence à bien connaître Lausanne.» Au point que si vous choisissez la langue chinoise sur un audioguide du Musée historique de Lausanne, c’est sa voix que vous entendrez. Cette mission fait partie des nombreux mandats de médiation culturelle de la doctorante qui, passionnée par l’enseignement, dispense aussi des cours de français à l’Université populaire de Lausanne.
Une autre manière de transmettre et de recevoir, puisque l’une de ses élèves l’aide actuellement à relire sa thèse, écrite en français. À l’heure de prendre congé, la cheffe de courses ne manque pas de nous glisser quelques exemplaires du programme d’excursions de Vaud Rando. On y découvre qu’elle guidera l’une des dernières balades de la saison, du côté du canal de la Thielle (NE). Une sortie qui lui permettra de s’aérer l’esprit à l’heure de finaliser sa thèse.
+ D’infos vaud-rando.ch
