Dans les champs inondés de la plaine de l'Orbe avec les assureurs
Pour cette première expertise de l’année, François Roulier, chef de groupe auprès de la compagnie d’assurance Suisse Grêle et ancien agriculteur, a donné rendez-vous à son équipe dans un café à Chavornay (VD), près de la zone sinistrée (Orbe, Bavois, Valeyres-sous-Rances).
Le but de cette réunion est de rafraîchir la mémoire des membres après la pause hivernale, car les experts de Suisse Grêle sont tous des miliciens et font cette activité à côté de la gestion de leur exploitation agricole.
Plus d’épisodes extrêmes
Avec le réchauffement climatique, les épisodes climatiques extrêmes ont tendance à se multiplier. «À présent, on a des épisodes qui sont souvent très localisés. En 2013, il y a eu une traînée de grêle qui s’est déplacée de Genève à Fribourg, laissant derrière elle d’énormes dégâts, se souvient encore François Roulier. Les inondations et les sécheresses sont aussi plus fréquentes et provoquent généralement de gros sinistres, c’est un peu tout ou rien.»
Bettina Koster, responsable Développement durable chez Suisse Grêle, poursuit: «En raison du changement climatique, il est important que les exploitations adaptent leur gestion aux nouvelles conditions afin de renforcer leur résilience face aux risques liés au climat.»
En binôme, sauf exception
Au programme de la journée, l’expertise de plusieurs parcelles inondées, concentrées sur une petite zone de la plaine de l’Orbe. Celle-ci a été affectée par de très fortes pluies, jusqu’à 100 litres d’eau tombés en une demi-heure par endroits. Les experts, sept au total, visiteront la première parcelle en duo, sous la houlette du chef de groupe, avant de confronter leurs résultats. Ce modus operandi n’est pas celui qui prévaut le reste de l’année, les experts travaillant généralement en binôme.
La première inspection concerne une parcelle de 14 hectares, dix en colza, quatre en betteraves. Le champ a triste mine, on voit ici et là des zones plus foncées où la terre s’est accumulée sous l’effet du ruissellement. «L’eau a raviné le champ et terminé dans des cônes de déjection, affectant les cultures de betteraves que j’avais semées début avril», explique Cédric Martin, le propriétaire de la parcelle. Le chef de groupe donne ses consignes: «Regardez bien d’où vient l’eau, déterminez la surface touchée, les plantes perdues avec photos et croquis à l’appui.»
Une procédure bien rodée
L’expertise se fait sur tablettes. La procédure est bien rodée. «Quand on arrive sur une parcelle, on demande au client si la surface annoncée correspond à la réalité, on la géolocalise, on regarde le stade de la culture avant de vérifier que le dégât est bien celui annoncé par l’assuré», indique Alain Urben, l’un des experts.
Parmi les points clés, il faut s’assurer que l’eau qui a causé le dégât provient bien de l’extérieur de la parcelle, sinon il n’est pas couvert. Il faut déterminer également si la récolte est définitivement perdue ou si elle peut redémarrer. Dans le doute, l’expert inscrit le dommage «en provisoire» et viendra vérifier plus tard dans la saison, ce qui donne une sécurité à l’exploitant. Finalement, il faut évaluer la surface endommagée et le taux de perte.
Solution validée par tous
Après 20 minutes, il est temps de confronter les différentes évaluations des équipes. Les discussions sont animées, mais les groupes se mettent finalement d’accord pour «diviser la position en trois», une démarche qui permet de traiter de manière différenciée la parcelle en fonction du niveau de dégâts.
Une partie sera déclarée non indemnisable, n’ayant pas été touchée, une autre «sinistrée à 80%», et une dernière, plus petite, «mise en provisoire». Autrement dit, elle devra être inspectée à nouveau dans quelques semaines pour voir l’état de la culture.
«Si de l’eau revient, la betterave ne va pas repousser et on indemnisera. Si au contraire les conditions s’améliorent et qu’elle repart, la position pourra être clôturée, car l’agriculteur n’aura presque pas subi de pertes de rendement», résume François Roulier. L’agriculteur se range à l’avis des experts: «Il faut être juste, j’ai aussi l’impression qu’une partie va repartir», conclut-il, en s’en remettant à la météo qui aura finalement le dernier mot…
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