Portrait
Les aventures grandeur nature de Julien Perrot sur petit écran

Le fondateur de La Salamandre, bientôt 48 ans, animera dès le 29 août sur la RTS Nos amis sauvages, une série en six épisodes sur la faune de nos régions. Portrait d’un infatigable explorateur. 

Les aventures grandeur nature de Julien Perrot sur petit écran

Julien Perrot donne rendez-vous au Jardin botanique de Neuchâtel et arrive accompagné de Zora, sa fille. Le temps de s’installer sur la terrasse du café, voilà qu’une guêpe vient jouer les trouble-fête, attirée par la glace que le duo s’apprête à déguster. «Tu te souviens de ce qu’on fait dans ces cas-là? Une lente danse avec les bras, pour l’éloigner sans l’énerver», explique patiemment Julien Perrot à sa cadette de 6 ans. «Les guêpes ont faim en ce moment, elles ont beaucoup de bébés à nourrir avant l’arrivée du froid», poursuit le fondateur de La Salamandre. Quelques instants plus tôt, au bord de l’étang qui servit de décor à son portrait photo, il s’était déjà émerveillé devant les libellules ondulant sous le soleil et la multitude de petits gerris occupés à patiner sur l’eau.

Première télé à 11 ans
À bientôt 48 ans, Julien Perrot a conservé de l’enfance une admiration intacte pour la nature. «Une source inépuisable de sujets et d’observations», lâche-t-il quand on lui demande s’il sent parfois poindre une forme de lassitude après trente-sept ans à la tête de La Salamandre. Il parle vite et répond sitôt la question posée, esquive les sujets trop personnels. On sent l’homme rompu à l’exercice médiatique. Les presses suisse et étrangère lui ont consacré de nombreux portraits, la télévision et la radio lui tendent régulièrement le micro. Sa première apparition à l’écran remonte à l’enfance. Il a 11 ans et vient de lancer son journal. Sa chambre ressemble à une pièce de musée où sont exposées ses collections de plumes, de minéraux et de fossiles. «Je rapportais aussi toutes sortes de bêtes à observer, des lézards, des serpents, des grenouilles. Ma mère a été très patiente», sourit-il. À l’époque, il ne rate pas un épisode de l’émission animalière Escapades, diffusée le dimanche soir sur la TSR. «J’ai écrit à Pierre Lang, son animateur, pour lui raconter ma passion pour la nature et évoquer La Salamandre.» Deux semaines après, le journaliste débarquait chez lui avec une équipe de télévision.

Youtuber engagé
Près de quarante ans plus tard, Julien Perrot revient à l’écran avec sa propre émission, Nos amis sauvages, diffusée tous les samedis soir dès ce 29 août sur RTS Un. Une série en six épisodes de 26 minutes qui présentera des animaux de nos régions et les enjeux liés à leur préservation, tel le bouquetin à Derborence, le castor le long de l’Hermance ou encore l’escargot en Ajoie. Le projet lui tenait à cœur depuis longtemps. «L’objectif de ce programme est d’amener le public à se questionner sur les enjeux présents derrière ces espèces. En évoquant l’habitat du faucon pèlerin, on soulève la problématique des pesticides, en présentant le martin-pêcheur, on aborde le sujet de l’état de nos rivières. Ces enjeux impliquent tous des choix individuels et sociétaux.» Des thèmes chers à ce passionné et diplômé en biologie de l’Université de Neuchâtel. «Alors, j’hésitais entre les sciences et le journalisme.» Il finira par conjuguer les deux.

Aujourd’hui, La Salamandre compte deux revues supplémentaires destinées au jeune public, possède son festival annuel, produit des films et édite des livres. Et puis, il y a quatre ans, Julien Perrot a créé «La minute nature», sa chaîne YouTube, suivie par près de 60000 abonnés, sur laquelle il poste chaque semaine des vidéos dans lesquelles il se met en scène avec sa GoPro pour évoquer sa rencontre avec le lynx, le chant des oiseaux ou les secrets bien gardés d’une orchidée parasite.

Parmi les lions du Botswana
Julien Perrot est un paradoxe. Le personnage affiche des connaissances de vieux prof de sciences dans une enveloppe d’éternel ado, se montre à la fois hyperactif et observateur contemplatif. Insatiable en nature et décroissant à la ville. «Je ne suis pas à l’aise dans les magasins. La consommation est un bonheur bien trop éphémère. Prendre l’avion pour une virée shopping à Barcelone est un mirage, une aberration de ces trente dernières années. Ce modèle devient éthiquement intenable.» Cet été comme chaque année, il est parti camper en famille dans les Grisons. Avec son épouse, il vit depuis longtemps sans voiture, s’octroie de la viande ou du poisson une ou deux fois par semaine, cultive son potager. «C’est fou comme le monde moderne nous a désappris à être autonomes. Pourtant, nous devrons y revenir, qu’on le veuille ou non. Pas dans une quête de repli sur soi, mais en pratiquant une économie locale et participative», esquisse-t-il. Les voyages ont formé sa jeunesse. Il y a eu le Chili, la découverte de l’Amazonie péruvienne, les nuits sous tente parmi les lions et les éléphants du Botswana. «Mais, ce qui m’a le plus ému, c’était d’apercevoir dans la savane sénégalaise une hirondelle ou un milan noir et de savoir qu’ils avaient traversé les Alpes, la Méditerranée et le Sahara depuis l’Europe. Les oiseaux sont notre lien avec l’Afrique.» De ces voyages, il retient surtout l’immensité des espaces. «À côté, notre territoire paraît minuscule.» Suffisamment vaste toutefois pour le faire déjà rêver à de futures explorations.

+ D’infos «Nos amis sauvages», dès le 29 août, chaque samedi à 18 h 45 sur RTS Un.

Texte(s): Aurélie Jaquet
Photo(s): Guillaume Perret/Lundi 13

Son univers

Un animal: La salamandre. «Parce que j’en ai vu naître à 11 ans et que j’ai assisté pour la première fois au miracle de la vie.»

Un plat: Une fondue. «Dans la neige avec des amis, avant un bivouac au cœur de l’hiver.»

Un lieu: Le val d’Hérens. «Pour le lac Bleu d’Arolla et ses mélèzes.»

Un livre: «La saga de Youza», «Ma dernière lecture. Un ouvrage de Juozas Baltušis sur le quotidien d’un paysan lituanien entre 1920 et 1950.»