Adepte de vitesse et d'adrénaline,
elle aime aussi le calme de la nature

La championne de skicross de Villars (VD) est double médaillée de bronze olympique. Elle revient sur son parcours et la manière dont la montagne et le ski l'ont émancipée d'une scolarité compliquée.
30 novembre 2024 Aurélie Jaquet
Fanny Smith est double médaillée de bronze olympique.
© Cédric Raccio

Fanny Smith nous donne rendez-vous dans un hôtel quatre étoiles de Villars (VD). Un lieu choisi non pas tant pour son côté chic que pour le coup d’œil spectaculaire sur les sommets environnants. «Vu la météo, je me suis dit que ça valait la peine, non?» s’exclame l’athlète en prenant place sur la terrasse. Elle sort ses lunettes de soleil, commande un thé blanc et démarre la conversation avec entrain.

Joviale et accessible, la skieuse de 32 ans savoure ses derniers jours à la maison avant d’entamer sa saison de compétition, qui se jouera entre l’Italie, la Suisse, la France, l’Autriche, la Suède, la Géorgie et le Canada. Établie à Villars depuis toujours, elle est très attachée à la région. «L’été, pendant ma préparation physique, j’ai un pied-à-terre à Lausanne, chez mon compagnon, mais je remonte ici dès que j’ai terminé mes entraînements, parce que la montagne est vitale pour moi. Je ne pourrais jamais vivre en ville», assure Fanny Smith.

Six médailles mondiales

Fin août dernier, elle est partie trois semaines tester son nouveau matériel à Ushuaïa, à l’extrême sud de l’Argentine. Le lendemain de notre rencontre, elle rejoignait Saas-Fee (VS), sa base d’entraînement, puis Saint-Moritz, dans les Grisons, avant sa première course, prévue le 12 décembre prochain à Val Thorens (F). «Je serai au départ de vingt compétitions de Coupe du monde entre décembre et fin mars, cela s’annonce très chargé», se réjouit l’athlète en esquissant un sourire.

Le principe de sa discipline? Dévaler le plus vite possible un parcours constitué de mouvements de terrain, de sauts et de bosses. Au départ, quatre concurrentes s’élancent en même temps et la première arrivée en bas a gagné. À ce jeu-là, Fanny Smith termine souvent en tête, en témoigne son riche palmarès, qui compte notamment deux médailles de bronze olympiques, 31 victoires en Coupe du monde, trois au classement général de la Coupe du monde et six médailles mondiales.

Ce sport semble taillé sur mesure pour l’athlète vaudoise, dont l’esprit de compétition s’est forgé dès le plus jeune âge au contact de son grand frère, qui fut son premier adversaire sur la neige. «Il faisait du freestyle et j’avais pour mission de tester les sauts qu’il construisait avec ses copains. Comme cadette, je me faisais un point d’honneur de lui montrer de quoi j’étais capable et d’essayer de le battre», se souvient Fanny Smith avec une pointe de malice.

Son univers

Un style musical

«Le rock. J’aime à peu près tout, des Beatles à Radiohead.»

Une saveur

«
Impossible de me passer de chocolat noir, j’en mange un carré tous les soirs.»

Une destination

«Le Japon, c’est
le voyage de mes rêves. La nature, la culture, le ski, tout m’attire là-bas.»

Un livre

«Glucose Revolution»,
de Jessie Inchauspé
est ma lecture du moment. Un ouvrage super intéressant sur l’impact du sucre dans nos vies.»

Révélation à l’âge de 12 ans

Née à Aigle d’une mère enseignante et d’un père prof de ski et de parapente, elle a dévalé ses premières pistes à l’âge de 2 ans et demi et entretient depuis toujours un lien très fort à la nature. «Je le dois à mes parents, qui nous ont initiés très tôt, avec mon frère et ma petite sœur, aux activités extérieures. On a toujours fait beaucoup de marche, de randonnée, de vélo, de grimpe, de parapente», raconte la Vaudoise.

À 12 ans, lorsqu’elle participe à un événement de skicross organisé par la station de Villars, c’est la révélation. À l’époque, la discipline n’en est qu’à ses débuts et les structures sont encore inexistantes.

Coup de pouce paternel

Fanny Smith participe à quelques compétitions en Suisse, entourée par ses parents, qui la soutiennent sans jamais la pousser. À 14 ans, l’adolescente apprend que le skicross fera son entrée comme discipline olympique aux JO de Vancouver.

«Je n’oublierai jamais ce jour-là. Je participais à une course à Zweisimmen (BE). Sur le télésiège, mon père, qui pense toujours que tout est possible, m’a alors lâché: «Pourquoi ne pas tenter ta chance?»

Je remonte à Villars dès que 
j’ai terminé mes entraînements.
La montagne est vitale pour moi,
je ne pourrais jamais vivre en ville.

L’optimisme paternel et la persévérance de la jeune athlète s’avèrent gagnants. En 2010, cinq ans seulement après ses débuts en skicross, Fanny Smith s’envole pour Vancouver et participe à ses premiers Jeux. La Vaudoise termine 7e de la compétition, obtient une 8e place quatre ans plus tard à Sotchi, avant de décrocher deux fois le bronze à Pyeongchang (2018) et Pékin (2022).

Sport études à Brigue

Enfant très active, limite turbulente, de son propre aveu, Fanny Smith trouve très vite dans la montagne à la fois une source d’apaisement et d’énergie.

«J’ai eu une scolarité très difficile, car je souffre de dyslexie et de dysorthographie. Je passais des heures à faire des dictées avec ma mère, mais mon travail ne se reflétait pas dans mes notes. Cela a été une période compliquée et en même temps très formatrice, parce que j’ai développé une persévérance qui a fonctionné dans mon sport. Mettre la même énergie dans mes entraînements et voir que cela payait en compétition a été ultralibérateur», se remémore l’athlète, qui a terminé sa scolarité en sport études à Brigue (VS).

Pouvoir vivre de son sport

Ce déclic convainc également ses parents, qui activent alors leur réseau pour trouver les moyens de monter une structure d’entraînement pour leur fille, à l’heure où la Fédération suisse de ski ne disposait pas encore d’infrastructures pour une skieuse si jeune.

Un pari réussi, puisque la Vaudoise figure depuis le début de sa carrière parmi les très rares athlètes de la discipline à pouvoir vivre de son sport. «Celles qui sont en bas du classement sont obligées de travailler à côté. Malgré la médiatisation du skicross, les prize money se situent en dessous de ceux du ski alpin.»

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