Innovation
Le projet d’huilerie artisanale d’antan plébiscité

Terre&Nature s’allie à la plateforme de financement participatif pour l’agriculture Yes We Farm. Chaque mois, le projet préféré des lecteurs sera présenté dans ces colonnes et recevra un coup de pouce financier.

Le projet d’huilerie artisanale d’antan plébiscité

Redonner vie à des machines créées il y a trois siècles, pour réapprendre les gestes et le savoir-faire des anciens: l’idée du Moulin de Veyron, à Chavannes-le-Veyron (VD), a ravi les lecteurs de Terre&Nature, qui l’ont désignée projet du mois de mai.

Initié par Jean-Baptiste et Mélanie Caillat, il prévoit la création d’une huilerie artisanale dans un lieu unique, laissé à l’abandon depuis une soixantaine d’années. Le couple, souhaitant s’installer pour de bon dans le petit village vaudois au pied du Jura, a acquis ce bâtiment en 2008, alors qu’il était en ruine. Murs délabrés, toiture écroulée, cette ancienne scierie, fonctionnant grâce à la force du Veyron voisin, les a séduits et même inspirés.

En plus d’y avoir aménagé son logement, la famille Caillat a choisi de reconstruire une forge au rez-de-chaussée, à l’emplacement qu’elle occupait déjà au siècle passé. «Autrefois, elle servait à faire des fers à cheval, aujourd’hui elle est utilisée pour créer des couteaux», raconte Jean-Baptiste. À l’opposé du bâtiment, les produits concoctés sur place sont stockés non loin du pressoir. Sur les étagères longeant les murs, les pots de sauce tomate cuite au feu de bois côtoient ceux de raisinée de pommes, de poires ou de coings, ainsi que les bouteilles de sirop de sureau.

Dans le respect des anciens
Ne voulant pas dénaturer les lieux, les Caillat ont choisi de conserver les roues et les rouages des impressionnantes machines d’antan – parfois classées pour leur intérêt patrimonial national – à leur place d’origine. Raison pour laquelle une énorme scie trône aujourd’hui près de la porte d’entrée de leur appartement. Pour occuper la dernière pièce vide de la maison, entre la forge et le pressoir, le couple a imaginé créer une huilerie artisanale, en ne transformant que les noix provenant du village voisin de La Chaux. «On vend nos produits dans une quinzaine de marchés de la région, explique Mélanie Caillat. On s’est dit qu’ajouter de l’huile de noix pressée à froid compléterait à merveille notre assortiment.»

Les anciennes presses à huile étant introuvables en Suisse, Jean-Baptiste a dû se rendre en France – en Auvergne et jusqu’à Nantes – pour en ramener deux lourdes machines ancestrales en fonte, en granit et en chêne; des pièces uniques qui ont d’ailleurs failli se retrouver dans un musée et qu’il doit maintenant entièrement restaurer. «Les anciens avaient tout compris, commente ce grand bricoleur. Malheureusement, leur savoir-faire a peu à peu disparu.» Alors que la recherche de fonds bat son plein (30000 francs sont nécessaires pour installer la meulière et restaurer la presse, entre autres travaux), il a sorti ses crayons pour dessiner les plans des deux géants, dont l’assemblage nécessite beaucoup d’anticipation… et l’usage d’outils aux dimensions inhabituelles, comme des clés plates capables de serrer des boulons de plus de 30 kilos.

Du travail en perspective
Cette technologie tricentenaire, «il va falloir apprendre à l’utiliser, reconnaît Jean-Baptiste Caillat, prêt à relever le défi. Peut-être que l’on devra fabriquer nos propres instruments pour y parvenir.» Fervent opposant à l’obsolescence programmée, ce meunier autodidacte, forestier de métier, espère donner une seconde jeunesse à ses machines d’ici la fin de l’année, afin de pouvoir presser les premières noix début 2021. Il a d’ailleurs déjà acquis un appareil pour casser les coquilles par milliers et débarrasser les cerneaux de leurs impuretés à 80%. Le reste du tri se fera à la main, avec une bonne dose d’huile de coude. «Nous ne presserons que les noix provenant d’un seul producteur, pour être certains de leur traçabilité, note-t-il. L’opération se fera à froid pour conserver les saveurs des noix, qui font partie du patrimoine vaudois.»

+ D’infos www.moulinduveyron.ch. Rendez-vous sur www.terrenature.ch/yes-we-farm pour voter pour votre projet préféré et tenter de gagner un cadeau surprise par tirage au sort! Les votes sont ouverts jusqu’au 18 juin inclus. Retrouvez, dans notre cahier «Les pros de la terre» du 25 juin, un reportage sur le projet lauréat.

Texte(s): Céline Duruz
Photo(s): Céline Duruz