Reportage
L’explorateur Raphaël Domjan a bâti une maison solaire à énergie positive

Une fois par mois, nous vous faisons découvrir des logements exemplaires sur le plan énergétique. Cette semaine, visite d’une villa rénovée qui produit de l’électricité et stocke du CO2, à Cortaillod (NE).

L’explorateur Raphaël Domjan a bâti une maison solaire à énergie positive

Avant, c’était une villa traditionnelle typique des années 1950. Mais ces derniers mois, cette bâtisse du quartier résidentiel de Cortaillod (NE) s’est métamorphosée. Son volume et sa capacité d’habitation ont plus que doublé, un étage a été ajouté et sa toiture a été recouverte de panneaux solaires, attirant l’attention du voisinage. C’est que son propriétaire n’est pas un maître d’ouvrage ordinaire: il s’agit de l’explorateur et conférencier Raphaël Domjan, connu pour, entre autres, le premier tour du monde en bateau à énergie solaire (lire l’encadré). «En parallèle de mes activités, je cherchais à agrandir et rénover une construction pour en faire une maison à énergie positive fiable, confortable et économiquement viable. Face au risque de panne de courant cet hiver, les futurs habitants n’ont aucun souci à se faire! L’idée était aussi de densifier le bâti aux portes des villes, afin de préserver la nature alentour», raconte-t-il en nous ouvrant les portes de la demeure récemment inaugurée.

Béton recyclé novateur
Composée de plusieurs pièces spacieuses et lumineuses, la première habitation occupe le rez-de-chaussée et le premier étage. D’ici à quelques semaines, une famille de quatre à cinq personnes investira les lieux. Si l’ossature est en bois, les dalles sont faites à partir d’un béton recyclé particulièrement écologique, dont le procédé de fabrication pointu a été imaginé par une start-up zurichoise. «Cette technologie pionnière permet d’éliminer le CO2 de l’atmosphère en le piégeant dans la matière. Ainsi, trois tonnes de gaz ont été stockées, diminuant l’emprunte carbone de la construction», se félicite le voyageur, qui a baptisé la maison «Raroia», du nom d’un atoll polynésien.

À l’étage, un autre appartement a été conçu pour un couple. Sur le pan sud du toit, une grande terrasse a été intégrée entre les panneaux solaires. «Pour emmagasiner un maximum d’énergie, j’ai dessiné une toiture asymétrique avec un côté sud beaucoup plus grand. À la base, cela n’était pas autorisé par la commune, mais grâce à ce projet précurseur, cela sera bientôt le cas», se réjouit l’architecte Christophe Farine. Par ailleurs, une station météo collecte en temps réel les données de production. «Pour s’en rendre compte, il faut aller dans le local technique au sous-sol, ma pièce favorite», confie Raphaël Domjan.

S’affranchir des charges
Ici, l’énergie solaire créée est indiquée sur un écran. «Notre objectif est de produire minimum trois fois plus que ce que nous consommons. À terme, ce surplus pourrait approvisionner les entreprises de la région», dit le Neuchâtelois. Cette électricité fait également fonctionner des sondes géothermiques afin d’assurer le chauffage. En été, il sera possible de refroidir l’atmosphère grâce à un simple bouton dans chaque pièce, en utilisant l’eau du forage. «Grâce à cette méthode appelée free cooling, il fera une température agréable en toute saison. C’est un beau cercle vertueux!» Pour l’eau chaude sanitaire, des panneaux solaires thermique ont été posés.

Mais combien ça coûte? «Entre 10 et 15% de plus qu’une maison classique. À terme, des économies importantes seront toutefois faites au niveau des charges. Nous devons tendre vers l’indépendance énergétique, surtout dans la situation géopolitique et climatique actuelle», estime l’aventurier. Selon lui, ce type de construction est prometteur, mais pas assez soutenu par la Confédération. «Je veux démontrer que ce projet n’est pas utopique. Il s’agit d’un mariage de techniques déjà existantes et efficaces. Nous devons dupliquer ce modèle à l’échelle des quartiers, voire des villes.»

Texte(s): Lila Erard
Photo(s): Matthieu Spohn

En chiffres

  • Août 2022, date d’inauguration.
  • 2 appartements et un local technique sur 280 mètres carrés.
  • 75 panneaux solaires sur la toiture.
  • 4 sondes géothermiques à 60 mètres de profondeur.
  • 25’000 kWh d’énergie photovoltaïque produite et 1000 kWh pour le thermique.
  • 20 tonnes de CO2 stockées dans la structure.
  • 20’000 km par année possible en voiture électrique grâce à l’énergie solaire.

Les concepteurs

Explorateur et conférencier, Raphaël Domjan a effectué l’expédition en catamaran PlanetSolar de 2010 à 2012, et a lancé le projet SolarStratos, premier avion solaire stratosphérique. Pour la construction de Raroia, il a fait appel à l’architecte Christophe Farine, son ami d’enfance, basé à Valangin (NE), qui est spécialisé dans les rénovations de bâtiments anciens.

+ d’infos www.raphaeldomjan.com