Avant l'hiver, entraînement millimétré pour huskies d'élite

À la ferme du Grand Paradis, à Champéry (VS), les huskies de Violaine Girard Grau se préparent dans le but de décrocher un nouveau titre mondial. Visite d'un chenil où les entraînements rythment un quotidien bien chargé.
15 septembre 2025 Oriane Grandjean
© Cédric Raccio
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Six huskies aboient en même temps. Attachés, ils sont équipés d’un harnais et savent ce qui les attend, l’entraînement. L’impatience se fait ressentir. Violaine Girard Grau enfile un casque intégral, des lunettes, une protection dorsale et une paire de gants avant de s’installer sur son kart.

Sa collaboratrice Coralie attelle les huskies, non sans difficultés, tant les chiens ont hâte de démarrer. Une fois en place, Violaine Girard Grau lâche les freins et c’est parti.

Des kilomètres au compteur

L’attelage s’élance sur le circuit dévolu à l’entraînement devant la ferme: 1,4 km de piste, des bosses, des tournants, le tout avalé à une vitesse folle. Les huskies sont en effet capables de galoper à une moyenne de 20 à 22 km/h, avec des pointes à 30 km/h. Si l’équipage disparaît vite de notre vue, les ordres nous parviennent encore: on entend «devant», «gee» (pour indiquer un virage à gauche), «haw» (pour droite) ou «stop» pour arrêter les chiens. Les réactions des animaux sont immédiates.

Il faut dire qu’ils ont en parcouru, des kilomètres ensemble. Violaine Girard Grau a décroché plusieurs titres mondiaux de 2019 à 2025, notamment en ski joëring, soit en étant tractée par un ou des chiens tout en faisant du ski de fond. «Étant championne du monde en titre, je vais pouvoir m’élancer en première position cette saison. C’est un avantage, car on ne perd pas de temps à dépasser d’autres attelages.»

Mais la Valaisanne ne brille pas que dans cette catégorie. Elle s’illustre aussi au plus haut niveau en traîneau à quatre ou six chiens en hiver et en kart ou à vélo durant l’automne. Pour répondre aux exigences de ce sport, elle peut compter sur 22 huskies, des chiens taillés pour ça.

Cap sur les longues distances

Si vous vous promenez à Champéry, ne soyez pas surpris de croiser Violaine Girard Grau à plusieurs reprises. Lors de ses entraînements, elle chronomètre tout. Cela lui permet de suivre le développement des chiens. Elle refait jusqu’à dix fois la même balade à vélo pour comparer les temps. Pour garder la motivation de son équipe, elle varie les plaisirs entre l’entraînement avec le kart, ou à vélo, aussi bien classique qu’électrique.

«Dès l’automne, il faut les remettre sur des plus longues distances puisque les courses auxquelles je participe font près de 40 km. La variété des entraînements est nécessaire pour le moral autant pour les chiens que pour le mien. Dès les premières neiges, je suis heureuse de remettre les skis de fond. Et au printemps, quel bonheur de ressortir le vélo. Le changement est motivant pour tout le monde.»

Violaine Girard Grau maintient aussi sa forme en entraînant ses protégés, car c’est un sport exigeant aussi pour le musher. «Si on est un vrai musher, on va aider les chiens en compétition. On descend du traîneau et on court à côté pour leur faciliter le job. C’est comme à ski, il faut avoir une excellente endurance pour augmenter la performance. Ce n’est pas de tout repos. On ne se laisse pas juste tirer. Même avec le kart c’est éprouvant physiquement.»

Un large éventail de disciplines

Plusieurs disciplines sont pratiquées avec les huskies. La plus traditionnelle est la course de traîneau, dont l’un des exemples particulièrement disputés sous nos latitudes est la Grande Odyssée, en France voisine, sur laquelle les équipages de six à huit chiens parcourent plus de 400 km avec près de 12 000 m de dénivelé sur une dizaine de jours. Mais il existe aussi des compétitions sur de plus courtes distances, des courses à skis de fond ainsi que, hors saison d’hiver, des épreuves de kart ou de vélo tracté, voire de course à pied. À l’échelle internationale, les épreuves de traîneau les plus mythiques couvrent des distances gigantesques, à l’instar de la légendaire Yukon Quest, dont le parcours couvre 1648 km…

Un sentiment de liberté

Ce qui lui plaît le plus dans la pratique des sports avec les huskies, c’est le sentiment de liberté qu’ils procurent. «Quand tu es en compétition, que tu peux laisser tes chiens exprimer toute leur puissance et qu’en plus cela se passe dans un décor naturel sauvage, c’est magique.» Son attrait pour le travail avec les chiens remonte à son enfance: «J’aimais bien promener mes copines dans un chariot que je faisais tirer par mon chien, explique Violaine Girard Grau. J’ai également très vite compris que c’était plus facile de faire du ski de fond à l’aide d’un chien.»

Bien qu’elle ait toujours eu un canidé à la maison, ce n’est qu’il y a une petite dizaine d’années, lorsqu’elle s’essaie à une course de vélo avec un chien, que le déclic se fait. «J’ai commencé à prendre deux chiens, puis quatre, puis six et maintenant j’en suis à 22. C’est long pour construire son team. Il faut acheter ou faire naître un chiot, l’élever et apprendre à le connaître parfaitement, pour qu’il puisse réagir même avant que tu donnes l’ordre. C’est fabuleux quand tu es en pleine course et que les chiens anticipent tes ordres.» En 2020, Violaine Girard Grau quitte son poste de cheffe de la police de Monthey pour se lancer corps et âme dans sa passion.

Régime de sportifs

Cet automne, la reprise des compétitions se fera d’abord avec la Coupe du monde sur terre, entendez une course de 4 ou 7 km sur un kart ou un vélo tracté. Puis viendra le temps des compétitions d’hiver, en traîneau ou à ski de fond, aux quatre coins de l’Europe.

Athlètes accomplis, les chiens voient leur entraînement complété par un programme de soins rigoureux. «Ils sont vus deux fois par année par un vétérinaire ostéopathe. Côté alimentation, ils sont nourris avec des croquettes hautement protéinées et très grasses. Chacun d’entre eux mange aussi quotidiennement 400 g de truite. J’ai un accord avec la pisciculture de Vionnaz, dont je peux reprendre les invendus.»

Autant dire que rien n’est laissé au hasard pour que la Valaisanne et ses chiens soient à nouveau auréolés de trophées durant la saison prochaine. Mais en attendant les prouesses sportives, un nouveau groupe de chiens attend son tour. L’entraînement n’est pas fini.

+ d’infos alpes-huskies.ch

Alp'huskies, ou l'art de la diversification

Violaine Girard Grau partage sa passion des huskies à travers diverses activités proposées à l’enseigne de Alpes’Huskies: balade en attelage, cani-randonnée, cani-kart ou encore cani-trottinette, il y en a pour tous les goûts. «On propose une expérience. Cela permet aux gens de comprendre le travail du musher.» La ferme du Grand Paradis, datant de 1900, a été entièrement retapée pour accueillir un chenil, une salle de séminaire, des chambres d’hôtes, une buvette et même un musée consacré aux huskies. Et le succès est au rendez-vous: Violaine Girard Grau et son équipe accueillent une quinzaine de clients par jour sur l’année.

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