Portrait de race
Sous son air hautain et amusant, l’alpaga cache une grande sensibilité

Avec son allure et sa démarche uniques, l’alpaga a de quoi séduire. Si cet animal grégaire est de nature craintive, de la douceur et de la patience permettent néanmoins de l’apprivoiser.

Dans les grands prés qui jouxtent la ferme familiale de Michel Ding et de son père Jean, à Murist (FR), des animaux pour le moins inhabituels ont remplacé le bétail depuis que Jean a pris sa retraite. Avec leur long cou, leur frange bouclée et leurs yeux perçants, les alpagas de la famille Ding ont de quoi surprendre.
À notre approche, une quinzaine de regards curieux et attentifs se tournent vers nous, nous dévisageant. Les plus téméraires viennent voir le visiteur à l’appel de Michel, avant de se remettre à brouter. Leur démarche à l’amble évoque les chameaux, dont ils sont les cousins. «J’ai découvert cet animal voilà sept ans, explique l’éleveur fribourgeois. J’ai alors immédiatement été séduit par la beauté de l’alpaga et sa tête particulière, avec ses deux oreilles dressées et sa houppette. Son regard perçant me fascine.» À peine trois semaines plus tard, Coquine, Coletta et Fritz rejoignent Murist. Depuis lors, Michel Ding, définitivement conquis, ne cesse de se documenter et de se former, afin de détenir ses animaux dans les meilleures conditions possibles. Il a ainsi acquis l’attestation de compétence délivrée par l’Office fédéral de la sécurité alimentaire et des affaires vétérinaires, obligatoire pour les détenteurs de plus de dix animaux.

Six naissances à venir
Peu à peu, Michel Ding et son père ont acheté d’autres femelles pour agrandir leur cheptel, alors qu’en parallèle plusieurs petits sont nés. Désormais, ce ne sont pas moins de 17 alpagas qui paissent dans les prés alentour, alors que 6 naissances sont prévues cet été. «Je me suis pris de passion pour l’élevage, souligne le Fribourgeois.
Je suis très attentif à la qualité génétique du mâle qui saillit les femelles. Je vais chercher celui-ci chez un autre éleveur, pour le temps des saillies, afin de diversifier la génétique.» Lorsque les petits naissent, ils deviennent une attraction pour tous les habitants du village qui, quel que soit leur âge, sont émerveillés d’assister à de folles courses-poursuites entre les nouveau-nés. L’année passée, l’éleveur a eu le bonheur de voir naître une femelle de robe grise, sa couleur préférée. «Il est difficile de prévoir la robe qu’aura un alpaga, il s’agit toujours d’une surprise.» Tous les printemps, le troupeau est tondu. La laine est triée selon sa qualité par une fileuse, qui la vend ensuite à l’échelon européen.

Les apprivoiser avec patience
Chaque soir, Michel Ding, qui travaille dans le domaine informatique, prend un moment pour aller voir ses alpagas, s’asseyant parfois au milieu du troupeau. «Pour moi, il s’agit d’un réel moment de décompression. J’évacue ainsi mon stress. Les alpagas sont des animaux craintifs, ce qui les rend attachants: il faut gagner leur confiance, jour après jour, en passant beaucoup de temps avec eux. Le lien qu’on crée ainsi est d’autant plus fort. Mais même si leur toison duveteuse nous inciterait à vouloir les caresser et les prendre dans les bras, n’imaginez pas le faire, car ils ne  l’apprécient pas particulièrement.» L’éleveur aime partager son bonheur de côtoyer ces animaux, en emmenant famille et amis avec lui en balade. «J’habitue les jeunes au licol dès l’âge de 1 année. Il faut de la patience pour les apprivoiser! Un alpaga qui ne veut plus avancer se couche. Il n’y a alors pas d’autres solutions que d’attendre qu’il se décide à poursuivre son chemin…» À l’heure de partir, je ne peux m’empêcher de demander: et alors, un alpaga, cela crache comme un lama? «Oui, mais il en faut vraiment beaucoup pour l’énerver et qu’il en arrive là!»

Texte(s): Véronique Curchod
Photo(s): Eric Bernier

Fiche signalétique

Origine
Cordillère des Andes (Argentine, Bolivie, Chili, Équateur, Pérou).

Morphologie
Corps s’inscrivant dans un carré, avec un long cou. Mesure 90 cm à 1 m au garrot. Il existe une vingtaine de tons de robe naturels. Les alpagas sont uni ou bicolores.

Particularité
Descendant de la vigogne sauvage, l’alpaga a été domestiqué par l’homme il y a plus de 5000 ans pour produire une fibre fine et chaude. Ce ruminant fait partie de la famille des camélidés, comme les chameaux.

Prix
Entre 1500 et 2500 francs pour un jeune mâle de 1 à 2 ans, entre 3000 et 6000 francs pour une femelle du même âge. La qualité de la laine, la robe, les origines et une éventuelle gestation en cours s’il s’agit d’une femelle sont autant de facteurs qui influencent le prix.

Ses points forts
Sa beauté et son allure unique. Sa rusticité. Son intelligence.

Ses points faibles
Sa nature craintive et sauvage. N’apprécie pas d’être caressé. Son caractère.

Élevages en Suisse romande
Alpaga La Molière, Michel Ding, Murist (FR), www.elevage-mitch.ch; Gérald Vauthey, Lucens (VD), tél. 021 906 97 04; Jura Lama, Carla et Ulrich Stettler, Vermes (JU), www.jura-lama.ch