Animaux
Le sanglier d’Europe, ce tout-terrain à l’aise dans la forêt comme en ville

Visionnez sur notre chaîne YouTube le nouvel épisode du «Marronnier». Imaginée par le journaliste genevois Witold Langlois, cette série décrypte chaque mois le comportement des animaux de chez nous.

Le sanglier d’Europe, ce tout-terrain à l’aise dans la forêt comme en ville

Si on le trouve dans de nombreux milieux naturels et même en ville, c’est au beau milieu de la forêt, idéalement à proximité d’un point d’eau entouré de hautes herbes ou de roseaux, que ce mammifère appartenant à la même famille que le porc domestique est le plus à l’aise. Pendant la journée, il dort dans un creux douillet appelé «bauge» ou «remise». Au crépuscule, les sangliers se regroupent sans pour autant se dévoiler complètement. Ils errent toute la nuit dans les bois, franchissant clairières et ruisseaux à la recherche de nourriture. Fouillant le sol avec son groin, l’animal se délecte aussi bien de baies, de vers et d’insectes que de tubercules ou de champignons. Opportuniste et omnivore, il ne dédaigne pas de temps à autre une carcasse, que ce soit celle d’un oiseau ou d’un lièvre, pour se remplir la panse.

Traces et indices

Très discret malgré une taille imposante (le mâle peut atteindre une longueur de
2 mètres pour 150 kilos), le sanglier est une espèce particulièrement difficile à observer. Les automobilistes qui roulent à travers la forêt l’aperçoivent parfois de façon fugace dans la lueur des phares. Les rencontres face à face sont, elles, bien plus rares. En revanche, de jour, le promeneur peut aisément reconnaître le passage du suidé: empreintes de sabot typiques, «laissées» (excréments) en formes de saucisses agglomérées ou encore nombreuses zones de terre retournées dites «boutis» ou «vermillis». Autre indice: on trouve parfois au sol ou accrochées à l’écorce des arbres des soies, ces poils qui vont du gris foncé au noir et qui se terminent par deux petites pointes caractéristiques.

Société matriarcale

Les sangliers vivent en grandes hardes menées par les femelles, qu’on reconnaît à leur taille imposante et à leur pelage plus sombre. Dans cette société matriarcale, ce sont elles qui commandent! Les jeunes, c’est-à-dire les marcassins de 2 à 3 ans de même que les bêtes rousses de 3 à 4 ans, suivent la meneuse au pas. Cette dernière peut se montrer agressive si elle décèle une présence menaçante à proximité. Qu’il s’agisse d’une bête sauvage ou d’un promeneur, elle n’hésitera pas à le charger pour l’éloigner de ses petits. Durant la journée, la joyeuse troupe se détend en se nettoyant dans des souilles. Les bains de boue permettent aux sangliers de se débarrasser de toutes sortes de parasites comme les tiques, les puces et autres poux qui prolifèrent dans leur pelage. Ces indésirables sont figés dans la boue séchée puis décollés lorsque l’animal se frotte contre un tronc. La boue sert aussi de carapace ou de cuir qui agit comme une barrière contre les moustiques, les guêpes et autres insectes piqueurs.

Le mâle, ce solitaire

À l’âge adulte, le mâle vit loin des hardes composées de femelles. Il ne revient vers le groupe que pour se reproduire. Jeune, le sanglier mène une vie sociale normale au sein de la communauté. L’émancipation, qui survient avant l’âge de 2 ans, le voit passer du statut d’animal grégaire à solitaire. Les jeunes mâles sont généralement chassés de la troupe au moment du rut par le retour des mâles dominants, afin de limiter la rivalité pour l’accès aux femelles. Parfois ce sont les femelles elles-mêmes qui les poussent en dehors de la bande de façon à éviter des problèmes de consanguinité.

Pas en danger

Il n’y a pas de souci à se faire en ce qui concerne les populations de sangliers. Elles sont en constante augmentation, à tel point que l’animal est considéré comme nuisible dans plusieurs régions de Suisse. Le nombre d’individus, aussi bien à l’intérieur de nos frontières que dans les pays européens, a été multiplié par cinq en moyenne au cours des vingt dernières années. Le taux de croissance d’une population peut atteindre 200% par an en fonction de l’abondance de nourriture et des conditions climatiques! Par ailleurs, le sanglier n’a aucun prédateur, excepté le loup et l’homme. S’il vit surtout en forêt, il fait des incursions de plus en plus fréquentes dans les champs qui lui offrent du blé, du colza et de la moutarde en abondance, ce qui lui vaut l’inimitié de nombreux agriculteurs. À noter que la chasse contribue à la hausse du nombre de sangliers. Les périodes où les prélèvements sont autorisés ont été raccourcies. De plus, les chasseurs ne tirent pas les jeunes laies ni les marcassins, ce qui a pour effet de dynamiser les populations.

Texte(s): Witold Langlois
Photo(s): DR