Reportage
Rapidité et qualité, les atouts des vendangeuses tractées

Entre Morges et Nyon (VD), les Pellenc de LMMP ont déjà converti une vingtaine de viticulteurs aux vendanges mécaniques tractées. Gilles Pilloud, l’un des associés de l’entreprise, en est l’un des plus fervents adeptes.

Rapidité et qualité, les atouts des vendangeuses tractées

Cet automne, Gilles Pilloud va encaver sa dixième vendange récoltée non pas grappe par grappe par des ouvriers consciencieux, mais dans le fracas trépidant d’une machine accrochée à un tracteur. Un vacarme qui masque la finesse du travail effectué: une machine bien réglée et bien calibrée s’avère non seulement bien plus rapide (son rythme horaire est celui d’une cinquantaine de vendangeurs), mais aussi plus fiable et apte à livrer une récolte d’un état irréprochable.

Logistique simplifiée
Mais pour le responsable du domaine du Château de Crans, à Crans-près-Céligny (VD), cette conversion mécanique a d’abord été motivée par la logistique. «Nous gérons également un domaine à Féchy (VD), ce qui impliquait le déplacement des vendangeurs entre les deux sites; on devait en outre parfois caler les périodes de récolte sur leur présence, au lieu d’attendre la maturité optimale de nos nombreux cépages, dont la vendange s’étale facilement sur six semaines. Une difficulté supplémentaire dans la gestion du personnel temporaire.» La réactivité des machines s’est en outre révélée précieuse pour jongler avec les aléas climatiques, tant pour profiter de courtes «fenêtres» de beau temps que pour s’adapter aux journées chaudes pendant lesquelles il faut récolter les cépages les plus précoces. «En 2018, on a pu tout vendanger de nuit et disposer avant 7h du matin d’un premier pressoir de baies encore fraîches, qu’on n’a dû refroidir que de 5°C», se souvient-il.

Antérieure à l’achat d’une première machine, la société de prestations pour tiers LMMP (voir encadré) a permis de rentabiliser du matériel destiné à rester immobile dix mois par an. Aujourd’hui, ce sont cinq vendangeuses tractées de la marque Pellenc qui garnissent le parc de LMMP. «Cela nous permet d’avoir une solution en cas de panne de l’une d’elles et de gérer au mieux la répartition des tâches entre nos clients coopérateurs, tenus par un horaire imposé, et les encaveurs, plus libres. Mais certaines semaines, toutes tournent simultanément!»

Le vigneron le reconnaît: il faut aimer la technique et la mécanique. «Une bonne révision avant les vendanges et une en fin de saison s’imposent, tout comme de disposer d’un stock pour certaines pièces, et d’avoir affaire à un importateur diligent. Pas question de faire attendre un client…»

Dès le début, LMMP a opté pour des machines tractées plutôt qu’autotractées. «On peut les déplacer à 40 km/h au lieu de
25 km/h, ce qui est évidemment un avantage. Mais leur grand atout est de ne pas avoir un moteur condamné à l’inaction durant des mois… Et comme il s’agit de remorques à six roues motrices hydrauliques, on tasse beaucoup moins les sols, d’autant que leur masse à vide est de moins de 5 tonnes, contre 10 pour certains enjambeurs.» Avantage indirect, non négligeable sur un vignoble romand connu pour pousser les tracteurs viticoles dans leurs retranchements: des machines qui grimpent mieux et risquent moins de basculer qu’une vendangeuse autotractée, plus lourde sur le train arrière. Mais c’est bien l’amélioration des performances des tracteurs viticoles, et surtout la généralisation de la transmission à variation continue (vario), qui a relancé l’intérêt pour les machines remorquées, souligne le vigneron. «Le tracteur ne doit pas demander d’attention au conducteur, entièrement concentré sur la machine.»

Table de tri en sus
Un réglage pointu en fonction du cépage à récolter et de l’état des baies est évidemment indispensable. «Trop faible, le secouage laisse des grappes sur le cep; trop fort, il fait tomber les baies avant le passage de la vendangeuse… L’expérience du chauffeur est primordiale, sans quoi on peut rapidement perdre du raisin.»

Autre facteur qui a révolutionné l’efficience des machines: la table de tri incorporée, réglable en fonction de la taille des baies. Trois des cinq machines de LMMP en disposent; Gilles Pilloud en a choisi les caractéristiques à la carte: 80% des déchets restent ainsi à la vigne, évitant ainsi un fastidieux tri à l’entrée de cave. Mais la préparation de la vigne elle-même, en amont, fait partie des prérequis à respecter pour lui-même comme pour sa vingtaine de clients. Un espace de 4m50 en bout de rang est indispensable pour les manœuvres; surtout, «le système cultural doit être ajusté. Il faut enlever les vieilles souches sèches, les agrafes métalliques, les petits tuteurs, sans quoi ils se prennent dans le mécanisme et provoquent des incidents qui peuvent vite faire perdre le temps gagné.» Lorsque le cépage s’y prête – le merlot, avec ses baies protégées par une peau épaisse ou le chasselas qui s’égrène facilement – on peut même se passer de table de tri, note-t-il.

«Au début, nos clients se comptaient surtout parmi les coopérateurs; depuis, la part d’encaveurs ayant des surfaces importantes à vendanger a pris beaucoup d’importance. Mais personne ne revient en arrière après avoir expérimenté la souplesse, la qualité et la rapidité de la machine, conclut Gilles Pilloud. Le gain n’est pas seulement pour la cuisinière qui s’épargne la préparation de repas pour des grandes tablées de vendangeurs durant toute la période des vendanges!»

 

Texte(s): Blaise Guignard
Photo(s): Mathieu Rod

LMMP en bref

  • Fondateurs: Jean-François Lude, Jérôme Michon, Pierre-André et Éric Meylan, Gilles Pilloud.
  • Parc: 5 machines à vendanger tractées (1 Pellenc 3050, 1 Pellenc 8050, 3 Pellenc 8090).
  • Zone d’activité: La Côte (VD).
  • Surface vendangée: 150 à 200 hectares/année.
  • Vitesse de récolte maximum: 3-4 km/h, 5t/h avec tri mécanique.