Portrait
Cette Anglaise dessine des jardins enchanteurs au rythme de la nature

Architecte paysagiste originaire de Liverpool, Hester Macdonald sublime les plates-bandes de ses clients grâce à sa British touch, sur les bords du Léman. Le mois dernier, elle a publié son premier livre, Gardens.

Herbes folles, glycine rebelle, graminées sauvages et tulipes à la pelle. Le jardin de notre hôte est tout à son image: coloré, naturel et chaleureux. «Et surtout relax!» ajoute-t-elle avec un accent British assumé. «Quand je suis arrivé dans cette maison, les voisins ne comprenaient pas pourquoi je n’alignais pas mes rosiers. Je leur ai tout simplement expliqué que c’était mon style!» s’exclame Hester Macdonald. Le jardin à l’anglaise, romantique et végétal, c’est ce que propose à ses clients cette architecte paysagiste à la tête de sa petite entreprise, HM Garden Design, depuis près de quinze ans.
Le mois dernier, cette quadra originaire de Liverpool a publié son premier livre, Gardens. Elle y présente les 52 plus beaux jardins de Suisse, sa patrie d’accueil, qu’elle chérit profondément. «La plupart des habitants n’ont pas conscience de ce patrimoine fabuleux. Pourtant, ces lieux méritent tout autant d’attention que les parcs allemands ou anglais, bien connus des touristes. Avec cet ouvrage, je souhaite faire découvrir au plus grand nombre ces précieux espaces où la nature est reine.» Pour sélectionner ses jardins favoris, cette grande voyageuse a sillonné le pays en train à la recherche des perles rares. «C’était très prenant, mais il y a pire comme métier», glisse-t-elle en souriant.
Son coup de cœur: le MFO Park, à Zurich, une ancienne imprimerie dont la structure en métal a été recouverte de plantes grimpantes. Au sol, du verre recyclé draine l’eau de pluie. «Moderne, précis et créatif. So Swiss! C’est une structure osée, qui respecte l’histoire du lieu.» Elle admire également la roseraie du Diable Vert, à Bex (VD), sublimée par diverses œuvres d’art disposées dans les bosquets. «Je m’inspire souvent de ces créations pour satisfaire mes clients. Mais je n’oublie pas mes racines.»

La poésie des plates-bandes
Née d’une mère irlandaise microbiologiste et d’un père féru de botanique, Hester Macdonald grandit dans une maison victorienne au jardin pittoresque. En toile de fond, la mer et les montagnes galloises. Pelle et pioche à la main, la jeune fille a la main verte. Les formes alambiquées des cactus la fascinent. «Chez nous, tout poussait facilement! Nous utilisions le fumier des chevaux comme engrais. La terre était riche et fertile. En grandissant, je me suis rendu compte que tout le monde n’avait pas cette chance.» À la fin de son adolescence, elle intègre l’Université de Cambridge en lettres, sans pour autant mettre de côté son amour des plantes. «En y repensant, je pense avoir choisi cette école pour ses parcs, qui sont fantastic!» Et qui semblent avoir influencé le sujet de sa thèse: les jardins et la poésie selon Vita Sackville-West, célèbre romancière et jardinière britannique du XXe siècle. «J’aimais la nature, mais à cette époque, je n’aurais jamais pensé en faire mon métier.»
Cette blonde aux yeux rieurs et au tutoiement facile se lance alors dans le marketing au sein d’une multinationale américaine. «Une expérience enrichissante», se rappelle-t-elle, et l’occasion de se rapprocher de son collègue et petit ami, Angus, avec qui elle partage sa vie aujourd’hui. «Lorsqu’il a été muté en Suisse, j’ai décidé de reprendre des études d’architecte paysagiste par correspondance, tout en m’occupant de nos deux enfants.» Francophone depuis son plus jeune âge, cette polyglotte jongle aisément entre sa vie de famille et la recherche de nouveaux clients, aux quatre coins de la Romandie. Dans sa maison située à Versonnex (F), aux portes de Genève, Hester Macdonald s’épanouit.

Patienter et savoir écouter
Si son métier consiste à assembler harmonieusement vivaces, herbacées et arbustes, l’humain reste au cœur du projet. La designer parle même de psychologie, tant la relation avec ses clients est importante. «Il s’agit de comprendre leurs besoins et leurs envies afin de réaliser le jardin idéal. Je dois en quelque sorte m’inviter dans leur vie.» À quelle heure rentrez-vous du travail? Voulez-vous avoir des enfants? Arroser tous les jours, ça vous dérange? Voilà les questions qu’Hester Macdonald s’autorise à poser pour garantir la santé de ses jardins et le bonheur de ceux qui s’y prélassent. Des arbres pour la structure, des chemins pour déambuler et un bel horizon, pour laisser l’esprit divaguer. «À chaque saison sa beauté», aime-t-elle répéter. Les ingrédients sont simples et le résultat bluffant. Le somptueux jardin genevois de 2500 m2 de la famille Prach, qui a fait appel à ses services, en témoigne.
D’un dynamisme à toute épreuve, celle qui est aussi soprano dans un chœur et guide au château de Prangins (VD) anime l’émission de jardinage «Dig It!», sur la World Radio Switzerland, destinée aux anglophones de la région. Les novices peuvent aussi compter sur ses conseils avisés lors de ses cours à la Swiss Gardening School, qu’elle a fondée il y a huit ans avec sa collègue Tara Lissner. «Que vous ayez une terrasse, une ferme ou un jardin, Hester sera toujours intéressée par votre histoire, assure celle qui est aussi son amie de longue date. Elle épouse le rythme de la nature et la magnifie, sans l’entraver. Sa patience sans faille est la clé.»

+ D’infos www.hmgardendesign.com

Texte(s): Lila Erard
Photo(s): Guillaume Mégevand

Son univers

Une plante
La rose. «Sa beauté et son parfum sont ma plus belle récompense.»
Un chanteur
David Bowie. «Ses mélodies ­poétiques sont idéales pour jardiner.»
Un objet
Un sécateur. «Ceux de marques suisses sont incassables, je m’en sépare rarement.»
Un livre
Les bienfaits magiques des arbres, de Stéphane Krebs. «J’ai découvert leur manière de communiquer et de se défendre. ­Passionnant!»