genève - vaud, Le Sentier

De la vallée de Joux à Genève à travers pâturages, forêts et villages

En sept journées accessibles à tous les e-cyclistes, la Route verte relie Schaffhouse à la Suisse romande en traversant les six parcs naturels de l’arc jurassien. On en a testé la dernière étape, avec bonheur. 

Le vélo électrique n’est pas seulement un moyen de transport écologique et agréable, qui solde la joie de pédaler au prix d’un effort plus que modéré. Panoramique, endurant, il est aussi un parfait révélateur de paysages et incite à la découverte et au contact. Bref, le vecteur idéal pour s’imprégner d’une Suisse aux routes et aux horizons dont la nature n’est jamais absente.

Depuis 2018, la Route verte propose justement aux cyclistes de découvrir les six parcs naturels régionaux de l’arc jurassien sur toute la longueur de ce dernier – soit Schaffhouse, Jurapark Argovie, le parc de Thal (SO), ceux du Doubs et du Chasseral (NE-JU-BE) et enfin le Parc Jura vaudois. Un itinéraire découpé en sept étapes de 50 à 80 km (rien d’effrayant avec un vélo électrique!) où les vergers traditionnels à hautes tiges succèdent à des vignobles réputés, avant de céder la place aux forêts denses et aux méandres du fleuve frontalier qu’est le Doubs. Les pâturages boisés, les bourgades industrieuses bâties au cordeau autour d’une industrie horlogère toujours bien présente et les champs couverts de grandes cultures figurent également au programme. Dûment casqué et confortablement installé en selle, on goûte ainsi à une succession d’atmosphères toutes marquées de la fraîcheur piquante typique de la chaîne jurassienne – dont chacune, pourtant, est subtilement différente. Au profil de cette randonnée, quelques cols, bien sûr, et un total de 467 kilomètres sur des chemins faciles. Mais surtout un dépaysement constant et une (re)découverte émerveillée.

Et même une seule portion de la Route verte vaut largement le coup; en l’occurrence, c’est la dernière que l’on a choisie, celle qui relie Le Sentier (VD) à Genève, offrant au passage une incomparable immersion dans le Parc Jura vaudois. La logistique, toutefois, s’en trouve compliquée: car si la location de vélos (électriques ou non) est possible au départ de toutes les étapes, la restitution doit se faire à la même station que le retrait – à moins que l’on ne fasse l’entier de l’itinéraire. Sinon, mieux vaut mieux disposer de sa propre monture et recourir aux transports publics pour la convoyer sur place.

À faire sans se presser
C’est donc ce qu’on a fait, en s’en tenant d’ailleurs à un vélo sans assistance électrique. Pourquoi pas? Cette belle balade à deux roues a beau conjuguer 70km avec un dénivelé positif évalué à 800 m au total, la vraie grimpette se limite en réalité à peine à 300 m d’élévation sur 4 km. Elle fait d’ailleurs office de mise en jambes: à peine est-on descendu du train à la gare du Sentier que la route, régulièrement balisée des panneaux indicateurs «La Suisse à vélo No7», file en direction du Brassus (VD), où l’on commence tout de suite l’ascension du col du Marchairuz (VD) par son côté nord. Inutile de vouloir jouer le maillot à pois sur ces quelques kilomètres; mieux vaut prendre le temps de se retourner pour contempler la vallée de Joux que l’on quitte ainsi lentement, blottie contre la forêt du Risoud. Au fond, le lac miroite au soleil, et, en point de mire, la silhouette de la Dent-de-Vaulion donne au panorama son harmonie caractéristique.

Juste avant le col, à la hauteur du chalet d’alpage Le Pré-de-Bière, le tracé bifurque à droite et s’enfonce dans la Combe-des-Amburnex. On découvre ainsi sa succession de prairies vallonnées enchâssées dans les épicéas, striées de longs murets de pierres sèches qui y tracent leur antique cadastre parcellaire. En ce début du mois de juillet, la grande gentiane pousse en d’exubérants bouquets d’or et de vert cru; ravies d’avoir enfin pris leurs quartiers d’été, les vaches paressent à l’ombre des arbres ou autour des abreuvoirs. En légère descente, gravé dans le flanc de cette vallée aux doux reliefs, le chemin que l’on suit multiplie les points de vue d’où le regard plane à son aise sur la beauté du site. Pédaler est inutile… autant laisser aller!

Détours tentateurs
On peut aussi profiter de cette facilité pour faire un petit détour par l’un des chalets d’alpage situés à proximité immédiate du tracé: les Amburnex, le Pré-aux-Veaux… De fait, la végétation unique et le microclimat de cette combe favorisent une végétation riche et aromatique dont les laitières tirent le meilleur de mai à octobre; il en naît un fromage aux saveurs particulières (AOP gruyère d’alpage!) régulièrement distingué par les taxateurs de la filière. Mais déjà, notre route amorce la descente sur Bassins (VD). Prudence, quand même; elle est sinueuse, parfois gravillonneuse, et l’altimètre dégringole assez vite. S’arrêter pour contempler le lac Léman et les Alpes au loin à la faveur d’une trouée dans la forêt s’impose.

