Un radeau design pour apaiser la cohabitation dans les ports

C’est en 2023, dans le cadre d’un cours centré sur la thématique de la cohabitation interespèces, que Jérémy Suchet et Jeremy Loup, alors étudiants à l’EPFL pour le premier et à l’ECAL pour le second, ont eu l’idée de créer une plateforme.

Mais ici, pas question de plateforme en ligne. Il s’agit bien d’un réel radeau destiné à flotter sur l’eau, mesurant 50 cm de long et fabriqué en liège. Son utilité? Faciliter la vie des propriétaires de bateaux qui voient, chaque été, grèbes huppés et foulques macroules investir les lieux pour y construire leur nid.

Moins de conflits

«L’idée du cours était de réaliser un objet économiquement viable, explique Jérémy Suchet. Nous avons pensé qu’un dispositif qui aiderait les oiseaux tout en apaisant un conflit récurrent avec les détenteurs d’embarcations représenterait une bonne solution.»

Le conflit qu’il mentionne est en effet constaté par de nombreux usagers du lac: à l’arrivée des beaux jours, ces canards à la recherche d’un lieu de nidification se tournent vers les embarcations. «Il faut dire qu’avec le développement urbain, ils ont de moins en moins d’espaces naturels où se réfugier.»

Donner envie aux particuliers

Or, les propriétaires de bateaux n’ont le droit ni de déplacer ni d’abîmer le nid de ces oiseaux et doivent, sous peine d’amende, attendre une trentaine de jours que les oisillons l’aient quitté. Cette situation a poussé les deux compères à imaginer l’intérêt commercial de leur prototype immergé, testé d’abord dans le port de Vidy, à Lausanne.

Si cet intérêt se concrétise lentement du côté des propriétaires de bateaux, il se manifeste plus nettement du côté des communes. Au bord du Léman, Morges, Nyon, St-Prex, Rolle, Prangins ou encore Crans s’en sont procuré, et le mot est passé jusqu’au lac de Neuchâtel: la commune de Concise a aussi passé commande.

Premiers résultats encourageants

En pleine saison de nidification du grèbe, quel premier bilan dressent celles qui l’ont testé? «Cela fonctionne très bien», indique Joël Happe, garde-port à Rolle qui, après avoir lui-même testé divers petits radeaux flottants, a installé dix plateformes de Birds&Co début juin.

Ses homologues de Crans, de St-Prex et de Morges partagent ce constat, et observent à la fois l’utilisation des plateformes par les oiseaux et une diminution de la nidification sur les bateaux.

Pour poursuivre sur cette lancée, il ne reste plus à Jérémy Suchet et Jeremy Loup qu’à susciter l’intérêt des particuliers pour leur radeau. Fabriqué en Suisse avec du liège portugais, faible impact environnemental oblige, il coûte la somme de 189 francs, kit d’installation compris.