berne, De Thoune à Langnau (BE)

Balade à vélo de l’Oberland à l’Emmental, à la force du mollet… et du moteur

Cet été, la rédaction de «Terre&Nature» se relaie pour parcourir à vélo électrique les sept premières étapes de la Route du Cœur. Aujourd’hui, notre étape nous mène de Thoune à Langnau (BE).

Balade à vélo - Thoune - Langnau

Il fait cru sur les bords du lac de Thoune. Les étroites ruelles pavées du centre-ville à peine quittées, un fin crachin et un air froid nous saisissent. La météo maussade était annoncée et nous avons par chance prévu des épaisseurs imperméables et chaudes. Ces dernières tombent cependant assez rapidement, car l’itinéraire commence par une difficulté: 600 mètres de dénivelé en 10 kilomètres pour quitter Thoune et grimper sur les collines environnantes. Avouons-le, avec l’assistance électrique, grimper une côte de 13% devient un jeu d’enfant. En danseuse, on évolue à 20 kilomètres-heure! Et si nous sommes rapidement essoufflées, c’est plutôt à force de batoiller… Assez rapidement, nous atteignons Heiligenschwendi, à 1100 mètres d’altitude. La signalétique est précise et c’est sans se poser de question qu’on quitte l’asphalte pour pénétrer dans un bois. Gravillonneuse et détrempée, la route forestière qui descend à pic demande une attention de chaque instant. En adeptes du VTT, nous débloquons nos fourches télescopiques pour une meilleure adhérence et adoptons la position de descendeur. Mais le peu de réactivité de nos bécanes nous décourage bien vite de jouer les Nino Schürter: en termes de tenue de route, on a connu mieux que ces cadres lourds et patauds! Au détour d’une clairière, les doigts engourdis par le froid, la soudaine scène d’un bûcheron occupé avec une antique scie à ruban nous fait soudain piler. L’excuse est toute trouvée pour nous désaltérer et croquer quelques fruits secs.

Solitude et eau glaciale
Quelques kilomètres plus loin, un panorama grisouille s’étale sous nos yeux. De l’autre côté du lac de Thoune, on devine, au pied du Niesen, le Simmental et le Kandertal qui s’enfilent entre les plus hauts sommets du canton de Berne. Le paysage se laisse savourer, malgré les nuages. Assez rêvé. Nous sommes rappelées à l’ordre par notre itinéraire qui bifurque soudain vers le nord et nous propose une nouvelle grimpette, direction Eriz.
Tantôt arbres et mousses, tantôt foin fraîchement fauché: les odeurs accompagnent à merveille notre périple, qui serpente entre bois sombres et raides pâturages. À Horrenbach, hameau perdu au milieu des collines escarpées, des accus neufs nous attendent dans un lieu insolite. C’est en effet une ancienne école qui sert de station relais à la Route du Cœur. Sans y voir âme qui vive, nous remplissons nos gourdes avec l’eau glaciale de la fontaine et clipsons nos nouvelles batteries. C’est reparti pour une série de montées et de descentes, qui auront rapidement raison de nos estomacs. C’est décidé, au prochain village, ce sera la pause röstis. Seulement voilà, dans la vallée de la Zult, les hameaux se suivent – Linden, Eriz, Ausseriz, Unterhalten – et se ressemblent: les bistrotiers de la région semblent s’être mis d’accord pour fermer simultanément. Il nous faudra pousser jusqu’à Schwarzenegg, pour dénicher une cuisine régionale, certes pas des plus fines, mais qui remplira son rôle à merveille. La route perd ensuite de sa difficulté. Les pentes semblent moins abruptes, les fossés moins raides, à moins que ce ne soit l’effet des röstis qui adoucissent le relief? À Röthenbach im Emmental, nous pouvons à nouveau échanger nos batteries. Une côte – la dernière, théoriquement! – nous mène à Churderhüsi. Au fond d’un pâturage, la chapelle de Würzbrunnen et son magnifique clocher attirent notre regard. Vieille de plus de mille ans, elle a servi de cadre aux films tirés de l’œuvre de l’écrivain alémanique Gotthelf et vaut franchement le détour.

Une minute d’inattention et…
Voilà, nous arrivons au bout de nos 1900 mètres de dénivelé positif (et pas 1400 comme annoncé!) Les «efforts» sont derrière! Assez sereinement, nous repartons donc pour la dernière portion de notre itinéraire. Mais à Signau, quelque peu abruties par la fatigue, nous suivons niaisement les pancartes de la Route 99 et tirons vers le nord-ouest. Mal nous en prend. Nous voici de nouveau à pédaler en danseuse dans une côte qui nous aurait conduites tout droit… à Berthoud, la prochaine étape de la Route du Cœur! Quand on s’aperçoit de l’erreur, on est déjà à mi-pente… Mieux vaut en rire! Après un demi-tour sous le regard amusé de quelques anciens assis sous un porche, nous filons cette fois-ci vers Langnau. Les cinq derniers kilomètres sont plats – les seuls de l’itinéraire! – et l’on se prend à démarrer un sprint final dans le rond-point qui précède la descente sur la gare, histoire de tester une dernière fois nos petites reines à moteur. Elles retrouvent enfin leur quai de gare, et nous, les rames vert et gris de la compagnie BLS. Quelques étirements nous seront nécessaires: les montagnes russes de l’Oberland bernois auront eu, malgré notre enthousiasme, raison de nos mollets!

Texte(s): Claire Müller
Photo(s): Claire Müller

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