Sur la piste de la météorite qui a fendu le ciel lémanique

Le 1er octobre, un corps céleste a survolé la région à la vitesse phénoménale de 75 km par seconde, provoquant une forte déflagration. Retour sur un événement rare.
19 octobre 2025 David Genillard 
© Adobe Stock

Le mercredi 1er octobre, vers 16h, une météorite a fendu le ciel suisse à une vitesse phénoménale. Son passage a été perçu au sol sous la forme d’une forte détonation accompagnée d’une secousse, ressentie depuis la région de La Côte, jusque dans les Alpes bernoises. Selon les premières observations du Service sismologique suisse (SED) dont les instruments ont enregistré le phénomène, l’objet se déplaçait à 75 km/s, soit 218 fois la vitesse du son (0,34 km/s).

«Notre analyse actuelle est encore quelque peu incertaine, explique Toni Kraft, sismologue au SED. Elle suggère que cette météorite se déplaçait d’ouest en est, de l’arc lémanique, en direction d’Interlaken.» Sur cette trajectoire, le corps céleste est passé d’une altitude de 53 km à 3 km.

Un bolide introuvable?

Tant Delio Macchi, animateur à l’observatoire de Neuchâtel, que le Dr Beda Hofmann, conservateur de la section minéralogie et météorites du Musée d’histoire naturelle de Berne, estiment que le diamètre de l’objet devait avoisiner les 2 m. «Les effets de ces bolides sont impressionnants. Si celui-ci avait été plus gros et s’était écrasé au sol, il aurait provoqué une déflagration qui aurait été fortement ressentie dans le secteur de l’impact.»

Les chances d’en retrouver des fragments sont minces, estime le Neuchâtelois. Le corps céleste aurait explosé, selon les données du SED, ce qui tend à confirmer l’hypothèse de Delio Macchi et Beda Hofmann: il s’agirait d’une météorite pierreuse «qui a tendance à éclater en vol».

Un enseignant sur le qui-vive

Tremblement de terre? «Bang» d’un chasseur de l’armée? Les causes de la déflagration auraient pu rester inexpliquées sans la curiosité d’un enseignant du Sépey (VD). «Nous disposons d’un sismographe dans notre école, dans le cadre du réseau participatif international ShakeNet, explique Jean-Daniel Champagnac. J’ai consulté les données disponibles en ligne. J’ai remarqué que la secousse a été enregistrée par d’autres appareils dans un large rayon; trop large pour être le fait d’un avion. De plus, les courbes sismographiques résultant d’un tremblement de terre ont des allures assez typiques – différentes de celle que j’ai observée.»

Intrigué, l’enseignant a fait part de ses interrogations à György Hetényi, professeur à l’Université de Lausanne et instigateur du déploiement du réseau ShakeNet dans les écoles vaudoises et valaisannes, qui a ensuite transmis les informations au SED.

D’autres cas en Suisse

On estime que 17 000 objets en provenance de l’espace s’abattent sur terre chaque année, «dont la très vaste majorité dans les océans», précise Delio Macchi. De ce fait, la découverte de fragments reste rare. Rare, mais pas totalement inédite: en Suisse, quelque 2000 éclats de la météorite de Twannberg (Douanne, dans le Jura bernois), qui se serait écrasée il y a 176 000 ans, ont été retrouvés dès 1984 dans ce qui constitue l’un des champs de dispersion les plus importants au monde.

Un autre exemple est conservé à Lausanne, au Musée cantonal de géologie: selon le quotidien 24 heures qui consacrait un article en 2020 à cette curiosité, c’est un apprenti lausannois qui l’a ramassée dans une flaque, un soir de 1894, se brûlant les doigts en voulant saisir l’objet.

Enquête en cours

György Hetényi et Toni Kraft sont unanimes: un tel événement reste rare. «De plus faibles signaux provenant de météorites sont captés en moyenne une fois par an, explique le sismologue du SED. Un phénomène repéré aussi largement que celui du 1er octobre ne peut être observé que tous les trois à cinq ans.»

Les investigations poursuivent pour mieux apporter de nouveaux éclaircissements. «Les signaux que nous avons enregistrés sont complexes, poursuit Toni Kraft. Il semble que le corps se soit brisé en au moins deux morceaux, car nous détectons deux signaux acoustiques distincts sur les parties ultérieures de la trajectoire.» Pour compléter ces observations, György Hetényi a lancé un appel à témoins sur le site de l’UNIL et dans les médias.

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