Ciel bleu et douce chaleur de l’été indien, cette balade sur le sentier des Pives de Haute-Nendaz s’annonce sous les meilleurs auspices. C’est une bonne chose, car nous allons grimper à plus de 2000 mètres d’altitude. L’itinéraire des Pives nous initie aux différentes caractéristiques des conifères de la région, à leurs fruits de formes très variées, mais également aux espèces animales pour lesquelles ils représentent une importante source de nourriture.
Du centre de Haute-Nendaz, une première marche d’approche mène à l’étang de Sofleu. Un paysage subalpin bucolique où les feuillus tiennent encore une large place. Un peu plus haut, à Tsâblo Plan, nous entamons une transversale le long du bisse de Saxon. Avec 26 kilomètres de longueur, il est le plus étendu du canton mais il n’est plus en eau à l’heure actuelle. Transformé en récipient, son fond asséché recueille une quantité de pives très allongées, celles de l’épicéa. Un fruit que l’écureuil et les pics apprécient, comme le démontrent les nombreux restes décortiqués abandonnés sur de vieilles souches ou coincés dans une anfractuosité d’écorce. Le long de ce chemin, nous sommes constamment accompagnés par l’appel enroué du casse-noix alors que les silhouettes de la Dent-Favre et des Grand et Petit Muveran apparaissent sporadiquement entre les arbres. Au pierrier de la Dzerjonna, un éboulement vieux de plusieurs siècles aux blocs couverts de lichens, nous bifurquons à gauche pour remonter une large piste de ski avant de retrouver un étroit sentier forestier pétri de charme.

Les grands mélèzes de Balavaux
Cette grimpée, parfois rude, jusqu’à Balavaux s’écarte momentanément du sentier des Pives, via le lieu-dit de la Croix de Jean-Pierre, mais le détour vaut largement l’effort consenti. Au sortir du bois, l’arrivée sur le pâturage se transforme en somptueuse fenêtre panoramique. Sous les sommets arrondis, les éboulis sont rehaussés du rouge vif des buissons myrtilles, du jaune flamboyant de grands mélèzes. En s’approchant, on prend conscience de la taille phénoménale de certains spécimens. Les conifères de Balavaux sont considérés comme les plus grands d’Europe et leur circonférence dépasse parfois les 10 mètres. Un lichen d’un vert acide, Letharia vulpina, s’accroche à leurs troncs. Cette espèce, l’une des rares toxiques pour l’homme, était utilisée autrefois pour empoisonner les loups.
Au contraire de celles de l’épicéa qui sont grandes et allongées, les pives du mélèze sont petites et rondes. Une autre espèce d’oiseau en est friande: le bec-croisé, dont le nom révèle déjà que les mandibules de son bec se chevauchent. Outil spécialement conçu pour écarter les écailles de ces petites pommes de pin afin d’en extraire les graines. Nous en avions vu déjà quelques-uns dans un secteur bien frais du sentier montant, mais c’est à Balavaux que l’arolle se fait plus présent. Les pives de ce conifère au port très noble semblent avoir les faveurs des oiseaux et petits mammifères. Il nous est même difficile à cette époque de l’année d’en trouver une seule qui soit encore intacte.
De retour à la Croix de Jean-Pierre, nous prenons à gauche pour rejoindre Pra-de-Dzeu. Ce grand pâturage offre une vue grandiose sur les sommets alpins qui forment une frontière entre les cantons de Vaud et de Berne. Nous dépassons les vieux mayens, les granges et les raccards, pour nous retrouver aux portes de Haute-Nendaz. Découvertes naturalistes, paysagères ou animalières, cette jolie vadrouille dément une expression. Il est parfois bien plaisant de se faire envoyer au pives.