Prendre le temps de construire low-tech et local
Prendre le temps de construire low-tech et local

Çà y est, on a enfin déniché une varlope ! Cela faisait un bon moment qu’on la cherchait dans une brocante, cette espèce de rabot à longue semelle utilisé autrefois pour dégauchir les poutres: il remplace déjà avantageusement -pour nos oreilles et celles des voisins- la version électrique et son effroyable potin. Christian rayonne, pieds nus dans les copeaux et assis sur la énième poutre qu’il équarrit inlassablement. Depuis décembre, les fûts d’épicéas que nous ramenons à chaque bonne lune de la forêt voisine subissent tous le même sort (lire billet du 7 janvier) : les coups de hache, de machette et maintenant de varlope s’enchaînent jusqu’à ce que la poutre puisse être hissée, avec une corde et à la force des bras, à la place que mon bricoleur de mari lui a attribué dans la charpente. L’ossature du cabanon est presque terminée. Les derniers arbres, toujours abattus à la scie égoïne, soutiendront le plancher ou encadreront les fenêtres.

Pour la suite, rien n’est encore clairement planifié. On imagine du liège sous nos pieds, de la fibre de bois sous le toit, des copeaux dans les murs. Les choses et les idées se mettent en place petit à petit, en fonction des discussions, des opportunités mais aussi de l’énergie qu’on peut consacrer à la recherche et la récupération de matériaux de seconde main, sains et de bonne qualité. Aux voisins et amis qui nous plaignent sincèrement et voudraient nous prêter des outils à moteur pour gagner du temps, Christian oppose la sagesse de celui qui ne veut pas perdre sa vie à la gagner. Car la permaculture n’est pas seulement une question d’outillage low-tech, de jardinage sur buttes ou de matériaux écologiques:  c’est aussi une philosophie de vie qui va complètement à contre-courant de la frénésie ambiante. Travailler à mi-temps  pour avoir plus de temps pour les enfants, la maison, les loisirs et le jardin est une décision que nous avons prise il y a longtemps. Un choix qui pour un homme reste exceptionnel mais que Christian assume parfaitement. Un choix qui génère certes moins d’argent à la fin du mois mais qui nous offre plus de bonheur au quotidien.

Le cabanon n’est donc pas près d’être fini. Mais peu importe car il joue déjà son rôle d’abri pendant la pluie, suscite des rencontres, réunit des curieux et des amis. A la fin de ce mois,  il abritera même un petit spectacle et une exposition artistique lors des portes ouvertes que nous proposons au jardin lors de la Fête de la Nature. Un beau lieu pour de beaux moments de partage en perspective…

 

Texte(s): Aino Adriaens
Photo(s): Aino Adriaens