La vérité sur le beau Georges
La vérité sur le beau Georges

Pour ceux qui ne suivent pas mon blog régulièrement, sachez que le beau Georges en est une figure familière. C’est un paon de la plus belle espèce et fier de l’être. C’est au jardin celui que tout le monde admire et vers qui tous les regards convergent. Ses portraits remplissent les cartes mémoire et ses plumes ravissent les enfants. Prompt à se pavaner et à faire la roue, il accueille les visiteurs avec une certaine classe, en dépit de ses coups de klaxons et de ses léooons qui font sursauter le public non-averti.  En  quatre ans, il est devenu un élément clé du paysage sonore et visuel du jardin et on vit avec, pour le meilleur et pour le pire.  Je dis bien le pire, car il est grand temps,  Mesdames et Messieurs, chers amis, de briser le mythe.

Pour tout vous dire, Georges a un foutu caractère. Jusqu’à l’adolescence, tout allait bien. Il me suivait comme un toutou partout dans le jardin, tout en gardant une distance respectable et un respect certain pour la main qui lui tendait un lombric ou l’écartait poliment. Puis avec le temps, nos relations se sont gâtées de façon proportionnelle à la croissance de sa queue (elle atteint sa longueur maximale vers l’âge de 3 ans). Dopé par la testostérone,  l’oiseau est devenu imprévisible. Pour ne pas dire sournois. Impossible de jardiner tranquillement sans l’avoir dans le dos, d’abord curieux, puis inquisiteur, puis carrément agressif quand un de nos mouvements le contrarie, comme par exemple un pas en arrière, un mouvement du coude un peu brusque,… Et comment se traduit l’agressivité du beau Georges? Pas par un coup de bec, non:  il vous saute contre, serres en avant, et plante ses griffes dans votre cuisse, votre dos ou votre bras, c’est selon, mais très déplaisant dans tous les cas. Il a fallu s’armer, d’abord de patience et de diplomatie, puis d’un outil bien emmanché ou d’un bambou. Car l’oiseau n’a pas beaucoup de cervelle. Il ne comprend pas que ce qu’il prend pour SON jardin est avant tout le nôtre et qu’il n’a pas à défendre ses dames, Touffu-le-lapin et tout le reste de la basse-cour contre ceux qui les nourrissent. Malgré tous nos efforts, nous avons dû nous résoudre à restreindre son parcours en lui coupant les plumes d’une aile. Georges ne vole plus ou à peine, et doit se contenter de faire le beau derrière une clotûre.

Mais alors, me demanderez-vous, pourquoi diable garder un tel animal? Ça ne se mange pas un paon? Si si, ça se mange, il paraît même que c’était un mets de choix à l’époque romaine! Hors de question pourtant:  Georges serait à coup sûr indigeste. On s’est donc adapté à son tempérament. A force de le côtoyer, nous avons appris à interpréter ses attitudes reptiliennes, à percevoir ses sautes d’humeur, à esquiver ses attaques et surtout, à ne jamais lui tourner le dos. Irascible au printemps, Georges se calme heureusement au cours de l’été, en même temps que tombent une à une toutes les plumes de sa queue. Un apaisement pour tout le monde. Dans mon billet du 28 août 2017 (éloge du paon), je me suis appliquée à justifier ses rôles dans un jardin permacole et les confirment encore aujourd’hui. Mais pas besoin de faire autant de détours. Je peux aussi avouer simplement que je me suis attachée à ce drôle de volatile, et qu’il me fait sourire tous les jours. Mais n’empêche, je vous devais quand-même la vérité.

Et si vous avez encore une minute, prenez le temps de regarder la courte vidéo de Georges que mon fils Antoine a réalisé pour vous.

 

Texte(s): Aino Adriaens
Photo(s): Antoine Lavorel, Christian Lavorel

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