STEVMotion: le robot-tâcheron qui épaule les vignerons
L’amour donne des ailes. Et parfois des idées. C’est en parlant avec sa femme viticultrice-encaveuse des difficultés techniques du métier que Marc Stevanin a trouvé une occasion de mettre à profit sa créativité et ses talents d’ingénieur. «L’entretien des vignes avec les tracteurs, surtout sur les terrains pentus et glissants, peut occasionner des accidents pouvant être mortels pour la personne aux commandes», explique-t-il. Ingénieur mécatronicien, un temps employé chez Liebherr Machines à Bulle (FR), le Vaudois a conçu de A à Z un robot capable de soulager les vignerons dans leurs travaux mécanisés.
L’entretien des vignes avec un tracteur, surtout sur des terrains pentus et glissants, peut occasionner des accidents.
Trois ans de labeur récompensés
Un projet sur lequel il a transpiré durant trois ans, au cœur de son atelier à Mathod, installé dans la grange de la maison familiale de son épouse. D’abord à côté de son travail à la HEIG-VD, puis à temps presque complet. Après deux prototypes, une étude de marché et un soutien financier de la HEIG-VD, il a présenté son «bébé» au public en 2022. Le Vineatrac, comme il l’appelle, peut pulvériser des produits de traitement, faucher ou désherber. Tout cela sans conducteur. Cette création lui a valu le prix de l’innovation 2024 du salon Agrovina.
Il nous fait une démonstration au-dessus de Mathod, dans un vignoble boueux après les pluies abondantes. La machine s’enclenche d’un tour de clé et se met à ronronner. Sensible à l’écologie, Marc Stevanin a cependant opté pour un moteur thermique de 27 chevaux. L’électrique aurait posé de nombreux problèmes, dit-il, précisant toutefois que, comparé à un tracteur, son robot, beaucoup plus léger, consomme moins de carburant.
Travail de grande précision
Sur la télécommande munie d’un écran, Marc Stevanin consulte différentes données: niveau du réservoir, distance, déclivité… D’une simple commande, il lance l’engin, qui s’aligne dans l’axe du parcours; ses chenilles mordent la pente entre deux rangs de vignes, à la vitesse du pas. Pour s’orienter, le Vineatrac est muni d’un GPS RTK (cinématique temps réel) qui assure une précision de 3 à 4 cm.
Comment ça marche
Le Vineatrac, c’est 420 kg de technologie sur chenilles, pilotés par une boîte électronique étanche. Le robot pulvérise des produits de traitement, fauche ou désherbe mécaniquement à une vitesse de 2 à 5 km/h, poussé par un moteur thermique de 27 chevaux. L’engin, compact avec ses 80 cm de large pour 140 cm de long, travaille de manière autonome ou se pilote manuellement grâce à une télécommande de longue portée.
«Le système fonctionne grâce à un deuxième GPS, qui lui reste fixe, et corrige les données du premier sur le robot», détaille l’ingénieur. Avant toute intervention, il faut toutefois cartographier le vignoble en enregistrant les coordonnées GPS à chaque bout de ligne. Le boîtier électronique se décroche facilement de la machine pour être déplacé sur un trépied et relever les points de la parcelle.
Taillé pour la pente
Si le Vineatrac soulage le vigneron, Marc Stevanin précise que ce dernier doit tout de même rester dans les parages. Question de sécurité, même si l’engin comporte un lidar qui arrête le robot en cas d’obstacle, d’animal ou autre. À cela s’ajoute un dispositif mécanique: un fil à l’avant stoppe la machine en cas de pression. «Le Vineatrac s’arrête aussi en cas de perte de contact avec la télécommande», relève l’ingénieur.
Le boîtier électronique est étanche, le robot se nettoie au Karcher. Il peut être couplé aux outils viticoles standards du marché. Pour l’entretien et les réparations, à l’exception du boîtier, n’importe quel atelier mécanique peut intervenir. Enfin, le Vineatrac peut être utilisé en mode manuel, piloté par joystick via une télécommande longue portée.
Marc Stevanin a mis un soin particulier à rendre sa création compacte. «Le moteur tient entre les chenilles, abaissant le centre de gravité. Et l’absence de porte-à-faux stabilise l’engin tout en facilitant les manœuvres en bout de ligne.»
Pour les traitements, qu’ils soient bios ou phytosanitaires, l’avantage est clair: le vigneron reste à distance, préservant sa santé. Quant au désherbage, souvent chimique aujourd’hui, le Vineatrac propose une alternative mécanique. L’ingénieur travaille d’ailleurs sur une herse rotative capable de détruire les racines des adventices sous le rang. Plus léger qu’un tracteur classique (il pèse 420 kg hors outils), le robot limite aussi le tassement des sols, enjeu central pour la résilience des vignobles.
Plus d’infos : stev-motion.com
