Pourquoi il faut lire et relire Les Poèmes de la Fête des Vignerons
Pourquoi il faut lire et relire Les Poèmes de la Fête des Vignerons

C’est un peu mon carnet de route de cet été. Sa couverture plastifiée résiste aux intempéries, aux mains poisseuses de mes gamins et au bazar qui règne dans mon sac. Il a des pages cornées et la tranche bien marquée par les pliures. Ce petit compagnon de voyage, qui a déjà bien vécu et dont je ne me sépare jamais, c’est le livre des Poèmes de la Fête des vignerons.

Je m’y plonge à tout instant. Dans les coulisses de l’arène, avec mes comparses du tableau de la Saint-Martin, en attendant l’ouverture de la porte Nord et notre entrée sur la scène. A l’apéro, autour d’une planchette de viandes séchées, de saucissons et de fromages arrosés d’un petit verre de vin blanc, avec les copines du chœur qui nous accompagnent sur scène. Chez moi aussi, au calme, de retour de répétition, pour me remémorer les émotions engendrées par tel ou tel passage du spectacle.

A chaque fois, c’est le même plaisir. Je découvre une rime, je souris à un jeu de mots ou à une petite pique lancée par ses deux auteurs, Stéphane Blok et Blaise Hofmann. Je m’étonne à chaque page du pouvoir évocateur des mots, chantés ou scandés par les chœurs de la fête, et qui portent si bien les chorégraphies des danseurs.Figurante dans le tableau de la Saint-Martin avec ma marmaille, je ne boude pas mon plaisir de fredonner régulièrement les paroles qui accompagnent notre passage dans l’arène….

Du haut de Jaman
Jaman qui jamais
N’aurait partagé
Un manteau de neige
A la Saint-Martin,
Descend des montagnes,
Du Mont Pèlerin
A la Cape au moine!

«Jaman, Mont-Pèlerin, Cape-au-Moine… On dirait qu’il parle de chez nous», m’avait soufflé à l’oreille  mon garçon de 8 ans à la première écoute de ce chant, lors d’une répétition avec notre troupe, il y a bientôt six mois. En s’identifiant ainsi aux paroles, il voyait juste. Car oui, les poèmes de la Fête parlent bel et bien de nous tous. Les deux librettistes ne se contentent pas de décrire l’année viticole et la rudesse des travaux de la terre. Ils évoquent avec tendresse nos vies d’humbles terriens, proches de la vigne ou pas, que nous soyons suisses ou étrangers, nous qui avons bien souvent perdu le lien avec la terre, nous qui ne comprenons plus grand-chose à la nature, nous qui cherchons à donner du sens à nos vies.

Ces poèmes qui sont source d’évasion mais aussi de réflexion, il faut les lire, quel que soit son rapport à la Fête des vignerons. Il faut les lire si l’on est partie prenante à la Fête, comme tous les figurants investis totalement dans leur rôle, parce qu’on devient encore plus acteur et conscient de sa chorégraphie. Il faut les lire si l’on est spectateur, que ce soit avant, après ou même pendant le spectacle, parce qu’ils donnent du sens aux danses et de la profondeur à la mise en scène. Enfin, il faut aussi les lire si l’on fait partie des personnes que la Fête des vignerons agace, parce qu’en évoquant si justement nos vies, ces poèmes ne peuvent que nous réconcilier avec cette grande bastringue…

Car avant d’être une histoire de plancher LED, de vortex et de grosse sono, la Fête des vignerons est d’abord une histoire de notes et de mots. Sans textes et mélodies, les chorégraphies des Noces, des Bourgeons, de la Saint-Martin ou des Trois Soleils ne ressembleraient tout simplement à rien…  Merci les auteurs!

 

Texte(s): Claire Muller
Photo(s): Claire Muller