Comptage de lièvres
Comptage de lièvres

Contrairement aux moutons que l’on compte pour trouver le sommeil, il ne faut surtout pas s’assoupir quand il s’agit de dénombrer les lièvres, lors des recensements effectués pour l’Office fédéral de l’environnement.

Cela fait plus de vingt ans que je participe régulièrement à ces «taxations de surface» qui visent à surveiller la population de lièvres de notre pays. Plusieurs secteurs ont été choisi et sont contrôlés de nuit chaque année au début du printemps, quand la hauteur de la végétation des champs de céréales permet encore de repérer les lièvres qui sont actifs du crépuscule à l’aube.

Si on trouve encore ce bel animal dans toute la Suisse, les populations des zones agricoles ont fortement diminuées depuis quelques décennies, à cause de la fragmentation du territoire, des constructions et du manque de structures naturelles que sont les haies, friches et bois.  Il figure aujourd’hui sur la Liste rouge des espèces menacées.

Me voilà donc dans le véhicule 4×4 qui part en tournée dans un secteur du Gros de Vaud. L’auxiliaire du garde-chasse de la circonscription est au volant. Je suis en charge du bon fonctionnement de l’opération pour le compte d’un bureau d’écologie et mon rôle consiste à cartographier toutes les observations.

A l’arrière, deux personnes éclairent la zone d’étude, à l’aide de puissants phares et repèrent les lièvres et toutes les autres bêtes rencontrées. La voiture avance selon un itinéraire défini (le même chaque année) qui permet d’éclairer toute la surface du territoire prospecté.

La soirée défile au rythme des kilomètres parcourus sur les chemins agricoles, parfois près des fermes ou dans les villages. Les odeurs de poireaux, de terres humides ou de fumier se succèdent.  Lièvres, renards et chevreuils sont ainsi comptabilisés durant cette opération qui durera jusqu’aux petites heures du matin. Parfois un blaireau ou un hibou moyen-duc nous gratifient d’une belle observation.

Vers deux heures, nous retrouvons la seconde équipe (en charge de la partie sud du secteur) pour partager nos données, discuter un moment et comparer grossièrement les chiffres à ceux de l’année précédente, avant que tout le monde ne rejoigne ses pénates… 70 lièvres environ pour la zone d’un peu moins de 1’300 hectares, soit une moyenne de 5,5 au km2.

« Ça continue de diminuer…mais bon, 13 renards sur le secteur nord, c’est trop ! il faudra réguler…c’est pour ça qu’il manque des lièvres. » Je surprends cette phrase dans mon dos, alors que je range des affaires dans le coffre de la voiture.

Pauvre goupil qui endosse tous les maux.  On se garde bien de dire que les nemrods ont prélevés une trentaine de lièvres sur le secteur à la dernière saison de chasse…

Texte(s): Pierre Baumgart
Photo(s): Pierre Baumgart