Reportage
La télévision française vient conter fleurette aux éleveurs de Swiss Expo

La société de production de L’amour est dans le pré a arpenté l’exposition bovine qui s’est tenue à Genève la semaine dernière, pour trouver des candidats suisses prêts à participer à l’émission. Du jamais vu en 14 saisons!

La télévision française vient conter fleurette aux éleveurs de Swiss Expo

«Est-ce que vous avez plus de 30 ans? Êtes-vous célibataire?» La semaine dernière, deux chargées de casting de L’amour est dans le pré ont parcouru Swiss Expo à Genève durant deux jours à la recherche de candidats pour la prochaine saison de l’émission de la chaîne française M6. «Notre mission est simple: trouver un agriculteur ou une agricultrice suisse prêts à participer, explique Anne Thomas, de la maison de production Fremantle. En quatorze ans, ce n’est jamais arrivé. C’est fou quand même!»

Une mission impossible?
Si quelques prétendants ont gaillardement franchi la frontière pour trouver l’âme sœur avec plus ou moins de réussite (voir l’encadré ci-dessous), ce n’est pas le cas des paysans suisses. La maison de production Fremantle a donc décidé d’aller à leur rencontre mercredi et jeudi dernier. Mais dans les travées de Palexpo, leur mission s’est avérée plus ardue que prévu. «Je ne pensais pas qu’il y avait autant d’éleveurs étrangers inscrits à ce concours alors je continue mes recherches», constate Émeline Gay, chargée de sélection, les prospectus de l’émission à la main. Ne se décourageant pas, elle aborde sans relâche les paysans occupés à dorloter leurs vaches, même à l’heure de la traite, toujours un grand sourire.

Des blagues à la réalité
Les candidats potentiels sont rares. La plupart des éleveurs approchés sont déjà en couple, quand ils ne sont pas mariés. Trouver des francophones qui plus est au milieu des participants alémaniques n’est pas une mince affaire, sans compter le fait qu’il y a encore d’autres critères à remplir avant d’espérer figurer dans la célèbre émission. «On cherche des personnes de 30 ans minimum, avant ils n’ont pas besoin de notre aide pour trouver un partenaire, estime Anne Thomas, qui occupe ce poste depuis dix ans. Il faut être célibataire évidemment et surtout sincère dans sa démarche.»
Forte de son expérience, elle sait que, souvent, ce sont les amis ou la famille des agriculteurs esseulés qui contactent la production, les principaux concernés n’osant franchir le pas. Alors elle accoste tout le monde, jeunes et dans la force de l’âge. «Le célibat est aussi un problème dans notre profession, c’est sûr, confirme l’éleveur de holsteins vaudois Patrick Demont, lui-même marié. C’est sympa qu’ils viennent ici. On verra peut-être bientôt les beaux paysages de chez nous à la télé!»

Près de vingt jours de tournage
Flattés par la démarche, les éleveurs livrent parfois un nom, avec beaucoup de retenue, un peu de gêne aussi. D’autres donnent les coordonnées d’un ami, certains pour lui faire une blague. «Ça arrive souvent, poursuit Anne Thomas, inscrivant consciencieusement les informations. Qu’importe, j’appelle quand même les personnes que l’on m’a recommandées et parfois cela fait mouche.» Jeudi soir, Anne et Émeline sont reparties à Paris avec vingt numéros de téléphone et dix formulaires de postulation, remplis sur le site internet de la manifestation. Elles passeront les jours suivants à donner des coups de fil, espérant tomber sur la perle rare.
Un agriculteur suisse figurera-t-il au générique de la prochaine saison? Rien n’est moins sûr. En France, si près de 400 candidats se lancent dans l’aventure chaque année, la production n’en sélectionne au final qu’une dizaine. La prise de contact à Swiss Expo n’est donc que le début d’un long processus. «Avoir un double emploi, comme être à la fois producteur de lait et responsable de damer les pistes de ski de son village, n’est pas un obstacle, au contraire! Mais l’élevage, la viticulture ou que sais-je doit primer le second travail, souligne Anne Thomas, espérant trouver un Helvète qui soit paysan de montagne. Nous nous assurerons ensuite que les futurs prétendants puissent être accueillis dans leur ferme sans problème.»
Finalement, la chaîne M6 a le dernier mot. Une fois le candidat validé, tout va très vite. L’aventure commence par le tournage de leur portrait, continue avec la réception des prétendants puis les speed datings. «On compte une vingtaine de jours de tournage par agriculteur pour une saison, ajoute Anne Thomas. Si on réfléchit bien, ce n’est pas tant que ça pour trouver l’âme sœur!» L’émission sera diffusée dans quelques mois, à la rentrée d’automne. Avec ou sans Suisse.

+ D’infos Si vous êtes agriculteur et avez envie de participer à cette émission, contactez Anne Thomas au +33 146 62 39 02 ou à l’adresse suivante: anne.thomas@fremantle.com

Texte(s): Céline Duruz
Photo(s): Nicolas Righetti/DR

Questions à...

Emmanuelle Bonnand, participante suisse lors de la saison 5
Qu’est ce qui vous a poussée à écrire à Yoann?
Je l’ai trouvé charmant à la télé, ma maman m’a encouragée à participer. Je travaillais à Étoy (VD); j’étais bien, mais il me manquait quelque chose. Je lui ai écrit, il a été immédiatement séduit. On fête cette année nos dix ans de vie commune. On est mariés et on a eu deux filles. Il est toujours aviculteur et céréalier dans le Loiret. Moi, j’ai lancé un food truck pour mettre en valeur les produits de la ferme et de la région. Nous sommes complémentaires!
Le fait d’être filmés n’a-t-il pas compliqué votre histoire?
L’émission était moins connue à l’époque. C’est un divertissement, mais cela reste très humain. Sur le moment, il m’est arrivé de me sentir étouffée, Yoann a demandé à la
production de nous laisser parfois seuls. Ils comprennent bien la situation.
Quels conseils donneriez-vous aux candidats?
Lancez-vous, mais pour les bonnes raisons. Ça peut ne pas marcher, mais c’est comme au loto, 100% des gagnants ont participé! Si on ne trouve pas l’amour, on se fera au moins des amis. Il faut postuler pour soi, pas pour valoriser son métier.

Un joli bilan

En quatorze ans, 170 agriculteurs et agricultrices ont accepté de se faire filmer dans leur ferme aux quatre coins de la France. Les candidats, qui sont des centaines à contacter la production chaque année, passent par une sélection sévère, comme leurs prétendants d’ailleurs. Si les déceptions sont parfois au rendez-vous, L’amour est dans le pré a aussi provoqué de belles rencontres. Grâce à cette émission de télévision, seize mariages ont été célébrés; soixante couples se sont formés à ce jour et 54 enfants sont nés de ces unions.
+ D’infos Sur la page Facebook de l’émission, www.facebook.com/LAEDLP