L’arrivée à Bassins marque le début d’un nouveau nuancier champêtre où le vert compose avec l’or pâle des céréales mûres. Le temps des moissons est déjà revenu dans ces champs bien calés contre un Jura qui les protège des intempéries; les machines taillent des pistes aux reflets chatoyants dans la mer des épis, sous un paresseux nuage de poussière pâle. Les milans, les buses et les corneilles planent, à l’affût d’un rongeur soudain privé de son abri.

Proches du but
Suivant toujours nos flèches rouges au «7» bien visible, on passe Le Muids (VD) et sa belle fontaine à laquelle il fait bon remplir la gourde, avant d’arriver à Genolier (VD) où l’on se cale sur l’itinéraire «La Suisse à vélo No50». Givrins, Trélex, Gingins, Chéserex, Grens puis Borex (VD) sont vite derrière nous, en profitant de chemins vicinaux où les rares rencontres motorisées se limitent à celle d’un tracteur garé sur l’accotement. Mais l’autoroute n’est pas bien loin, et le trafic des axes voisins s’intensifie. Il va falloir rester concentré sur les panneaux indicateurs pour éviter de se fourvoyer. À Chavannes-de-Bogis (VD), la traversée rectiligne du bois de Portes nous offre un ombrage bienvenu, sur le seul tronçon non revêtu de bitume de tout l’itinéraire; juste après, toujours sous les frondaisons, on franchit la frontière cantonale invisible entre Vaud et Genève… avant de sortir de la forêt pour retrouver les champs et la silhouette de l’église de Collex-Bossy (GE), parfait complément de cette carte postale estivale.

Peu à peu, l’imbrication entre ville et campagne propre au canton de Genève se fait plus étroite et les champs cèdent définitivement la place aux habitations. On est bientôt à Chambésy (GE), regrettant un peu de devoir s’insérer dans la circulation dense de la rue de Lausanne (d’autant qu’elle implique de rester très vigilant…). Mais la place Cornavin et la gare Centrale de Genève sont en vue, et avec elles le but de cette belle journée cyclotouristique.

+ d’infos larouteverte.ch

étapes

L’Espace horloger au Sentier (VD)
Rouvert en 2019 avec un nouveau concept, ce musée ludique et interactif retrace l’histoire horlogère de la vallée de Joux et en présente ses pièces les plus fameuses.+ D’infos espacehorloger.ch
Chalet d’alpage du Pré-de-Bière (VD)
Fabrication de gruyère d’alpage AOP, vente de produits du terroir et accueil des randonneurs de passage font de Pré-de-Bière un détour à ne pas manquer.+ D’infos alpage-pre-de-biere.ch
Le sentier du Sapin à Siméon
Sur le flanc sud du Marchairuz, ce court sentier didactique à la vue spectaculaire invite à la découverte de la Vallée, en lien avec une petite exposition à l’Hôtel du Marchairuz.+ D’infos parcjuravaudois.ch
Musée du Moulin de Chiblins (VD)
Dans un ancien moulin encore fonctionnel, une vitrine fascinante de l’évolution technique de l’agriculture en terre romande et une collection de tracteurs d’époque.+ D’infos musee-chiblins.ch
Le Bois de chênes de Genolier (VD)
Vaste chênaie parsemée de clairières, ce site protégé propose visites guidées et activités pédagogiques en partenariat avec le Parc Jura vaudois.+ D’infos boisdechenes.ch
Jardin botanique de la Ville de Genève

Le plus grand de Suisse, dont les serres centenaires sont la signature visuelle. Mais la luxuriance de ses jardins thématiques à elle seule mérite la visite.

+ D’infos www.geneve.ch

Texte(s): Blaise Guignard
Photo(s): Blaise Guignard/DR

infos pratiques

Y aller

En train: RER ligne S2 jusqu’au Day, puis ligne Travys jusqu’à l’arrêt Le Sentier-L’Orient. Retour: Genève CFF, correspondances pour toutes destinations.

Le parcours

68,9 km presque intégralement sur bitume et à l’écart des grands axes; 700 m de dénivelé positif pour 1337 m de descente. Balisage «La Suisse à vélo», aisément repérable sur tout le tracé.

Se restaurer

Plusieurs buvettes d’alpage entre Le Sentier et Bassins et des restaurants aux terrasses accueillantes entre Bassins et Genève: ce ne sont pas les possibilités qui manquent!

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