Animaux
Le cœur de trois frères valaisans bat à l’unisson pour les vaches d’Hérens

À une semaine de la finale nationale d’Aproz (VS), les Orserains Florian, Justin et Bertrand Coppey racontent la passion pour l’élevage qui les unit et la joie de voir leurs protégées gagner des combats.

Le cœur de trois frères valaisans bat à l’unisson pour les vaches d’Hérens

Florian, Justin et Bertrand ont mal à la tête en ce lundi matin. La veille, ils ont fêté la victoire de Brunette, la vache de leur oncle Nicolas, qui a remporté le match du Châble. Quelques bouteilles ont été nécessaires pour célébrer dignement cet événement, et les brumes de la soirée ne se sont pas encore totalement dissipées. Si les trois frères sont passionnés par les hérens, ils ne sont pas tombés en même temps dans la marmite. Florian, l’aîné, a été le premier à s’y intéresser de près. En 1996, après une troisième saison à l’alpage durant laquelle il se familiarise avec le caractère particulier de ces bêtes, il fait l’école d’agriculture puis un apprentissage de maçon.

En 2003, il reprend une ferme sur les hauts d’Orsières en même temps qu’un petit troupeau de quatre «noires», comme il les appelle, par opposition aux simmentals à la robe blanche. Pour lui, les hérens sont une race qu’on ne peut comparer aux autres. «Ces bêtes dégagent quelque chose d’unique. Elles sont plus vives, recherchent davantage le contact, on est vraiment dans une proximité physique. Et puis, grâce à elles, on crée aussi des liens avec d’autres éleveurs et les amateurs qui s’y intéressent, notamment dans le cadre des matchs.»

Débuts à tâtons

Il faut croire que la passion est contagieuse, puisque Justin, lui aussi désireux de travailler avec des hérens, est venu seconder son frère sur le domaine agricole en 2014. Bertrand, lui, s’est orienté vers une autre voie et, après des études en économie, a occupé plusieurs postes à responsabilité dans des entreprises de la région. Aujourd’hui directeur administratif de la société DransÉnergie, il passe le plus clair de son temps au bureau, devant un ordinateur. Mais dès qu’il en a l’occasion, il rejoint ses deux frères à la ferme, au mayen ou à l’alpage, où les bêtes passent l’été. Il a d’ailleurs lui aussi acheté une vache, il y a trois ans, dans l’idée de la présenter à des combats. «Elle s’est malheureusement cassé une corne et pendant un an et demi, elle a eu de la difficulté à lutter, car elle était devenue craintive.» Cette première expérience avec Lexis a malgré tout enthousiasmé Bertrand. Celui-ci a maintenant une deuxième vache, Lascaux, qui va prendre la relève lors de prochains combats.

Ce qui fait une championne? «Il n’y a pas de mode d’emploi, répond Florian. Quand on débute, on avance à tâtons. Il faut s’informer, discuter avec d’autres éleveurs, aller voir des matchs. Au gré des opportunités, on achète des bêtes. Parfois, on a de la chance, d’autres fois non. Mais avec le temps, on commence à comprendre quels sont les paramètres les plus importants.» Parmi ceux-ci figure la génétique. Si une vache a eu une belle carrière, il y a de bonnes probabilités que ses filles suivent le même chemin. Le choix du taureau est également déterminant. Vient ensuite l’intuition de l’éleveur. «Il faut évaluer le caractère de chaque bête, rappelle Justin. Le regard curieux et attentif est un signe positif. Si une vache ne s’intéresse pas à ce que font les autres, il y a peu de chance qu’elle devienne une bonne combattante.»

Remise en forme

La première sonnette gagnée par les Coppey remonte à 2008. Leur palmarès s’est étoffé depuis, avec trois reines de match dans l’écurie – soit des vaches ayant remporté l’une des manches qualificatives organisées entre l’automne et le printemps, en vue de la finale nationale. À dix jours de cette épreuve, les frères préparent leur championne, Lolita. Reine du Comptoir de Martigny en 2017, cette belle vache trapue et musculeuse confirme l’importance d’une bonne filiation, puisque sa mère Lila a été sacrée reine de la même manifestation, l’année précédente. Au sortir de l’hiver, ils lui ont fait suivre les phases classiques de la préparation: «Entre quatre et six semaines avant le match, il faut la faire marcher plusieurs fois dans la semaine, pour la remettre en condition, explique Florian. On lui donne aussi un aliment spécial à base d’avoine, qui favorise l’engraissement.»

Au bout de quelques minutes de séance photo, Lolita en a assez et le fait savoir, en tirant plusieurs fois sur le licol que tient d’une main ferme Justin. Laissée libre, elle s’éloigne vers un grand tas de terre, qu’elle commence à gratter vigoureusement de ses sabots. Dans quelques jours, elle sera dans l’arène. Avec Florian, Justin et Bertrand à ses côtés, caressant le même rêve secret que tout éleveur sérieux en Valais se doit d’avoir.

Texte(s): Alexander Zelenka
Photo(s): Céline Ribordy

Aproz, jour J-9

Après des phases éliminatoires organisées en automne et au printemps dans différentes localités valaisannes, les meilleures vaches de la race d’Hérens s’affronteront dans l’arène à Aproz, les 5 et 6 mai prochain. En 2017, une centaine de bêtes avaient lutté pour la conquête du titre, devant près de 10 000 spectateurs. La victoire était finalement revenue à Tzigane, une vache appartenant à un éleveur haut-valaisan, qui avait déjà remporté en 2016 le titre de reine de deuxième catégorie, composée d’animaux pesant entre 618 et 678 kilos.

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