Du télésiège qui nous emmène sans bruit vers les sommets alpins surplombant la station d’Ovronnaz, le Grand-Chavalard, la Dent-Favre, les Grand et Petit-Muveran forment un fantastique cirque rocheux. C’est là, au cœur de ce cadre remarquable, que le sentier didactique Mille fleurs dessine son parcours. Dès que nous quittons la station du télésiège, la flore va généreusement imposer sa présence jusqu’au terme de notre marche. De Jorasse à Petit-Pré, lors de la montée jusqu’au sommet de la Seya, puis sur l’arête magnifique qui mène à Grand-Garde, une multitude d’espèces se succèdent à un rythme continu. L’aconit napel, la pédiculaire verticillée, l’orchis vanillé et l’arnica, qui se plaisent sur l’ancien alpage, côtoient de près le thym serpolet, trois espèces de joubarbes ou l’aster des Alpes, des fleurs qui préfèrent pour leur part les sols rocailleux. Occupée à butiner toutes ces corolles, une armée de papillons s’égaille devant nos pieds. Les couleurs vives ne manquent pas ici.

Grande amatrice de botanique
Peu avant d’atteindre Grand-Garde, nous croisons le chemin de Marie-Jo Maillard. Une rencontre au sommet – nous sommes sur une crête à plus de 2000 mètres avec vue panoramique –, convenue avec la créatrice du sentier Mille fleurs. «La flore de ma région me passionne depuis tant d’années que j’ai eu l’envie de partager, et surtout faire connaître ce patrimoine exceptionnel. On trouve ici près de 200 espèces, dont de nombreuses raretés, aussi bien que la plus grande station connue d’anémones à fleurs de narcisse du Valais central, explique cette passionnée de botanique. L’idée d’un sentier didactique a germé en 2013. En 2016, j’ai d’abord obtenu l’aval, puis un appui important, de la commune de Leytron. Ces derniers jours, je mets la dernière main aux finitions, car l’inauguration du sentier approche à grands pas (ndlr: le 16 juillet).»

Le nez dans les pâturages
Depuis la pointe de Grand-Garde, et sa vue plongeante sur la plaine du Rhône, nous gagnons le lieu-dit Queu. Des sommets alpins pointés vers le ciel, nous changeons pour une lumineuse forêt de mélèzes. Des arbres majestueux, imposants. Le cri de marmottes s’élève du tapis herbeux sur lequel s’est développée cette forêt clairsemée. Mais nous levons à peine le nez tant nous sommes captivés par le monde floral qui change au fur et à mesure de notre progression. Les larges coussinets bleus de géraniums des bois sont bordés ici de buissons de myrtilles, de rhododendrons dont les fleurs roses tirent sur leur fin. ­Patchwork bigarré cerné d’une foison d’oseilles dont les tiges rouges font flamboyer le paysage. Le taillis se fait soudain plus dense. Puis, en alternance avec des zones boisées, nous franchissons des couloirs pentus à végétation courte. Le soleil vient de disparaître derrière une crête. Ailes fermées, des papillons ont déjà choisi la graminée où ils passeront la nuit. Puis, à l’approche d’Ovronnaz, un bruit de sonnailles se faire entendre. Des vaches de la race d’Hérens viennent d’arriver dans leurs quartiers d’été d’Odonne. Un troupeau de silhouettes massives d’un noir presque bleuté, partiellement masquées par une prairie encore très haute.
Lors de notre passage, nous n’avons pu voir une rareté botanique sur ce sentier des Mille fleurs. Il était trop tôt pour admirer la X Gymnigritella suaveolens. Mais lorsque ce numéro de Terre&Nature paraîtra, le moment sera en revanche idéal pour découvrir cette orchidée rare, fruit d’un croisement entre l’orchis moucheron et l’orchis vanillé. Deux jolies fleurs qui se caractérisent par leur parfum des plus subtils. Deux, parmi bien d’autres sur ce sentier.