J’ai testé...
En y mettant douceur et méthode, le travail du miel s’avère gratifiant

Grâce à Carine Beaud, apicultrice à Riaz (FR), j’ai réalisé un rêve: endosser la tenue de l’apiculteur et m’initier aux gestes conduisant à la production d’un pot de miel. Tout à la tâche, j’ai compris que les abeilles et le miel exigent bien du savoir-faire et du respect.

En y mettant douceur et méthode, le travail du miel s’avère gratifiant

J’avoue: je m’imaginais déjà visé par un essaim d’abeilles furieuses de voir mes grosses pattes fouiller dans leur ruche. C’est tout le contraire qui s’est produit à l’occasion de cette initiation très zen au travail du miel, offerte par Carine Beaud. Apicultrice à Riaz, cette jeune mère de famille m’a tout de suite mis en confiance. Après m’avoir équipé d’une tenue de protection, chapeau et voilette compris, elle m’a entraîné sans transition vers les huit ruches disposées dans un petit pré situé derrière sa maison, où nous croisons le vol de nombreuses abeilles.

Un vocabulaire à apprendre
Première étape: l’enfumage qui produit un effet calmant sur les abeilles. «Aujourd’hui, cette opération consiste en une simple précaution, explique Carine. Nous ne devrions pas trouver d’abeilles dans les cadres de hausse. Je les ai déjà faites descendre dans le bas de la ruche, sans possibilité pour elles de remonter.»
Un rien tendu, mais heureux de faire enfin plus ample connaissance avec les abeilles, j’emboîte le pas de Carine, tout en récapitulant le vocabulaire de l’apiculteur: cadres de hausse, soit le châssis amovible en bois ou en plastique recouvert de cire disposé dans la partie supérieure de la ruche. Mais pas moyen de prendre des notes avec cette paire de gants. Et de toute manière, il est déjà temps de découvrir l’intérieur de la ruche. Et là, effectivement, aucune abeille pour m’attendre. L’apicultrice m’explique alors comment sortir les cadres de hausse, un à un, pour les transporter à la miellerie. Mais attention, leur manipulation requiert beaucoup de doigté. À les empoigner trop brusquement ou à les laisser tomber, l’on risque de perdre toute la production de miel contenue dans les alvéoles. Sous l’œil très attentif et bienveillant de Carine, qui a certainement décelé ma tendance à la maladresse, je prends le chemin de la miellerie.

Libérer le miel
À l’abri du soleil brûlant de juillet, et débarassé de ma tenue de protection, je peux enfin examiner de près le contenu des cadres. Sous la cire, je vois poindre des éclats dorés du miel. Les abeilles de Carine ont fait du beau travail. Trace olfactive de leur récolte, c’est toute une Gruyère de forêts et de prairies fleuries qui embaume la miellerie. Mais je ne suis pas là pour écrire. Ca matin, la poésie est dans l’action et Carine me tend un outil qui ressemble à un peigne métallique. «Avec la fourchette à désoperculer, vous allez soigneusement ôter la couche de cire recouvrant le miel», m’explique-t-elle en joignant le geste à la parole avec aisance et efficacité. À mon tour, je m’attaque à mon premier cadre. Aïe! Ma fourchette se plante dans le miel. Nouvel essai. Pas encore concluant. Suivant les conseils de Carine, toujours aussi aimable, je finis par prendre le coup. Les écailles de cire se détachent et finisssent dans un petit bol où je ne résiste pas à la tentation d’aller piocher quelques chewing-gum de cire. Les mâcher est un délice.
Tout en poursuivant l’opération, Carine et moi parlons de son métier. Au-delà de la transmission d’un savoir-faire, et de l’initiation au métier d’apiculteur, cette jeune femme fait passer un message: «Nous avons tous un rôle essentiel dans la préservation des abeilles. Notre mode vie a un impact direct sur elles. N’oublions pas que 60% de notre alimentation dépend des abeilles. Le miel, c’est sympa, mais il ne faut pas perdre de vue leur rôle de polinisateurs.» Les classes, les familles, toutes celles et ceux qui rendent visite à Graines d’apiculteurs, la petite entreprise familiale de Carine, repartent tous avec non seulement un pot de miel mais encore une conscience plus aigüe de l’importance des abeilles. En attendant, j’ai encore du boulot pour enfin faire mon miel de cette belle matinée d’initiation.

+ D’infos www.grainesdapiculteurs.ch

Texte(s): Nicolas Verdan
Photo(s): Mathieu Rod

Les étapes: De la ruche au pot de miel

Enfumage
Carine Beaud prépare l’enfumoir. Le simple fait de pulvériser un peu de fumée sur la ruche au moment de l’ouvrir produit un effet calmant sur les abeilles. Leur instinct leur fait croire à l’incendie, les poussant à se gorger de miel. Gavées, elles sont moins agressives.

 


Désoperculation

Une fois les cadres de hausse transportés dans la miellerie, il s’agit de les désoperculer à l’aide d’une fourchette permettant d’extraire les opercules de cire des alvéoles formant une sorte de film sur le miel de la récolte. Cette opération exige une certaine adresse.

 


Extraction à la miellerie
Les cadres désoperculés sont placés de manière verticale, en rayon, dans un extracteur qui va les faire tourner. Sous l’effet de la force centrifuge, le miel est projeté sur les parois de la cuve. Le fait de s’asseoir sur l’extracteur permet simplement de lui éviter de tanguer.

 


Mise en pot
À l’aide d’un robinet à large ouverture, on fait couler le miel dans une petite cuve. Il ne reste plus qu’à entreprendre la mise en pot. Carine Beaud dispose de toute une gamme de bocaux. Sur les étiquettes, elle précise de quel miel il s’agit et donne toujours une indication de date.