Parmi les médecines complémentaires destinées aux animaux de rente, ce soin énergétique convainc de plus en plus d’exploitants. Accessible à tous, elle demande d’abord de considérer l’animal comme un être conscient.

«Il y a clairement eu un avant et un après à l’étable, dès lors que nous avons commencé à pratiquer le reiki sur nos vaches laitières.» Depuis qu’ils se sont formés à cet outil thérapeutique venue du Japon (lire l’encadré ci-dessous), il y a quatre ans, Séverine Clémence et son mari prodiguent au quotidien ce type de soins à leur nonantaine de bovins. «L’atmosphère, les frais vétérinaires, notre rapport aux bêtes, notre qualité de vie: tout a changé d’un jour à l’autre», raconte l’agricultrice française basée dans le Doubs, qui se considérait jusqu’alors comme une personne «pas spécialement tournée vers l’ésotérisme et les médecines alternatives».
Donner avec son cœur
C’est l’envie de ne plus administrer autant d’antibiotiques à son troupeau qui a poussé le couple à explorer d’autres pistes. Il a ainsi suivi plusieurs modules de formation dédiés aux agriculteurs auprès de Nelly Tisserand, maître reiki franc-comtoise, qui intervient désormais régulièrement dans les campagnes romandes à la demande de Proconseil. «Nous traitons les boiteries, les mammites, les verrues, les veaux qui peinent à boire, les mise-bas qui traînent ou bien carrément le troupeau en entier, lorsqu’il est un peu trop agité», témoigne l’agricultrice.
Le reiki ne passe pas par la manipulation corporelle, mais consiste en une approche holistique et énergétique de la bête. «Cette méthode ne nécessite aucune prédisposition particulière, elle fait davantage appel au savoir-être qu’au savoir-faire. Elle se révèle accessible à tous et s’acquiert en relativement peu de temps», assure Jean-Luc Oberson, spécialiste en production animale chez Proconseil, qui s’est lui-même formé et organise des sessions chez des paysans.
«Le reiki exige d’abord un travail sur soi, et requiert une certaine attitude envers soi-même et autrui, développe Nelly Tisserand, qui a déjà formé plusieurs centaines d’agriculteurs en Franche-Comté et Bretagne. Concrètement, il s’agit surtout d’avoir envie de donner avec son cœur.» Séverine Clémence, elle, n’hésite pas à évoquer une véritable révolution intérieure dès lors qu’elle a abordé cette pratique: «J’ai aussitôt modifié la façon dont je considérais mes animaux: je les ai vus comme des individus dotés d’une sensibilité et capables de ressentir les choses. En somme, je leur ai donné un autre statut.»
Pour Nelly Tisserand, ce changement de paradigme est un point central. «Accepter que l’animal est un être conscient est primordial, insiste-t-elle. En lui donnant une identité propre, on le reconnaît pleinement. Tout commence là.» Et de rappeler l’importance de parler à ses bêtes, de verbaliser ce qu’il se passe. «Il faut expliquer à une vache que si on la laisse attachée au cornadis en attendant l’inséminateur, c’est parce qu’elle est en chaleur et qu’elle pourra bientôt rejoindre le troupeau parti à l’herbe provisoirement sans elle.»
Aucune prédisposition requise
L’observation profonde et entière de la bête va permettre de comprendre ses attitudes en fonction de son histoire et de son environnement. «Une vache qui peine à monter en lait peut avoir été marquée par une séparation difficile avec son veau. On peut l’aider, d’abord en lui parlant, puis en lui prodiguant un soin énergétique.» Quelques bases pratiques doivent ensuite s’acquérir. «Il s’agit d’apprendre à augmenter son niveau de sensibilité, à laisser plus de place à l’intuition, et surtout à ne pas mentaliser l’acte», assure Jean-Luc Oberson.
Lors des formations, Nelly Tisserand enseigne donc aux participants à se centrer, se concentrer, à reconnaître leur potentiel de vecteur énergétique et à transmettre, à l’aide de leurs mains, l’énergie tel un fluide. Dans un deuxième temps, les stagiaires apprennent à se connecter à l’animal, que ce soit en contact direct ou à distance, et à percevoir son ressenti pour comprendre l’origine de la pathologie. «Une boiterie ne tire pas forcément son origine d’un problème à la patte. Elle peut être due à un dysfonctionnement digestif, confirme Séverine Clémence. Il faut suivre son intuition, et se laisser guider.»
Accompagner la fin de vie
Toujours par la force de la pensée, avec éventuellement l’intervention des mains qu’on appose sur l’animal, on en vient enfin au soin en tant que tel. «L’énergie apportée stimule l’autoguérison, le corps va se l’approprier», explique Nelly Tisserand. Ainsi, le reiki ne vient pas nécessairement traiter directement un symptôme physique, mais libère les causes à l’origine des blocages ou maladies, en dirigeant les flux énergétiques là où ils sont nécessaires. «L’énergie agit sur tous les plans, corporels comme émotionnels», précise la thérapeute.
Cette méthode, indiquée en cas de problèmes comportementaux, s’avère particulièrement recommandée pour accompagner les bouleversements, tels que vêlage, séparation du veau, départ pour l’alpage, fin de vie ou départ pour l’abattoir. «Pouvoir assister un animal dans ses derniers instants de vie, le remercier pour ce qu’il a produit et nous a apporté, lui procure un réel soulagement. Il partira plus sereinement.»
Cela renforce aussi les défenses immunitaires, ou traite les problèmes liés à la hiérarchie au sein du troupeau. «Le reiki ne remplace pas le vétérinaire, précise Nelly Tisserand. Mais il permet aux agriculteurs formés de ne pas se trouver démunis en cas de problème.» Séverine Clémence le reconnaît volontiers: «Nos frais vétérinaires ont fondu. En quelques années, j’ai atteint mon objectif premier, qui était de diminuer le recours aux antibiotiques. Mais surtout, j’ai désormais l’impression de vivre en osmose avec mon troupeau.»
+d’infos nellytisserand@live.fr
Une approche différente
Développé par le Japonais Mikao Usui au début du XXe siècle, le reiki se définit comme une méthode de guérison, mais aussi un outil de développement personnel et spirituel, «rei» signifiant l’esprit et «ki» se référant à l’énergie. Lors d’un soin, le praticien passe l’énergie par ses mains. «Mais il ne transmet pas la sienne et ne prend pas celle de son patient ni ses maux, prévient Nelly Tisserand. On ne peut pas faire de mal ni se tromper, car on sert uniquement de canal.» Initialement destinée aux humains, cette approche peut être dispensée à toute autre forme de vie. «Le reiki travaille avec les flux énergétiques et permet de rééquilibrer ou d’apporter ce flux là où l’organisme en a besoin», poursuit la formatrice. Si cette pratique se prête particulièrement bien aux animaux, c’est parce que ceux-ci, à la différence des humains tentés par la mentalisation, ne doutent pas ni ne cherchent à comprendre le fonctionnement de la méthode. «Ils prennent ce qu’ils reçoivent instantanément, s’ils en ont besoin», affirme Nelly Tisserand, qui relève encore la complicité des bêtes lors des soins qu’elle pratique dans les fermes. «Elles vont par exemple me montrer les zones à traiter en changeant de position ou partir si elles ne ressentent pas la nécessité d’un soin.»
+ d’infos Proconseil organise régulièrement des formations au reiki. Jean-Luc Oberson,
tél. 021 905 95 50 j.oberson@prometerre.ch