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Le cidre Wildhorn se veut local, bio et écolo

innovation Terre&Nature s’allie à la plateforme de financement participatif pour l’agriculture Yes We Farm. Chaque mois, le projet préféré des lecteurs sera présenté dans ces colonnes et recevra un coup de pouce financier.

Le cidre Wildhorn se veut local, bio et écolo

Dans une petite cave de Montana (VS), près de 2500 litres de cidre sommeillent dans des cuves, attendant d’être dégustés. «C’est bientôt l’heure de la mise en bouteille. Mais d’abord, il faut rassembler des fonds pour acheter les contenants, les bouchons et les étiquettes, expose Gauthier Rey, le maître des lieux. C’est pour cela que j’ai lancé un crowdfunding (ndlr: financement participatif).» En février dernier, cet étudiant à la Haute École de gestion de Sierre s’est inscrit sur la plateforme Yes We Farm pour transformer son rêve en réalité: professionnaliser sa production et commercialiser ses premières cuvées. «Il est important de prendre la température auprès des consommateurs et de les inclure dans le processus de création, avant de proposer un produit. Pour l’instant, je n’ai eu que de bons retours!»

Avec des pommes déclassées
Spécialisé dans le domaine du service et détenteur d’un diplôme de bar manager, Gauthier Rey a d’abord exercé son métier à Dublin, en Irlande, puis à Genève, avant de revenir dans son Valais natal. C’est alors qu’il a découvert les subtiles saveurs de ce breuvage doré et a décidé de se lancer. «En bon Valaisan, j’adore le vin et j’avais suivi de près le développement des microbrasseries en Suisse, relate-t-il. Le cidre est une boisson qui s’inspire de ces deux mondes et qui permet d’être tout aussi créatif.» Ni une ni deux, il a acheté ses premières cuves, quelques kilos de pommes et a glané des informations dans des livres et auprès de vignerons de la région. «Mais mes premiers essais furent catastrophiques. À peine dignes de finir en vinaigrette! se marre-t-il. Ensuite, j’ai fini par affiner ma technique.»
Baptisé Wildhorn, son nectar fermenté peut se targuer d’être 100% local. En plus de se fournir auprès d’arboriculteurs bios des régions de Sierre, Sion et Conthey, le jeune homme de 26 ans met un point d’honneur à n’utiliser que des fruits déclassés. «Il s’agit de pommes difformes, hors calibre ou abîmées, qui sont recalées par la grande distribution. Les récupérer permet d’offrir un nouveau débouché aux exploitants, tout en proposant un produit à un prix qui se veut le plus abordable possible. Et le goût n’est en rien altéré!» Parmi les pommes sélectionnées, les variétés anciennes telles que la diwa et la canada sont idéales, car elles regorgent d’un puissant concentré d’arômes. «Mais je ne suis pas un spécialiste, s’empresse d’ajouter cet autodidacte complet, qui s’adonne à sa passion en dehors de ses heures de cours. Je croque pour m’imprégner du goût, de l’acidité et de la texture et puis je choisis. Tout est une question d’instinct et d’équilibre.»

Authenticité avant tout
Une fois acheminés jusqu’à la cidrerie, les fruits sont nettoyés puis triés à la main, afin de retirer toute moisissure. «C’est une étape importante, car un seul oubli peut gâcher une cuvée. Il faut être attentif», met en garde l’artisan, qui fait appel à plusieurs bénévoles pour l’aider. «Nous organisons ensuite un repas et chacun repart avec du jus. J’aime cette convivialité.» Vient alors l’étape du broyage, suivi du cuvage afin de faire réagir une première fois la pulpe de pomme à l’oxygène. Le jus est ensuite obtenu à l’aide d’un pressoir hydraulique, «pour limiter l’impact carbone de la production». Enfin, le breuvage est mis en cuve durant plusieurs mois. «Pendant cette période de fermentation, je laisse agir les levures naturelles qui sont déjà présentes sur le fruit. J’évite aussi d’ajouter des sulfites, tout en surveillant régulièrement le taux de sucre et d’alcool.»
L’automne prochain, Gauthier Rey prévoit de produire plus de 10 000 litres de cidre, grâce à environ vingt tonnes de pommes. Deux types de boissons seront commercialisés: le cidre demi-sec et le sec, pouvant contenir jusqu’à 7% d’alcool. À terme, deux autres produits – un cidre doux et un sans alcool – pourraient aussi voir le jour. «Toutefois, je ne veux pas de standardisation. Chaque cuve réagit différemment et c’est cette surprise qui fait la beauté de l’artisanat. L’important est la complexité des goûts.» Pour le moment, le Wildhorn a conquis les palais de plusieurs restaurateurs et clients, qui ont déjà passé des commandes. Des épiceries fines se sont également montrées intéressées. «Il y a un bel engouement», sourit celui qui a investi 10 000 francs de sa poche pour lancer sa production. D’ici la fin de l’année, il compte déménager dans une cave plus grande, à Chermignon (VS), afin d’accueillir comme ils le méritent les consommateurs qui l’ont soutenu depuis ses débuts.

+ D’infos Rendez-vous sur www.terrenature.ch/yes-we-farm pour voter pour votre projet préféré! Les votes sont ouverts jusqu’au 16 avril inclus. Retrouvez, dans notre cahier «Les pros de la terre» du 30 avril, un reportage sur le projet que vous aurez choisi.

Texte(s): Lila Erard
Photo(s): Céline Ribordy