Soirée cocooning
Soirée cocooning

Zut ! J’ai oublié de prendre les ronces. A peine mon barda déposé dans l’atelier, de retour d’un après-midi sur le terrain, que me voilà reparti vers les bords du Rhône pour prélever quelques tendres feuilles et me piquer les doigts.

Dans « Incroyables phéromones» paru en avril, je vous ai raconté l’expérience menée avec une femelle de petit paon de nuit, utilisée pour attirer un mâle. Après l’accouplement, durant la nuit, elle a pondu ses œufs dans sa cage. Quinze jours plus tard, j’ai assisté à la naissance des chenilles et dès lors, tous les jours, je suis de corvée « cueillette » pour nourrir mes pensionnaires.

Au début, elles grignotent le bord des feuilles et ne grossissent pas très vite, mais arrivées à la dernière mue, elles se baffrent à longueur de journée ce qui nécessite un apport régulier de feuilles.  Des 45 petites chenilles noires et poilues du début, seules deux ont survécu et passé les cinq stades qui les amènent à la nymphose.

Elles mesurent aujourd’hui presque huit centimètres, sont d’une belle couleur verte et dans un bandeau noir, un chapelet de petites verrues jaunes et poilues ceint chaque segment boudiné du corps. Un régal pour le dessinateur !

Arrivé à la maison, je m’empresse donc de les nourrir et constate pour la première fois qu’une des deux chenilles n’est pas accrochée à une plante. Elle arpente le sol.  Après avoir tourné un long moment dans les branches, copeaux et écorces disposés à son intention, elle se fixe et ne bouge plus. Une observation attentive à la loupe me permet de constater la présence de menus fils scintillants qui sortent de sa bouche.

Après le souper familial, nous observons encore un moment la chenille qui tisse sous nos yeux. Elle disparaît peu à peu dans l’ouvrage qui prend forme, mais comme elle s’octroie de longues pauses, je me retrouve assez vite seul à veiller à la lumière du salon. Un peu avant quatre heures du matin, terrassé par la fatigue, je vais me coucher moi aussi.

A mon réveil, le cocon est tissé et la chenille a disparu. A l’abri de nos regards, elle va maintenant opérer sa lente métamorphose pour devenir au printemps prochain un petit paon de nuit…

Texte(s): Pierre Baumgart
Photo(s): Pierre Baumgart